Point COVID de la semaine

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leon macnoussi
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juil. 2020 26 20:16

Point COVID de la semaine

Message par leon macnoussi

#1

Aujourd'hui, c'est dimanche. Voici des infos de Dendrobate Doctor et nous sommes ensemble pour faire l'état de la recherche sur l'épidémie de Covid-19.

1 point autorité
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FAKE DE LA SEMAINE

On commence tout de suite avec la fausse bonne idée de la semaine, qui tourne une fois encore dans le cortège des « excuses pour ne pas porter un masque parce que j’ai trop chaud » : il faudrait attraper le virus en été, pendant qu’il est affaibli.
Bien entendu, le message ne donne aucune source et commence par un classique argument d’autorité (voir section « Point méthode de la semaine »). Cette fois-ci c’est un « Message d’un pharmacien » en capitale qui ouvre le bal. Rappelons déjà que les pharmaciens sont des spécialistes des médicaments, de leurs interactions, de leurs effets secondaires et de leur administration. Ils ne sont ni virologue, ni infectiologue, ni pneumologue, ni immunologiste, un pharmacien qui vous donne un conseil contraire au consensus médical ne doit pas être écouté, il doit être signalé au conseil de son ordre.
Le message reprend beaucoup l’idée que le virus est « affaibli » en été : c’est parfaitement faux, évidement. C’est l’épidémie qui, dans une certaine mesure, peut être affaiblie. En été en effet, plusieurs choses se produisent qui peuvent freiner la propagation. Les surfaces sont plus chaudes, le virus survit dessus moins longtemps. Les gens sont plus dehors et moins les uns sur les autres, les distances entre individus plus importantes et donc la propagation moins facile. On aère plus volontiers, on prend moins les transports etc. autant de facteurs qui peuvent ralentir la propagation d’un virus. Mais rien de tout cela ne change quoi que ce soit à la dangerosité du virus lui-même, vous avez moins de risque de l’attraper, mais si vous l’attrapez, il sera tout aussi dangereux.
Le message insiste également sur le fait que nous pouvons mieux nous défendre car notre système immunitaire serait « à son maximum » en été. Une bonne fois pour toute, votre système immunitaire n’est pas un personnage de jeu vidéo dont on peut remplir la jauge de combo en prenant des bains de soleil et en buvant des smoothies aux épinards. Soit il marche, soit il ne marche pas, point. S’il marche, il marche hiver comme été. S’il ne marche pas, soit il est affaibli par une précédente infection ou une maladie (parfois un traitement, mais les personnes dans cette situation sont généralement vigilantes, je ne les inclus pas dans les conseils ici), et dans ce cas vous devez prendre un maximum de précautions le temps qu’il se reconstruise si cela est possible, soit il est trop réactif. Il n’est pas « à son maximum », il est « trop » et c’est une maladie. Ironie du sort, c’est même ça qui tue les patients aujourd’hui : le système immunitaire s’emballe et fait n’importe quoi, ce sont les fameux orages de cytokines.
N'oublions pas, par ailleurs, que les zones où l’épidémie est actuellement active sont pour beaucoup des zones soumises à un fort ensoleillement et des températures élevées (Californie, Brésil, Guyane etc.).
Enfin, le message agite beaucoup, histoire de faire peur, la crainte d’une deuxième vague si l’immunité collective n’est pas atteinte. Faisons ici la part des choses. Une deuxième vague est probable, et peut-être d’autres encore tant qu’il n’y aura pas de vaccin. En revanche, l’immunité collective ne pourra pas être atteinte naturellement sans faire beaucoup, beaucoup, de victimes. En Europe, seuls 3 pays l’ont tenté : les Pays-Bas (qui ont rétropédalé très vite), le Royaume-Uni (qui a changé de stratégie en cours de route et paye encore très cher cette première erreur en étant le 3ème pays le plus endeuillé au monde actuellement) et la Suède (qui n'a toujours pas terminé sa première vague et compte 4 fois plus de morts environ à population égale que ses voisins scandinaves).


DECOUVERTE DE LA SEMAINE

Des premières données sont enfin disponibles sur l’évaluation croisée de deux candidats vaccins les plus scrutés actuellement : le chinois de Cansino Biologics et le chouchou des experts de Oxford et AstraZeneca.
Commençons par les bonnes nouvelles : les deux candidats montrent de faibles effets secondaires. Fièvre, fatigue passagère, douleur au point d’injection, rien que du très habituel pour les deux préparations. Autre bon point, les deux candidats génèrent la production d’anticorps chez la plupart des sujets testés : à hauteur de 90% chez les britanniques et 85% chez les chinois.
Quelques problèmes restent à résoudre. Tout d’abord, on ignore à l’heure si la production d’anticorps est suffisante pour déclencher l’immunité : si elle en est un fort indice, elle n’en est pas la preuve absolue pour autant. Autre sujet, si les deux vaccins se basent sur la modification d’un adénovirus pour construire la base de leur effet, celui de Cansino a privilégié un adénovirus déjà en circulation chez l’espèce humaine. Il existe donc un risque d’erreur de cible (que le système immunitaire ne développe pas les anticorps contre le bon virus), qui doit être investigué lors de la nouvelle étude en cours.
Enfin, la mauvaise nouvelle qui plombe le candidat de Cansino (et explique sans doute pourquoi les experts penchent pour le vaccin britannique) : il génèrerait une immunité plus faible dans la tranche d’âge des plus de 55 ans. Soit plus ou moins la tranche d’âge la plus vulnérable. Si, sans conteste, un vaccin est mieux que pas, et qu’il doit être possible de faire jouer l’immunité de groupe pour protéger le groupe cible, il n’en demeure pas moins que c’est un poids dont Cansino va devoir se débarrasser s’il veut être en mesure de mettre un terme à l’épidémie.


PISTES DE LA SEMAINE

*Aéroportage : le virus présent dans l’air expiré en suspension aurait le pouvoir de contaminer des personnes saines, et ce même si le malade est parti de la pièce depuis plusieurs heures. Une étude des Drs. Santarpi et Herrera et leur équipe de l’université du Nebraska est parvenu à faire se reproduire des virus prélevés dans l’air de la chambre d’un patient en l’absence de celui-ci. Une étude importante (à l’ire ici : https://www.medrxiv.org/content/10.1101 ... -XxRnbeZ2U) qui doit inciter à encore plus de prudence et appuie l’intérêt du masque pour les personnes contaminées.
*Interféron : un essai clinique randomisé sur 101 patients, réalisé par Synairgen en partenariat avec l’université de Southampton a montré qu’un traitement expérimental, baptisé SNG001, à base d’interféron bêta inhalé, pouvait prévenir les complications du Covid. Il ferait ainsi chuter de 79% le risque de développer une forme grave de la maladie (lire ici le communiqué de l’université sur l’essai, un second bras est toujours en cours : https://www.uhs.nhs.uk/ClinicalResearch ... IvvzwmQa2A). L’essai doit toutefois encore être confirmé, son échantillon étant encore relativement faible.


IMPASSES DE LA SEMAINE

*Hydroxychloroquine : si la controverse à son sujet est retombée en France, elle bat son plein au Brésil où le président J. Bolsonaro, qui en est un fervent défenseur, vient d’être contredit par une étude réalisée sur 667 patients au sein de 55 hôpitaux brésiliens. Publiée dans le New England Journal of Medicine (disponible ici : https://www.nejm.org/doi/full/10.1056/N ... SHBSOPUBtk), elle a montré que, avec ou sans ajout d’Azythromycine, qu’il s’agisse de traiter les formes légères ou modérées (les formes graves n'ont pas été testées compte tenu des résultats déjà obtenus ailleurs dans le monde), l’hydroxychloroquine ne fait pas mieux que les soins standards. Plus grave, une augmentation des complications, principalement cardiaques et hépatiques, a été observée.
*Tabac : suite aux investigations menées sur le lien entre fumeur et Covid, il apparait que les fumeurs sont bel et bien à risque de développer des formes plus graves de la maladie (30% de formes graves chez les fumeurs contre 17.6% chez les non-fumeurs, étude ici : https://academic.oup.com/ntr/article/do ... 6oc4eD9RrI), mais également plus à risque de développer la maladie tout court (32% chez les fumeurs contre 16% chez les non-fumeurs, au moins, des facteurs de confusion devant encore être exclus, ici : https://www.ucsf.edu/news/2020/07/41808 ... nxoFx5oA6g)


MAUVAISES NOUVELLES DE LA SEMAINE

*Mayenne : la situation dégénère dans la zone qui passe en « vulnérabilité » élevée. Les experts l’attribuent à un relâchement des mesures barrières, arguant qu’il serait possible de perdre « tous les bénéfices du confinement » (Pr. Delfraissy) si les comportements ne changent pas rapidement, en Mayenne comme partout ailleurs en France.
*Afrique : l’épidémie progresse sur le continent. S’il est difficile d’avoir des chiffres fiables, le suivi de l’Afrique du Sud offre un aperçu édifiant : avec une augmentation de 60% des décès « naturels » par rapport à la normale, le pays, qui affiche tout de même plus de 6.000 morts pour près d’un demi-million de cas, montre que les chiffres officiels sont visiblement très sous-évalués, et qu’il est très probable qu’il en soit de même sur une grande partie du continent.
*Vaccin : un français sur trois refusera le vaccin contre le Covid lorsqu’il sera mis au point, en particulier s’il est d’extrême gauche ou d’extrême droite. Ce chiffre alarmant a été obtenu suite à un sondage les 23 et 24 juillet. Il arrive même à surprendre le sociologue et spécialiste du sujet J. Ward (interviewé ici : https://www.huffingtonpost.fr/entry/le- ... arce-pBr3A) pour qui les Français, premiers au monde en matière de défiance vaccinale dans les pays industrialisés, a une tradition importante de politisation des questions médicales.


BONNES NOUVELLES DE LA SEMAINE

*USA : D. Trump se décide enfin à faire volte-face sur les sujets liés à l’épidémie. Toujours dans le déni quant à la gestion catastrophique de la crise, il a néanmoins reconnu publiquement la gravité de la maladie et l’importance du masque. Un soutien tardif mais bienvenu alors que le pays a dépassé les 4 millions de cas pour près de 150.000 morts.
*Clusters : les investigations sur les nouveaux foyers en France révèlent que 8 sur 10 d’entre eux sont liés aux regroupements familiaux. Une bonne nouvelle alors que les mouvements de touristes faisaient craindre des contaminations extérieures aux départements touchés, une bonne nouvelle pour les travailleurs obligés de prendre les transports, ainsi que pour les différents lieux recevant du public. Les clusters familiaux étant plus facile à tracer que les autres types de contaminations, il s’agit également d’une nouvelle encourageante pour les tentatives de garder l’épidémie sous contrôle.


« QU’EST-CE QUE PUTAIN DE QUOI ? »

On le sait, la Suède est particulièrement touchée et commence même à reconnaître des erreurs dans la gestion de la crise. Ainsi, pour les touristes, il est important de bien respecter la distanciation sociale et les mesures barrières lorsqu’on est sur place.
Afin de s’en assurer, la ville de Visby, sur la petite île de Gotland, très visitée pour son héritage médiéval et ses vestiges fortifiés, a décidé d’opter pour une méthode, peu conventionnelle, mais efficace et surtout thématique. Tout au long de l’été, c’est une patrouille à cheval qui sera en charge d’imposer aux touristes le respect des consignes sanitaires. En armure et armés. Si un chevalier scandinave ne peut pas vous convaincre de porter un masque, vous êtes une cause perdue.


POINT METHODE DE LA SEMAINE : l’argument d’autorité

On en a beaucoup parlé, on l’a beaucoup brandi de part et d’autre, il est temps de nous pencher sur l’argument d’autorité.
Il se décline de deux façons :
*L’expert hors de son domaine : il s’agit de présenter quelqu’un comme étant un « expert » (chercheur, médecin) ou parfois simplement une figure d’autorité (policier, ministre) pour faire croire qu’il sait ce qu’il dit alors qu’il est hors de son domaine de compétence. Concrètement, un pharmacien ne saura pas vous dire si un virus est affaibli en été, il n’est pas virologue ; un cancérologue ne saura pas vous dire si un vaccin est dangereux, il n’est pas immunologiste. Vous ne vous feriez pas opérer du cœur par votre médecin de famille, vous ne devez pas croire quelqu’un sous prétexte qu’il fait figure d’autorité. Pour déjouer ce premier palier, on peut jouer à « qui est le spécialiste » comme le fait très bien Dari de la chaîne Temps Mort : si on vous présente un expert, demandez-vous de quoi il est expert avant d’accepter son avis.
*L’expert hors-sol : il s’agit d’un cas triste, mais malheureusement assez connu (ça porte même un nom spécifique si vous êtes curieux, la nobélite, une forme particulière d’ultracrepidarianisme : https://fr.wikipedia.org/wiki/Maladie_d ... CrJ4ASH18s), où un expert d’un domaine part en roue libre dans celui-ci. Le cas le plus célèbre en France et celui de Luc Montagnier (je vous mets sa fiche Psiram ici : https://www.psiram.com/fr/index.php/Luc ... XJyaj0G3p8), prix Nobel pour la découverte du VIH, qu’il prétend désormais soigner avec des pilules de porridge, entre autres excentricités. Pour déjouer ce second palier, il importe (cf le point de la semaine dernière) de croiser les dires de l’expert avec le consensus scientifique actuel sur le sujet. S’il n’y a pas de consensus, ou si des preuves ambiguës existent, la parole de cet expert peut être intéressante et crédible, même farfelue (après tout, soigner les otites avec des trucs qui poussent sur le roquefort, c’était farfelu aussi). Si le consensus est clairement en défaveur de l’avis de l’expert, pire, si celui-ci est directement décrié par nombre de ses pairs, alors il vaut mieux admettre qu’il est probablement hors-sol, même s’il a publié beaucoup, même s’il est chef de clinique ou directeur de recherche, même s’il a reçu un prix Nobel.


En espérant avoir pu apporter un peu de lumière dans le chaos ambiant.

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août 2020 02 20:14

Re: Point COVID de la semaine

Message par leon macnoussi

#2

Aujourd'hui, c'est dimanche. Voici des infos de Dendrobate Doctor et nous sommes ensemble pour faire l'état de la recherche sur l'épidémie de Covid-19.

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FAKE DE LA SEMAINE

Il ne se passe pas une semaine sans qu’on parle d’un remède miracle au Covid passé sous silence par les autorités, sources boiteuses à l’appui et délicat fumeux de complot en rhétorique. Mais le cas de cette semaine est plus sérieux et il m’a semblé intéressant de revenir dessus.
Depuis quelques temps, un groupe appelé RADVAC distribue un « kit de vaccin Covid-19 ». Qu’entend-on par « kit » ? Et bien qu’il s’agit d’un vaccin à monter soit même, les ingrédients arrivant par la poste devant être transformés (chauffés, filtrés etc.), mélangés et auto-administrés par l’utilisateur. Le but avoué de ce processus est de passé sous le radar de la FDA (l’organisme de régulation américain) qui n’est techniquement pas compétent pour réguler les mélanges faits soi-même, seulement les produits préfabriqués. Le « vaccin » n’ayant obtenu aucune accréditation de cet organisme, aucun aval d’un comité d’éthique et n’ayant pas fait l’objet d’étude clinique sur son efficacité ou son innocuité, on comprend pourquoi. Et cela ne présage rien de bon.
Commençons par le début : qui est RADVAC ? Un assemblage hétéroclite d’une grosse vingtaine de véritables chercheurs, de « technologues » (quoi que cela veuille dire, c’est ainsi qu’ils se présentent) et de « passionnés de science ». Leur but est de proposer un vaccin qui agisse comme une « protection supplémentaire » et, si leur démarche peut paraitre assez aberrante, on peut leur accorder le crédit de ne tenir aucun propos antivax, anti-masque ou complotiste, c’est déjà ça.
Le « vaccin » en lui-même, maintenant. C’est un assemblage de peptides, des protéines de surface du virus, les « clés » qu’il utilise pour s’infiltrer dans les cellules. En théorie, ils devraient pouvoir être reconnus par le corps et conférer une protection, mais à l’heure actuelle, il n’existe pas de preuve que les peptides courts (ceux utilisés ici) génèrent d’immunité contre quoi ce soit, le choix de cette « clé » est donc hasardeux. Comme adjuvant principal, le vaccin contient du chitosane, une protéine présente dans les coquilles de crevettes, qui servirait ici à enrober les peptides pour assurer une meilleure délivrance et éviter qu’ils se fassent directement annihiler par la flore protectrice du nez. Car autre particularité, le vaccin est délivré par voie nasale, dans l’idée de placer le vaccin là où l’infection commence. Le problème majeur que cette idée rencontre, c’est que aucun vaccin basé simultanément sur les peptides (même long) ET la voie nasale n’a jamais montré une quelconque efficacité.
Du coup, quelle preuve a RADVAC que ça marche ? Pas les études, déjà, puisqu’ils ont admis qu’il leur fallait peut-être lancer un essai clinique. Il n’en existe donc pas encore. Pas les retours des utilisateurs non plus, puisque, sur 70 kit livrés, aucun outil de suivi n’a été mis en place pour savoir combien de personnes ont effectivement pris le produit, si des effets secondaires ont été constatés, ou si les personnes sont ou non tombées malades.
Qui des effets secondaires alors ? RADVAC se dédouane de toute responsabilité puisque toute personne accédant au site doit « reconnaître et accepter que toute utilisation de ces informations pour développer et autoadministré une substance est un acte d’auto-expérimentation » et que le livre blanc contenant la recette possède une clause de non-responsabilité stipulant que « toute personne utilisant ces informations doit être un adulte consentant, basé aux États-Unis, qui accepte de prendre l’entière responsabilité de l’utilisation de ces informations, du vaccin et du matériel requis pour la production et l’administration de ce dernier ». Les experts quant à eux craignent un risque de ADE, une réaction rare mais grave, déjà observée chez l’animal lors des essais cliniques de certains vaccins contre le Sars-Cov 1 et le Sars-Cov 2, qui rend le corps plus vulnérable à la maladie avant qu’après l’administration.
On ne le dira jamais assez, la recherche, la vraie, prend du temps. Si quelqu’un vous propose un remède miracle alors que les chercheurs du monde s’arrachent les cheveux sur le problème, ça doit toujours sembler louche. La FDA a annoncé étudié les possibilités de poursuite contre RADVAC pour essai clinique illégal.


DECOUVERTE DE LA SEMAINE

Pas de découverte majeure cette semaine (et oui, la recherche, ça prend du temps).


PISTES DE LA SEMAINE

*Anticorps : immunité, si elle fonctionne par le biais d’anticorps, ne durerait pas plus de 3 mois. C’est ce que montre une étude publiée dans le New England Journal of Medicine (disponible ici : https://www.nejm.org/doi/10.1056/NEJMc2 ... x1mf-_Fa4c), montrant que la chute du taux d’anticorps est rapide et brutale passée ce délai. Des résultats qui indique clairement que le taux d’anticorps n’est pas une bonne mesure de l’immunité, information cruciale tandis que la course au vaccin bat son plein.
*Immunité : l’immunité, ça n’est pas que les anticorps. Beaucoup de cellules immunitaires sont impliquées et il est possible de baser un vaccin sur elles (on l’a déjà fait, notamment pour le BCG). Une étude de la Duke-NUS Medical School, publiée dans Nature (disponible ici : https://www.nature.com/articles/s41586- ... WtzZ2QaOfI) montre que les patients infectés produisent en grand nombre des lymphocytes-T spécifiques, une réponse immunitaire durable. Plus surprenant (et réjouissant) encore, l’étude montre que la moitié des patients contrôle (n’ayant jamais rencontré le virus) possèdent également des lymphocytes compétents, dus probablement aux rencontres avec d’autres coronavirus, suffisamment proche pour que les cellules immunitaires fassent le lien. Etant faite sur un petit nombre de sujet, ‘étude doit toutefois encore être répliquée.


IMPASSES DE LA SEMAINE

*Dépistage massif : l’arrivée d’une plus grande capacité de tests et de leur démocratisation ne donne pas les résultats escomptés. Inquiets, les gens se font dépister à tout va, retardant la prise en charge des patients paucisymptomatiques et des cas contacts. Face à l’impossibilité de se servir de la stratégie des tests pour remonter les chaines de contaminations, les régions les plus touchées prévoit de rendre purement et simplement le port du masque obligatoire. C’est bien sûr le cas en Mayenne, pour laquelle un risque de reconfinement augmente de jour en jour (Source : Santé Publique France et l’Insee via l’Ined) mais également pour la ville de Lille, la région Nord étant très touchée (Source : Mairie de Lille).
*Gestes barrière : face au relâchement des mesures de protection, les experts sanitaires craignent de perdre le bénéfice du confinement et qu’il faille changer son fusil d’épaule. Certains en viennent même à proposer de « laisser les jeunes se contaminer entre eux » en leur interdisant strictement le contact avec les personnes âgées, dans l’espoir de permettre une immunité plus grande (voir ici l’interview du Dr E. Caumes de la Pitié-Salpêtrière à ce sujet : https://www.leparisien.fr/societe/sante ... fMnBOf-BK4), avec tous les risques que cela comporte : l’immunité n’est pas certaine, comme expliqué dans la section « Pistes de la semaine » et l’infectiologue le reconnait « cela aura des conséquences. Les jeunes peuvent aussi avoir des formes graves… »


MAUVAISES NOUVELLES DE LA SEMAINE

*Mayenne : le département fait désormais partie de la liste rouge des destinations de nombreux pays. La Belgique par exemple a interdit à ses ressortissants de s’y rendre hors « voyage essentiel », et si tel est le cas, une quarantaine et un dépistage leur seront imposés au retour. Un signe de plus de la gravité de l’épidémie sur place.
Source : Ministère Belge des Affaires Etrangères
*Allemagne : 15.000 manifestants selon la police ont défilé contre le port du masque en particulier et les mesures sanitaires en général. Les manifestants ne portant évidement pas de protection et ne respectant pas la distanciation sociale, la police de Berlin a porté plainte contre les organisateurs de l’évènement. Les participants, dont beaucoup scandaient des slogans conspirationnistes ("la plus grande théorie conspirationniste est la pandémie du nouveau coronavirus"), étant affiliés majoritairement aux mouvements antivax, libertariens et néonazis, le nom donné à la manifestation « La fin de la pandémie – Jour de la liberté » passé très mal en Allemagne, ce nom étant en effet le titre d’un film de Leni Riefenstahl, la cinéaste de propagande du régime hitlérien… De fait les manifestants ont rencontré sur leur trajet un certain nombre de contre-manifestants, notamment le groupe des « Grand-mères contre l’extrême-droite ». Et j’avais besoin que le monde sache qu’un tel groupe existe.
Source : Direction de la Police de Berlin


BONNES NOUVELLES DE LA SEMAINE

*Aéroports : le dépistage des voyageurs devient gratuit dans les aéroports, aussi bien pour les volontaires n’étant pas soumis à obligation particulière que pour les voyageurs en provenance des pays de la liste rouge, pour qui le dépistage est obligatoire. Toutefois, la composition de la liste interroge, puisque si les USA, le Brésil ou l’Afrique du Sud y figure sans surprise, l’absence de la Grande-Bretagne pose question.
*Brésil : la désinformation du président et de son entourage commence à fatiguer sérieusement les autorités brésiliennes. Après la demande de blocage intégral des comptes Facebook et Twitter de proches de J. Bolsonaro par le juge de Moraes mi-juillet pour « diffusion de fausse information, diffamation, menaces et apologie de crimes », après la condamnation de Facebook le 30 juillet à l’équivalent de 310.000€ d’amende plus pénalités journalières pour refus d’obtempérer, c’est la Cour Suprême Brésilienne qui a finalement fait plier le géant américain, réduisant au silence 12 comptes ardemment impliqués dans la désinformation.


« QU’EST-CE QUE PUTAIN DE QUOI ? »

Aurait-on négligé de prendre en compte un paramètre avec les enfants ? Une question légitime alors qu’une étude parue dans JAMA Pediatrics (disponible ici : https://jamanetwork.com/journals/jamape ... EmI4SJqNSQ) tend à montrer que les PCR réalisés chez les enfants de moins de 5 ans contiennent 10 à 100 fois plus de virus que les enfants plus âgés et les adultes.
Pourtant, d’autres études ont montré qu’en situation réelle, ces enfants sont très, très faiblement contagieux. Si la question de leur infection se pose (la charge virale n’est pas proportionnelle à la gravité de la maladie), le fond du problème reste tout de même de savoir comment des individus présentant autant de virus dans une cavité en lien avec l’extérieur peuvent être aussi peu transmetteur.
Pour le pédiatre R. Cohen et l’infectiologue A. Fontanet, une donnée a effectivement été oubliée dans l’histoire. Et le fait que des dizaines de bac+Beaucoup ait pu passer à côté de ça est à pleurer de rire. Attention, scoop : les enfants de moins de 5 ans sont… tout petits. Si, si, je vous jure. Ça n’a l’air de rien, mais, dans le cas d’un virus dont la transmission se fait par gouttelettes projetées dans l’heure, devant être respirées à hauteur d’homme et tombant progressivement vers le sol car soumises à la gravité, cette donnée est importante. Déjà faiblement symptomatiques, les enfants de moins de 5 ans éternuent à peu près au niveau de genoux des adultes autour d’eux. Les genoux ne constituant pas une porte d’entrée virale, ils transmettent très peu. Si on ignore toujours pourquoi ils sont si faiblement malades, on peut donc rester rassurés sur le fait qu’ils sont peu contagieux.
Ici, l’interview des deux médecins cités : https://www.franceinter.fr/societe/covi ... UNEqySpW_Y


POINT METHODE DE LA SEMAINE : c’est quoi le complotisme ?

On en parle à toutes les sauces, on l’attribue aux anti-masques, à ceux qui brûlent les antennes 5G, aux antivax et j’en passe et des pires. Mais qu’est-ce qui définit exactement le complotisme ?
Appelé aussi conspirationnisme, le terme est utilisé en premier par Karl Popper, philosophe des sciences, qui désigne par là la croyance selon laquelle un évènement est le produit d’une manipulation par un groupe ou une société secrète servant des intérêts cachés, plutôt que juste le fruit du hasard, ou la conséquence logique de son contexte historique.
Par opposition à une théorie rationnelle, une théorie complotiste se reconnait à son irréfutabilité : les preuves qu’elle est fausse sont systématiquement interprétées comme des fausses preuves, éléments trafiqués par l’entité à l’origine du complot, et qui donc renforce la théorie. Rappelons qu’en science une théorie qui ne peut être réfutée n’est pas recevable.
La théorie du complot est fortement liée avec le mécanisme de la paranoïa : le postulat de départ est faux, et partant de là le raisonnement se déploie de manière extrêmement logique, ce qui rend difficile la contradiction.
Le sociologue P.-H. Taguieff résume ainsi les 4 grands principes de base du conspirationnisme : 1- rien n'arrive par accident (le hasard est exclu de la pensée complotiste) 2- tout ce qui arrive est le résultat d'intentions ou de volontés cachées (des entités manipule le monde pour leurs intérêts et nous ne pouvons les connaître) 3- rien n'est tel qu'il parait être (tout est mensonge et manipulation, aucune institution n’est digne de confiance) 4-tout est lié, mais de façon occulte (il n’est pas possible de connaitre la vérité par les moyens conventionnels).
A noter que les théories du complot ont leurs préférences, et on les retrouve principalement dans les domaines ethniques (la domination par les Juifs, les Noirs, l’Islam etc.), politiques (la domination par un « Novel Ordre Mondial » lié aux Francs-Maçons, à la famille Rockfeller, à l’OMC etc.), ufologiques (la dissimulation des ovnis), médicaux (Big Pharma), ésotériques (la croyance en une forme de contrôle mental, de dérèglement de la « vibration » de la Terre) ou encore technologiques (modification forcée de l’être humain, aliénation par la technologie, mensonges sur des faits scientifiques comme la forme de la Terre ou le fait d’être allé sur la Lune etc.).
Pour plus de détails, je vous laisse avec la fiche Psiram à ce sujet https://www.psiram.com/fr/index.php/Thé ... TKysN7nQTU

En espérant avoir pu apporter un peu de lumière dans le chaos ambiant, on y retourne la semaine prochaine, car l'épidémie ne se termine pas avec l’été. En attendant, prenez soin de vous et des chercheurs qui bossent dur, et, autant que possible, restez chez vous.

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Re: Point COVID de la semaine

Message par leon macnoussi

#3

Aujourd'hui, c'est dimanche. Voici des infos de Dendrobate Doctor et nous sommes ensemble pour faire l'état de la recherche sur l'épidémie de Covid-19.

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FAKE DE LA SEMAINE

Après les études tronquées, les chiffres bidonnés et les rumeurs sorties de nulle part, les anti-masque ont un nouveau tour dans leur sac (c’est le cas de le dire) : la prestidigitation ! On voit en effet de plus en plus de vidéos fleurir où de vaillants résistants découpent sans merci un vil masque en papier pour en sortir une puce électronique de contrôle mental/géolocalisation/émission 5G/perturbation de la fréquence vibratoire de la Terre/[insérez ici votre complot préféré]. On passera sur le fait que, si vous avez si peur que ça que des géants capitalistes glissent des microprocesseurs très chers dans des masques qu’ils vous vendent à 50 centimes, vous pouvez simplement acheter des masques lavables aux couturières du coin et faire tourner l’artisanat local. Je ne saurais que vous conseiller d’acheter massivement des stocks de masques jetables pour revendre les puces à l’intérieur. Et une fois que vous en aurez bousillé 10 sans rien trouver, vous accepterez peut-être de porter les 40 autres…


DECOUVERTE DE LA SEMAINE

Le Saviez-Vous ? Une découverte en science, c’est aussi une découverte négative. Quand on a établi la preuve qu’on s’était planté ou qu’on ne trouve absolument rien sur un sujet, c’est aussi une découverte. Moins spectaculaire, mais une découverte.
Et c’est plus ou moins ce qui se passe actuellement à l’échelle du consensus scientifique en ce qui concerne le « bilan » (entendre ici « bilan jusqu’à obtention d’une preuve très solide pour relancer la machine, parce que là on en a bien soupé donc il faudra vraiment du lourd pour relancer le truc ») de l’hydroxychloroquine.
Un excellent article publié par Futura Science (disponible ici : https://www.futura-sciences.com/sante/a ... ine-80151/) qui résume l’état actuel des connaissances sur le sujet : sur l’humain ou l’animal, sur les individus ou les cellules cultivées, avec ou sans antibiotique associé, donnée en prophylaxie (avant exposition de manière préventive), dès l’infection avant même le début des symptômes, à des patients légers, modérés ou lourds, étudiée par les équipes françaises, américaines, anglaises ou brésiliennes, l’hydroxychloroquine contre le Covid, ça ne marche pas.
Mieux encore, les études de pharmacologie et toxicologie montrent que ça n’aurait jamais marché depuis le départ. Même en se revendiquant de méthodologies alternatives (et, parce que j’aime beaucoup l’interdisciplinarité, l’article a même des philosophes des sciences qui expliquent pourquoi, en se revendiquant de certains philosophes et théoriciens pour aller contre la méthode scientifique canonique, l’IHU de Marseille n’a rien compris aux philosophes qu’ils citent).
Après tout le harcèlement, les menaces, les insultes et la violence que l’attitude de l’IHU de Marseille et de son directeur ont valu pendant des mois à quiconque essayait d’expliquer leurs erreurs au grand public, moi y compris, je laisse le mot de la fin à ce sujet à Axel Khan, médecin, généticien et philosophe des sciences : « directeur de l'un des six IHU français, les perles de la recherche hospitalo-universitaire, doté d'un budget de l'ordre de 120 millions d'euros par an, on attendait de lui de la belle science, robuste, contrôlée. Pas des publications hebdomadaires à grand succès sur YouTube, la mobilisation sur un tel sujet d'un invraisemblable mouvement d'opinion qui restera dans les annales, des articles bâclés dans des revues maison. Ils ont failli, déconsidéré la recherche hospitalo-universitaire française, effroyablement compliqué la recherche clinique dans le monde entier. »


PISTES DE LA SEMAINE

*Formes graves : une protéine appelée la calprotectine, pourrait être un marqueur prédictif des formes graves chez les patients. L’étude, menée à l’hôpital Cochin à Paris et publiée dans Cell (disponible ici : https://www.cell.com/cell/fulltext/S009 ... 20)30993-4) montre que les taux sanguins de cette protéine sont 100 à 1000 fois plus élevés que la normale chez les patients atteints de formes sévères. Reste à savoir si c’est elle qui cause l’aggravation ou si elle en est le marqueur.
*Psychiatrie : les troubles mentaux sont anormalement élevés chez les survivants du Covid, selon une étude centre hospitalier San Raffaele, en Italie (disponible ici : https://www.sciencedirect.com/science/a ... 9120316068). Elle montre que 55% des anciens patients présentent des troubles (42% de troubles anxieux, 40% d’insomnies, 31% de dépression, 28% de PTSD et 20% de TOC) mais qu’il est difficile de faire la part des causes entre le stress de la situation, la stigmatisation des malades ou l’inflammation cérébrale.


IMPASSE DE LA SEMAINE

*Dépistage et suivi des patients : dans de nombreuses zones, l’Ile-de-France en premier lieu, il devient impossible de faire un dépistage PCR qui enraye la chaine de contamination. A l’approche de vacances, le nombre de demandes pour des tests PCR, obligatoire pour prendre l’avion, a explosé en ce qui concerne des patients ni symptomatiques ni cas contacts (parmi les documents permettant d’obtenir le remboursement de la PCR, 30% de ceux présentés aux laboratoires sont des billets d’avions – Source : Réseau Cerballiance). Même avec une ordonnance, les délais s’allongent et la plupart des cas contacts ne se font simplement plus dépister, faute de possibilité ou d’envie de faire 1h30 de transports ou 3h de queue pour trouver une place en centre de prélèvement.


MAUVAISES NOUVELLES DE LA SEMAINE

*France : les chiffres de la réanimation repartent légèrement à la hausse. Si jusqu’ici l’augmentation des cas dépistés n’avait pas d’incidence sur le remplissage des hôpitaux, il semblerait que cette période touche à sa fin…
*Monde : l’épidémie a atteint cette semaine le pallier des 700.000 morts et s’approche des 20 millions de cas dans le monde. La courbe des USA devrait atteindre 5 millions de cas cette semaine, le Brésil et l’Inde sont toujours en feu, l’épidémie se propage en Afrique et la maladie a tué cette année plus que la faim et le paludisme réuni dans le monde. Et on est en juillet. Y a même un joli graphique animé là : https://public.flourish.studio/visualis ... isjB4Wn2L8


BONNE NOUVELLE DE LA SEMAINE

*Monde : nous approchons des 12 millions de guéris. Un chiffre a minima, puisque certains cas dépistés disparaissent des radars sans être hospitalisés ou morts et ne peuvent donc être comptabilisés comme guéris.


« QU’EST-CE QUE PUTAIN DE QUOI ? »

Les USA ne cessent de nous surprendre dans cette crise. Et pas particulièrement en bien.
“Wearing a face mask posses a mental and/or physical risk to me. Under the Americans with Disability Act (ADA), I am not required to disclose my condition to you” [Le port du masque présente un risque mental et/ou physique à mon égard. En vertu de l’ADA (Loi pour les Américains Handicapés), je n’ai pas à vous expliquer quelle est ma condition], avec une vraie faute d’orthographe à « posses » qui s’écrit avec un seul S, c’est le texte que brandissent désormais, sur une carte à l’air très officielle, des milliers d’américains désireux de ne pas porter le masque en public. Les entreprises qui voudraient passer outre se voient menacer de signalement à la Freedom to Breath Agency (Agence pour la Liberté de Respirer).
Les autorités sanitaires ont bien entendu nié avoir un quelconque lien avec cette organisation et rappelé que ces cartes n’avaient aucune valeur légale.
Le site marchant de la Freedom to Breath Agency, où le paquet de 500 de ces cartes était vendu 49.99$, est depuis indisponible. Le groupe se plaint également d’avoir subi de la « censure illégale et anticonstitutionnelle de la part de Facebook » après que le réseau social ait fermé leurs comptes pour « usage contrefait du logo du ministère de la Justice ».


POINT METHODE DE LA SEMAINE : indécision, effets secondaires, marge d’erreur etc. pourquoi nous n’aurons jamais le traitement parfait ?

Un des arguments qu’on entend le plus quand les gens sont contre un traitement/vaccin/solution thérapeutique/pesticide/[insérez ici votre sujet d’engueulade de Noël préféré], c’est « comment peux-tu prouver que c’est 100% sans risque ? ». La réponse est très simple : on ne peut pas. Pour rien. Pas plus pour le futur vaccin contre le Covid que pour le Doliprane, pas plus pour les huiles essentielles de Tatie que pour le grog de Pépé. Et cela pour deux raisons.
La première, c’est que tout ce qui a un effet a forcément un risque. Si c’est 100% sans risque, c’est 100% sans effet (autre que placebo, bien entendu, oui Boiron, c’est toi que je regarde). Un traitement (que ce soit un antibiotique, de l’huile de menthe poivrée ou un vaccin) est donné pour intervenir dans le corps et induire une modification de son fonctionnement, parce que à ce moment-là, on estime que le fonctionnement n’est pas optimal (qu’il s’agisse d’une otite carabinée, d’un début de migraine ou de la possibilité de mourir bêtement dans d’atroces souffrances parce qu’on se sera piqué sur un rosier). En modifiant le fonctionnement du corps, il a TOUJOURS une possibilité que ça parte en vrille quelque part (que ce soit l’antibiorésistance, l’allergie à la menthe ou, au hasard, un ELS bien carabiné).
La seconde, c’est que la méthode scientifique ne permet pas de prouver l’absence de quelque chose (cf l’exemple de la recherche du corbeau blanc que je vous ai déjà sorti dans l’Echo des Labos du 14 juin). On pourra faire tous les tests qu’on veut, on pourra simplement démontrer qu’un traitement est « sûr dans la majorité des cas », « sans effets secondaires graves connus » ou « sûr tant que vous n’êtes pas [insérez liste des personnes pour qui on le contrindique] ». Sa prescription va se baser sur la balance bénéfice/risque : est-ce que je gagne plus que le risque que je prends ? Est-ce que je gagne plus à prendre mon antibiotique qu’à risquer de perdre mon tympan ? Oui, si je respecte bien la prescription et que je ne l’arrête pas dès que je me sens mieux. Est-il plus risqué d’utiliser mon huile ou d’avoir mal à la tête ? Ça dépend des allergies connues et de l’intensité de la douleur. Est-ce que ne pas mourir étouffée dans mes propres sécrétions vaut le coup de se retrouver avec le bras de Popeye pendant 4 jours ? Oh que oui…


En espérant avoir pu apporter un peu de lumière dans le chaos ambiant, on y retourne la semaine prochaine, car l'épidémie ne se termine pas avec l’été. En attendant, prenez soin de vous et des chercheurs qui bossent dur, et, autant que possible, restez chez vous.

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leon macnoussi
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août 2020 16 17:57

Re: Point COVID de la semaine

Message par leon macnoussi

#4

Aujourd'hui, c'est dimanche. Voici des infos de Dendrobate Doctor et nous sommes ensemble pour faire l'état de la recherche sur l'épidémie de Covid-19.

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FAKE DE LA SEMAINE

D’ordinaire, cette section me déprime un peu à écrire, mais aujourd’hui, je suis joie et hilarité, car le fake de cette semaine vient du camp des sceptiques. Plus qu’un fake, c’est une imposture intellectuelle (voir section « Point méthode de la semaine », je vais expliquer plus en détail de quoi il retourne). Petit retour sur l’historique.
Très actif pendant le confinement (vous en avez forcément entendu parler à l’époque), le collectif « Laissons les médecins prescrire » exigeait de pouvoir prescrire l’hydroxychloroquine en usage de ville, sous prétexte qu’ils avaient l’impression en cabinet que ça marchait et qu’ils ne voulaient pas attendre les résultats des essais cliniques. Le mot d’ordre était, en gros, de plus faire confiance aux médecins qu’aux chercheurs. Le monde a continué sa route et l’efficacité de la molécule a été démentie par des études toujours plus solides et nombreuses (cf l’Echo des Labos de la semaine dernière). Sans doute pour ne pas perdre la face et montrer que ça marchait malgré tout, les deux médecins à l’origine du collectif, Violaine Guérin et Martine Wonner, ont publié une étude qui montrait que leur traitement fonctionnait dans Asian Journal of Medicine and Health.
Mais les chercheurs ont vite douté, déjà parce que l’article avait été rejeté avant de plusieurs revues très sérieuses (ce que leurs auteurs ont appelé de la censure), ensuite parce que ce journal semblait être une revue prédatrice, c’est-à-dire un journal qui publierait tout et n’importe quoi tant qu’on le paye. La publication serait donc sans valeur parce que le seul journal ne l’ayant pas rejeté pour défauts de méthode graves est plus une arnaque qu’une revue scientifique. V. Guérin et M. Wonner se sont défendu en disant que la revue était extrêmement sérieuse. Du coup, il y a des sceptiques taquins qui ont voulu tester ça.

Le résultat est à pleurer de rire. Publié hier officiellement (et disponible ici : https://www.journalajmah.com/index.php/ ... qWMVzNpHm0) l’article est une formidable preuve du manque total de sérieux du journal. C’est simple : RIEN ne va. L’étude est annoncée co-financée par le collectif « Laissons les vendeurs de trottinettes prescrire », les instituts de rattachements sont aussi absurdes que « Belgian Institute of Technology and Education (BITE) » ou « Institute for Quick and Dirty Science » (Institut pour la science vite faite mal faite), les villes de rattachement sont Ankh Morpork ou Neuneuchâtel, le papier prétend prouver que l’hydroxychloroquine en prophylaxie protège contre la mort par accident de trottinettes, les références piochent dans Youtube et Picsou Magasine, les sources indiquent des papiers intitulés « I love the smell of hydroxychloroquine in the morning. » ou « Parachute use to prevent death and major trauma when jumping from aircraft: randomized controlled trial. » (Usage du parachute pour prévenir la mort et les traumatismes majeurs en sautant d’un avion : essai contrôlé et randomisé), l’article indique « soupe » dans ses mots-clés, les auteurs racontent avoir essayé de profaner des tombes parce qu’ils avaient oublié de faire certaines mesures sur les gens qui étaient morts et il y a Nemo Macron, le chien présidentiel, en co-auteur.
Tout ceci est une infime part de ce que les auteurs ont réussi à faire publier (je vous laisse ici le billet de blog racontant le processus de création et de review de l’article, c’est un modèle du genre : http://www.mimiryudo.com/blog/2020/08/l ... pn48aNkGLA), démontrant ainsi l’absence totale de sérieux de cette revue. Une énième déception pour les partisans de l’hydroxychloroquine, mais un fou rire bien venu en ces temps troublés.


DECOUVERTE DE LA SEMAINE

Pas de découverte majeure cette semaine, l’annonce du vaccin russe laissant les chercheurs plus que dubitatifs (voir section « Impasses de la semaine »).


PISTE DE LA SEMAINE

*Symptômes : une étude publiée dans Frontiers in Public Health (disponible ici : https://www.frontiersin.org/articles/10 ... vI5tNHCjLQ) a établi l’ordre d’apparition des symptômes du Covid, afin d’aider au diagnostic différentiel et à une prise en charge plus rapide. La fièvre apparaîtrait en premier, suivie de la toux, viendraient ensuite les douleurs à la gorge, à la tête et aux muscles, puis les nausées et vomissements, et en dernier la diarrhée. Cet ordre serait le même indépendamment de la gravité de la maladie, en revanche tous les patients ne développent pas l’intégralité des symptômes.


IMPASSES DE LA SEMAINE

*Vaccin : l’annonce par la Russie d’un vaccin opérationnelle se révèle être une sérieuse déception. L’OMS et les chercheurs de par le monde confirment n’avoir reçu aucune donnée appuyant l’efficacité ou l’innocuité du vaccin. De plus, une analyse des rares documents russes révèle que le vaccin dont il est question n’est pas prêt, comme annoncé, mais en phase 3 des essais cliniques, comme d’autres à travers le monde.
Source : OMS
*Dépistage : alors que le besoin se fait de plus en plus pressant avec le passage des deux plus grandes villes françaises en zone de circulation active du virus (voir section « Mauvaise nouvelle de la semaine »), il devient de plus en plus difficile d’avoir accès aux tests PCR. Pour Paris, il est désormais quasiment impossible d’avoir un RDV dans le temps imparti à moins d’un désistement, et les laboratoires sans rendez-vous voient des files d’attente de plus de 3h.
Source : Réseau Cerballiance


MAUVAISES NOUVELLES DE LA SEMAINE

*2eme vague : l’incidence du virus en France est désormais bien supérieure, même en prenant en compte la plus grande disponibilité des tests, à ce qu’elle était en mars lors de la décision de confiner le pays. Deux zones sont particulièrement touchées : les Bouches-du-Rhône, en particulier la ville de Marseille, deuxième plus grande ville du pays, et Paris. Pour ce deuxième cas, les chiffres sont toutefois à prendre avec précaution : alors qu’un taux de reproduction de 75 cas pour 100.000 habitants était initialement annoncé, ce chiffre tombe à 46.2 lorsqu’on décide de compter à part les cas positifs de Orly et Roissy, attribués par défaut à Paris (Marseille n’est pas concerné par cette anomalie, un seul cas positif ayant pour l’instant été dépisté à Marignane). Plus encore, les cas positifs étant identifiés par leur numéro de sécurité sociale et donc étant comptés sur leur lieu de résidence, un fort pourcentage de cas comptés à Paris concerne en réalité des Parisiens en vacances et donc malades hors du département (Santé Publique France estime ce pourcentage à 18%), le taux d’incidence réel pourrait donc être de 37 ou 38 pour 100.000. Marseille et les Bouches-du-Rhône ne semblent pas affectés par ce type d’anomalie et conservent donc leur taux de 47 pour 100.000. Dans tous les cas, les deux départements restent proches du seuil d’alerte (50 pour 100.000) et très au-dessus du seuil de vigilance (10 pour 100.000). La Seine-Saint-Denis, l’Essonne, le Var, les Alpes-Maritimes, la Haute-Garonne, les Hauts-de-Seine et le Val-de-Marne les suivent de très près.
Source : Santé Publique France


BONNE NOUVELLE DE LA SEMAINE

*Grippe : histoire de ne pas ajouter un fléau à un autre, l’industrie pharmaceutique se prépare à une demande accrue de vaccin contre la grippe pour la saison hivernale 2020-2021 et les fabricants ont produit un nombre record de doses pour faire face. Le but avoué est à la fois de soulager les hôpitaux en limitant le nombre de cas de grippe alors qu’un rebond épidémique du Covid sera sans doute à gérer et à la fois de libérer les chaines de production au cas où il faudrait lancé la fabrication d’un vaccin contre le Sars-Cov-2.


« QU’EST-CE QUE PUTAIN DE QUOI ? »

L’ARS a (enfin, sachant que les premiers signalements datent d’avril) suspendu pour 5 mois, le temps que le procureur saisi décide des suites à donner, Eve Engerer, médecin généraliste alsacienne, pour avoir rédiger des certificats médicaux contrindiquant le port du masque. En plus de l’absence totale de valeur d’un tel document, la médecin ne voyait même jamais les patients en question, puisque son certificat était laissé en blanc librement sur Internet.
Si ce n’était déjà assez aberrant, elle explique son geste par le fait que pour elle « les masques sont un mensonge, comme les vaccins », et qu’ils ne servent à rien car elle a pu soigner dans son cabinet des patients Covid avec « des vitamines, des plantes, des huiles essentielles et de l’hypnose humaniste ».
Pour continuer sur cette lancée, les premiers signalements en avril émanait du président de l’Ordre des Médecins du Bas-Rhin, qui s’insurgeait que sa consœur distribue des ordonnances avec « des chiffres à lire et à répéter pour se protéger du coronavirus ». Il avait été alerté par un pharmacien du secteur, qui avait relevé des mentions étranges sur d’autres ordonnances de la généraliste comme « se rapprocher de la nature » ou « prier ».
Celle qui se présente comme « médecin de la conscience, naturopathe et homéopathe » risque la radiation et l’interdiction d’exercer la médecine. Cela ne semble pas affecter outre mesure (« Radiée ou pas radiée, cela importe peu, d'autres l'ont été avant moi... Moi je m'irradie de soleil, je respire la lumière. J'ai prêté serment devant Dieu et devant Hippocrate, pas devant Bill Gates et Big Pharma. ») celle dont la page Facebook, très suivie par les anti-masques, regorge de propos complotistes sur le patron de Microsoft ou les Illuminati…
L’Ordre du département a annoncé avoir reçu de nombreux signalements de patients et pharmaciens sur une dizaine de médecins incitant leur patientèle à s’opposer au port du masque, il ne s’agirait donc pas d’un cas isolé.
Source : Ordre des Médecins du Bas-Rhin, ARS Grand Est


POINT METHODE DE LA SEMAINE : les impostures intellectuelles et la protection de la rigueur dans la recherche, « qui garde les gardes ? »

Une imposture intellectuelle est un canular scientifique à but pédagogique. Il s’agit de montrer que la revue visée, le champ de recherche se basant sur ses publications ou les auteurs aux commandes ne sont pas sérieux dans leur démarche scientifique. Le concept est vraiment né avec ce qui a été appelé « l’Affaire Sokal » (je vous mets ici une très bonne vidéo à ce sujet :




Alain Sokal est un physicien et épistémologue (la science de comment acquérir une connaissance qui soit solide et valide) qui, en 1996, en a eu assez de voir le vocabulaire scientifique (en particulier physique et quantique) utilisé n’importe comment par un courant de sciences sociales appelé le postmodernisme. Il soumet ainsi un texte complètement abscons et volontairement erroné, avec une bibliographie démesurée de 14 pages (ma bibliographie de thèse fait cette taille-là, et c’est un volume de 400 pages, c’est vous dire), à la revue Social Text, qui est chef de file des études culturelles postmodernes (ce n’est donc pas une obscure revue, c’est LA référence). Sokal défini ainsi son canular comme « un article généreusement assaisonné de non-sens qui (a) sonne bien et (b) flatte les préconceptions idéologiques des éditeurs ». Il est accepté et publié, et Sokal révèle la supercherie le jour même de la publication.

Grâce à ce travail, les journaux scientifiques ont considérablement augmenté l’importance de la revue par les pairs et le poids de leur comité de lecture, parce que personne ne voudrait que ça se reproduise chez lui. Devoir rétracter un article parce qu’il y a des erreurs ou des problèmes, oui (et ça fait partie du processus normal de la recherche) mais devoir le faire parce qu’on a publié n’importe quoi sans regarder ou parce que ça nous arrangeait idéologiquement, c’est un désastre. Les impostures intellectuelles sont un bon moyen de mettre de l’ordre dans la rigueur de la recherche.

Le cas s’est reproduit à de rares occasions, à chaque fois pour alerter soit sur le manque de sérieux d’un journal (et donc de tout ce qui n’arrive à être publié que chez lui, cf la section « Fake de la semaine ») soit sur la dérive idéologique d’un courant ou d’un domaine de recherche. Ce dernier cas de figure s’est produit en 2018, au cour du Grievance Studies Hoax (le canular des études victimaires), lorsque 3 chercheurs américains ont produit une vingtaine d’études absurdes sur le modèle de celle de Sokal, afin de mettre en lumière une « corruption de la recherche et du savoir académiques dans le champs des sciences sociales ». Au final, 4 des études étaient publiées, 3 acceptées pour publication, 7 en cours de revue et 6 rejetées quand les auteurs décident de révéler la supercherie, après que l’enquête d’un journaliste révèle que les noms donnés aux auteurs des papiers sont fictifs. Parmi les papiers acceptés on trouve des propos tels que « une nouvelle catégorie de bodybuilding pour obèses devrait être créée afin que ce sport cesse d'être oppressif envers les gros, encourager les hommes à utiliser des sex-toys anaux permettrait de lutter contre l'homophobie et la transphobie, les étudiants blancs devraient assister aux cours par terre et enchaînés, l'astronomie serait une science « intrinsèquement sexiste »... Un des papiers […] est une recopie d'un chapitre de Mein Kampf dont certains mots ont été remplacés par des termes propres au vocabulaire féministe ».
Menacés, pour l’un d’entre eux de renvoi, les auteurs ont reçu le soutien d’un grand nombre de chercheurs, dont Sokal lui-même, pour qui ce type de démarche reste nécessaire pour protéger la recherche des dérives idéologiques.
L’intégralité des papiers et de la démarche est disponible ici : https://areomagazine.com/2018/10/02/aca ... osiSAV9ZsA


En espérant avoir pu apporter un peu de lumière dans le chaos ambiant, on y retourne la semaine prochaine, car l'épidémie ne se termine pas avec l’été. En attendant, prenez soin de vous et des chercheurs qui bossent dur, et, autant que possible, restez chez vous.

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août 2020 23 18:54

Re: Point COVID de la semaine

Message par leon macnoussi

#5

Aujourd'hui, c'est dimanche. Voici des infos de Dendrobate Doctor et nous sommes ensemble pour faire l'état de la recherche sur l'épidémie de Covid-19.

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FAKE DE LA SEMAINE
Un point un peu spécial cette semaine, il ne s’agit pas de présenter un fake, mais de parler de l’impact des fakes sur l’épidémie et sa gestion. Si vous suivez cet Echo des Labos depuis le début, vous savez que depuis le confinement, nous avons vu passer ensemble des choses allant du canular potache au scandale d’état. Il y a eu beaucoup de choses différentes donc, et elles ont rencontrer un très large public.
Une enquête menée par l’ONG Avaaz, impliquée dans le militantisme en ligne, s’est focalisé plus particulièrement sur les fakes diffusés via Facebook et ayant atteint 5 pays : les USA, le UK, l’Allemagne, l’Italie et la France. On est donc sur quelque chose de déjà large mais qui ne représente toutefois qu’une petite partie de ce qui a été en circulation. Et le constat est alarmant.
Sur les 12 derniers mois, les fausses informations ont atteint 3.8 milliards de vues, avec un pic en avril, au moment où l’épidémie est devenue une pandémie. Plus grave encore, les gens sont bien plus enclins à aller lire des fausses informations que des informations sourcées, puisque les 10 principaux sites de désinformations recensés par l’enquête (RealFarmacy, le numéro 1, et les deux français https://www.ovh.com/fr/mail/ et https://lesmoutonsrebelles.com/?fbclid= ... GbP-xxssC8, respectivement 5e et 7e) ont généré 4 fois plus de vues Facebook que les 10 principaux sites relayant des informations sanitaires fiables. De la même manière montre que les 42 pages publiques relayant le plus de désinformation sont suivies par plus de 28 millions de personnes et ont généré à peu près 800 millions de vues sur l’année écoulée. Et l’enquête ne parle ici que des fausses informations ayant concerné l’épidémie (le virus artificiel fabriqué en Chine, le jus de citron pour combattre les symptômes etc.) ou des sujets annexes ayant un impact sur sa gestion (une liste des faux remèdes contre Ebola qui devraient être tentés contre le Covid 19 – 4.5 millions de vues, un hoax affirmant qu’un vaccin anti-polio soutenu par Bill Gates (et il va falloir qu’un jour vous et moi on parle de Bill Gates dans cette section…) avait paralysé un demi-million d’enfants en Inde – 8.4 millions de vues, etc.).
Le but d’Avaaz est avant tout ici de pointer la responsabilité de Facebook dans la diffusion de ces fakes : les algorithmes les mettent plus en avant que les vraies infos car ils sont plus viraux, seuls 16% des posts contenant des fakes analysés pour l’enquête comportaient des encarts de mise en garde. Facebook s’est défendu en disant avoir supprimé 7 millions de posts « pouvant conduire à des dommages imminents » et affiché des mises en garde sur plus de 98 millions de posts de désinformation entre avril et juin. Insuffisant pour Avaaz, qui réclame un changement d’algorithme afin que la désinformation ne soit plus mise en avant pour le clic qu’elle génère, mais déclassée. Point rassurant de l’enquête : si ce déclassement et l’application d’encarts d’alerte étaient appliqués correctement, la désinformation perdrait 80% de ses vues et jusqu’à 50% des croyants actuels cesseraient de lui donner du crédit.
L’enquête est disponible ici : https://secure.avaaz.org/campaign/en/fa ... MKm2f2cdiQ


DECOUVERTE DE LA SEMAINE
Alors que le monde s’acharne encore et toujours à trouver un remède, des chercheurs de l’université Evanston ont trouvé un nouveau point faible du virus, jusqu’ici négligé. Tout tourne autour de la protéine S, une des protéines qui composent le virus et qui a la particularité de fixer le récepteur cellulaire, la « clé » que le virus utilise pour entrer dans les cellules. On comprend pourquoi cette région de la protéine où ce situe la clé est le centre de toutes les attentions.
Mais dans une étude soumise début août et publiée récemment (disponible ici : https://pubs.acs.org/doi/10.1021/acsnan ... XYVZPHlF_0&) les chercheurs de l’Illinois se sont intéressés à une autre région de la protéine S qui, elle, code l’enzyme émise par la « clé » pour fusionner avec la membrane de la cellule. Ils montrent qu’affaiblir cette zone (en la faisant muter par exemple) serait comme donner au virus la bonne clé pour entrer, mais rouillée et incapable de tourner. Plus d’études doivent montrer que réduire cette capacité du virus à infecter les cellules réduirait bel et bien la virulence de la maladie.


PISTES DE LA SEMAINE
*Pédiatrie : pour gérer au mieux le retour à l’école, 7 associations et sociétés savantes de pédiatrie ont émis des recommandations dans une lettre ouverte (disponible ici : https://gpg.sfpediatrie.com/sites/sfce. ... MKm2f2cdiQ). Elles recommandent notamment l’usage des tests salivaires plutôt que PCR pour le dépistage des enfants, mais aussi la vaccination généralisée contre la grippe chez les enfants et contre le rotavirus (gastro-entérite) chez les nourrissons. Le but avoué est d’une part de soulager consultations de ville et hôpitaux et d’autre part de permettre un diagnostic plus facile des éventuels cas de Covid pédiatrique. Les académies rappellent au passage que ce dernier vaccin est fait en routine quand 15 pays européens, dont 6 de nos voisins directs, et qu’il serait peut-être tant que la France revoit sa position sur le sujet…


IMPASSE DE LA SEMAINE
*StopCovid : sous-téléchargée et souffrant de problèmes d’instabilité qui rendent son utilisation anarchique sur certains appareils, l’application n’a permis le signalement que de 72 cas depuis son lancement.
Source : Ministère de la Santé


MAUVAISE NOUVELLE DE LA SEMAINE
*France : l’épidémie continue de remonter de manière inquiétude sur le territoire. La Sarthe vient ainsi de rejoindre le club de moins en moins sélect des départements ayant franchi le seuil d’alerte avec un taux consolidé de 60.7 cas pour 100.000 habitants. En métropole, elle n’est dépassée de manière certaine (Paris souffrant toujours des erreurs de calcul énoncées la semaine dernière) par les Bouches-du-Rhône, qui caracolent en tête 85 cas pour 100.000 habitants. Des vérifications sont en cours en ce qui concerne un possible franchissement du seuil d’alerte par les Alpes-Maritimes (52.7), le Val-de-Marne (53.8) et la Seine-Saint-Denis (50.5) (taux non-consolidés). La palme incontestée revient toutefois à la Guyane, avec près de 104 cas pour 100.000 habitants.


BONNE NOUVELLE DE LA SEMAINE
*Italie : après avoir été le centre de toutes les inquiétudes, et alors que le virus refait surface un peu partout en Europe, l’Italie parvient à éviter la reprise de l’épidémie. Une bonne nouvelle pour ce pays très durement frappé, qu’il doit à des mesures sanitaires strictes (état d’urgence sanitaire prolongé, masque obligatoire dans tous les lieux clos et en extérieur quand la distanciation ne peut être respectée) prises très tôt (dès le 4 avril et prolongées au moins jusqu’au 15 octobre) et lourdement sanctionnées en cas de non-respect (fermeture des établissements en cas de non-port du masque par les commerçants ou les clients, de 400€ à 1000€ d’amende selon les régions pour non-respect des gestes barrière).


« QU’EST-CE QUE PUTAIN DE QUOI ? »
Rien ni personne, pas même l’épidémie, ne peut décidément empêcher les Français de boire. Surtout pas les Normands. Ains Raymond Dalaise, de l’Orne, est en attente d’une certification Afnor pour le « Siroteur » un masque qu’il a inventé et qui permet de continuer à picoler tout en respectant les mesures barrière. Le masque, lavable en tissu, est doté d’un œillet à bâche, qui permet de glisser une paille dans s abouche sans devoir se découvrir, tout en garantissant l’étanchéité lorsque la paille n’est pas présente. Si la position des professionnels est encore inconnue au sujet de l’objet, on ne peut qu’admirer l’inventivité dont certains font preuve dans des circonstances difficiles, pour peu qu’ils soient assez motivés.


POINT METHODE DE LA SEMAINE : la charge de la preuve et la charge des sources
Souvenez-vous, il y a quelques semaines on discutait charge de la preuve et corbeau blanc.
Pour ceux qui dormaient dans le fond, je fais un rapide rappel :
-la charge de la preuve, c’est qu’il incombe à celui qui affirme une chose (il existe des corbeaux blancs) de la prouver (en trouvant un corbeau blanc, par exemple)
-lorsque celui-ci demande à son interlocuteur de prouver le contraire de ce que lui avance (prouve-moi donc que les corbeaux blancs n’existent pas) ça s’appelle l’inversion de la charge de la preuve, et c’est mal, parce que c’est impossible (si on ne trouve pas, il sera toujours possible de dire qu’on n’a pas assez bien cherché, ou pas au bon endroit, ou pas de la bonne façon etc.)
La charge de la preuve à un corollaire : la charge des sources. Si vous affirmer quelque chose, c’est à vous de le prouver ET de fournir les sources de la preuve. Un élément de langage récurrent dans les milieux complotistes c’est « moi je sais ça, faites vos propres recherches, vous verrez bien ». Non. Jamais. Celui qui affirme doit prouver, et prouver avec du concret, ce qui est affirmé sans preuve peut être rejeté sans preuve. Si quelqu’un vous affirme une chose et vous dit d’aller chercher par vous-même, passez votre chemin : s’il avait une vraie preuve il vous la donnerait et vous avez autre chose à faire de votre vie que faire des recherches sur des bêtises juste pour satisfaire l’ego d’un mec qui a la flemme de faire un copier-coller d’un truc qu’il trouve en tapant deux mots-clés dans Google.

En espérant avoir pu apporter un peu de lumière dans le chaos ambiant, on y retourne la semaine prochaine, car l'épidémie ne se termine pas avec l’été. En attendant, prenez soin de vous et des chercheurs qui bossent dur, et, autant que possible, restez chez vous.

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leon macnoussi
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août 2020 30 17:51

Re: Point COVID de la semaine

Message par leon macnoussi

#6

Aujourd'hui, c'est dimanche. Voici des infos de Dendrobate Doctor et nous sommes ensemble pour faire l'état de la recherche sur l'épidémie de Covid-19.

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FAKE DE LA SEMAINE
C’est une vidéo qui a pas mal tourné cette semaine, par Facebook, groupe Whatsapp ou mail (ah les bonnes vieilles chaines de mail, ça nous avait manqué) : les masques et les gestes barrière seraient inefficaces. Si le message a été relayé plein de fois par des illustres inconnus, l’homme dont nous parlons aujourd’hui est plus préoccupant puisqu’il se dit médecin et spécialiste du sujet.
Toutefois, Jérémie Mercier n’est rien de cela, et de fait les propos qu’il tient sont sujets à caution. Certes, il est docteur, mais comme mes collègues historiens ou informaticiens sont docteurs : ils ont un doctorat (en histoire, en informatique etc.), aucune formation médicale. S’il prétend donner des conseils de spécialiste de santé, c’est qu’il est « Coach en santé naturelle » sur la base des compétences acquises lors de son « doctorat en recherches environnementales ». Or, comme le montre le PDF de sa thèse que j’ai retrouvé ici (https://www.jeremie-mercier.com/wp-cont ... 6V1Zg5ZA_M), cela non plus n’est pas vrai, puisque le manuscrit a été présenté pour le diplôme de philosophie. Ça commence à faire beaucoup pour le même, mais voyons dans quoi il se spécialise.
Son cheval de bataille, c’est le décrassage du foie. Et il faut là-dessus être très clair : un foie, ça n’a pas besoin d’être « décrassé », ça n’est pas un joint de culasse. Soit votre foie fonctionne normalement, et c’est tant mieux. Soit il dysfonctionne d’une manière silencieuse et c’est une prise de sang qui vous le dira (et en ce cas, il n’y aura pas besoin de décrasser quoi que ce soit, le foie récupère tout seul, il faudra simplement arrêter de lui envoyer n’importe quoi à la tronche, comme l’alcool, le chocolat ou le paracétamol). Soit votre foie dysfonctionne d’une manière visible et vous êtes aux urgences (et jaune, très jaune), auquel cas les toubibs vous placeront sous assistance lourde le temps que votre foie parvienne à se réparer ou qu’on vous trouve un donneur pour une greffe. C’est tout. Le reste, ce sont des discours New Age pour vous vendre des bouquins, des conférences et des presses à fruits beaucoup trop chers.
Sur le masque, il a le même discours déjà lu et relu et déjà débunké mais dont je fais un très rapide rappel :
* « c’est marqué sur la boite que ça ne protège pas du virus » : oui, parce qu’une protection ne peut être garantie directement avec des masques grand public, et si ce n’était pas marqué, les professionnels de santé pourraient s’en servir en croyant à tort être protégés, ce n’est pas le grand public qui est visé par cette mise en garde.
* « le masque n’empêche pas d’attraper le virus » : non, il empêche de le transmettre, sauf que si on en met à tout le monde et que, du coup, plus personne ne le transmet, plus personne ne l’attrape non plus.
* « le virus est plus petit que les mailles du masque » : et les globules rouges sont plus petits que les pores de la peau, c’est pas pour autant que tout le monde se vide de son sang en permanence. Il y a d’autres facteurs qui jouent, notamment le fait que le virus, pour survivre, doit être protégé par des gouttelettes (qui elles sont plus grosses que les mailles), ou encore la simple électricité statique qui fait que les particules très fines sont attirées par les fibres et se collent dessus comme vos cheveux à votre pull en mohair en hiver
* « tout ça est un complot qui arrange bien des gens » : non la situation actuelle n’arrange personne, avoir des mesures sanitaires drastiques au travail, des chômeurs comme s’il en pleuvaient, des entreprises qui ferment et la pire situation économique depuis la Seconde Guerre Mondiale, ça n’arrange personne. Et comme on fait face dans son cas à un énième complotiste qui fait une fixation malsaine sur Bill Gates, aujourd’hui, on parlera de Bill Gates (voir section « Qu’est-ce que putain de quoi ? »)


DECOUVERTE DE LA SEMAINE
C’est une découverte encore en pointillé cette semaine, mais qui enthousiasme les chercheurs et les médecins. Le CNRS a publié une étude, encore en préprint (et disponible ici : https://www.biorxiv.org/content/10.1101 ... q4kn6DlNu4), réalisée en collaboration avec Sorbonne Université.
Le concept est de crée des « leurres » pour le virus à l’aide de peptides, des sortes de très petites protéines. Si vous vous souvenez de ce que j’avais expliqué sur le système de « clé » que le virus possède pour rentrer dans la cellule, c’est à nouveau cette clé qui est visée. Le peptide rencontre la clé qui le prend pour une entrée de cellule et essaye de se lier avec. La liaison est pensée pour être particulièrement puissante, irréversible, privant le virus de sa « clé », il faut imaginer que pour empêcher le virus de franchir la porte de la cellule, on le bombarde de serrures-leurres enduites de superglue (oui, la vulgarisation de la chimie organique, c’est pas facile, j’ai les images que je peux…). Le virus entrerait donc bien dans le corps, se baladerait dedans mais serait incapable de se reproduire avec les cellules pulmonaires et se contenterait de flotter doucement des les fluides humains jusqu’à ce que mort s’en suive, si jamais on admet qu’un virus est vivant (et je laisse mes collègues se battre à ce sujet).
Les limitations sont les suivantes : on ignore si c’est leurres vont fonctionner sur d’autres cellules que celles des poumons, ce qui permettrait au virus d’infecter d’autres zones de l’organisme (les séquelles comme la perte de l’odorat par exemple seraient donc toujours d’actualité) ; l’usage serait dans un premier temps prophylactique (en prévention, pour des gens encore non-malades mais, par exemple, exposés par leur métier ou en contact avec un malade) et ne permettrait pas encore un usage thérapeutique.
Plus d’essais cliniques sont attendus, dès que la revue par les pairs sera terminée.


PISTES DE LA SEMAINE
*Dépistage : afin d’augmenter les capacités de dépistage et la rapidité des tests, l’Académie de Médecine encourage le recours aux chiens renifleurs, après que les tests de détection du Sars-Cov-2 par des équipes cynophiles spécialisées se soient révélés encourageants.
Source : Académie Nationale de Médecine
*Surmortalité : si depuis le début de l’épidémie, les hommes meurent plus que les femmes, des chercheurs de l’université de Yale pensent avoir compris pourquoi. L’étude, publiée dans Nature (disponible ici : https://www.nature.com/articles/s41586- ... erence.pdf) montre que hommes et femmes réagissent différemment à l’infection, en particulier au niveau de leur production de Lymphocytes T, beaucoup plus importante chez les femmes. Une étude importante qui pourrait aboutir à des thérapies ciblées différentes pour hommes et femmes (renforcement d’immunité chez les uns, régulateur d’immunité chez les autres) et à des politiques vaccinales différentes, notamment en termes de doses administrées.
*Plasma : si le transfert de plasma de patients guéris a montré son innocuité, les résultats curatifs n’ont pas été très concluants. Toutefois, les essais cliniques en cours sur son usage pour immuniser avant infection les personnes fragiles exposés donne des résultats préliminaires encourageants.
Source : Université Johns Hopkins


IMPASSE DE LA SEMAINE
*Hydroxychloroquine : oui, moi aussi j’en ai marre, mais c’est pas ma faute si certains ont fait en sorte de braquer les yeux du monde sur un traitement bancal et que c’est long de débunker tout ça. Après les études observationnelles, les interventionnelles, les contre placebo, les en double-aveugle, la première méta-analyse sur le sujet vient de sortir (je vous renvois à l’Echo des Labos du 19 juillet, section « Point méthode de la semaine » pour un rappel sur pourquoi la méta-analyse est une preuve puissante, et que sur l’échelle de fiabilité du savoir, elle est à 7 sur 8, seulement battue par le consensus scientifique). Et les résultats ne sont pas brillants. Les chercheurs des Universités de Neuchâtel et Lausanne (en Suisse) et de l’Inserm (France) ont compilé les résultats d’une trentaine d’études associant hydroxychloroquine (HCQ) et azythromycine (AZ) face à des groupes contrôle, incluant au total 11.932 patients sous HCQ seule, 8.081 sous HCQ+AZ et 12.930 dans le groupe contrôle. Le résultat est que aucune augmentation ou diminution de la mortalité n’est statistiquement significative quand on regarde l’HCQ seule, en revanche son association avec l’antibiotique AZ montre un risque de mortalité supérieur de 27% à celui du groupe contrôle. L’étude est disponible ici (https://www.clinicalmicrobiologyandinfe ... ctitle0120) et l’interview des membres de l’équipe par France Info (disponible ici : https://www.francetvinfo.fr/sante/malad ... Rm2LB-65fA) est à mon sens éclairante sur les biais qu’ils ont constaté dans les études analysées et comment ils ont été gérés. On va être honnête, plus personne n’est surpris. A part ceux qui ont décidé que, peu importe la preuve qu’on leur présente, ils ne changeront pas d’avis. Et une croyance dont on refuse de démordre peu importe la preuve en face, ça n’est pas de la science, c’est du dogme.


MAUVAISES NOUVELLES DE LA SEMAINE
*Entreprises : avec les retours de vacances, les clusters augmentent en entreprise. Ils constituent désormais 33% des 352 clusters actifs, dont les deux tiers sont considérés comme ayant une « criticité élevée », c’est-à-dire un fort pouvoir de contamination.
Source : Santé Publique France
*France : l’épidémie progresse désormais à nouveau selon un schéma exponentiel. On recense ainsi 26.891 nouveaux cas cette semaine contre 17.095 la semaine précédente, alors qu’il n’y a pas de différence notable dans la fréquence et l’intensité des dépistages entre ces deux périodes.
Source : Santé Publique France


BONNE NOUVELLE DE LA SEMAINE
*Jour du dépassement : pour la première fois, le jour du dépassement a vu sa date reculer au lieu d’avancer. Ce jour symbolique où l’humanité à consommer les ressources produites par la Terre en une année et vit à compter de là « à crédit » est passé du 29 juillet l’année précédente au 22 août cette année, notamment grâce au confinement et au ralentissement de l’activité humaine.


« QU’EST-CE QUE PUTAIN DE QUOI ? »
Bon. Il faut qu’on parle de Bill Gates vous et moi, parce que là ça devient ingérable. Ce qu’on pense du personnage, de sa carrière et de son entreprise est un sujet que je n’aborderai pas aujourd’hui, je voudrais me concentrer sur le fait que l’informaticien est en train de devenir un tel réceptacle à fantasmes malsains que, pour la clarté des débats qui suivront, il faut s’attaquer au sujet.
Déjà pourquoi lui ? Ce n’est pas tant Bill Gates qui pose problème que sa fondation, la Fondation Bill et Melinda Gates (que je vais abréger en FBMG par flemme). La fondation a, entre autres, une activité importante dans la mise en place et le soutien de campagne de vaccination (il y a beaucoup d’autres choses, notamment des programmes d’alphabétisation dont personne ne parle et des inquiétudes légitimes sur certains investissements du fond, mais là n’est pas le sujet) et je pense que c’est vraiment ça qui suscité les foudres. En effet, les études faites sur le sujet (notamment celle d’Antoine Bristielle, de SciencesPo Grenoble), montre des liens étroits entre les anti-masques, les complotistes et les antivaxx (ainsi, 90% des anti-masques étudiés par A. Bristielle pensent que « le ministère de la Santé est de mèche avec l'industrie pharmaceutique pour cacher la réalité sur la nocivité des vaccins »), et, dans les discours qui accusent Bill Gates d’être partie prenante dans la crise du Covid, c’est presque toujours du potentiel vaccin dont il est question.
L’obsession pour l’homme d’affaires a pris une tournure un peu plus stupéfiante lorsque les théories du complot à son sujet ont commencé à être relayé par des membres de la classe politique, par exemple, la députée italienne Sara Cunial, qui a accusé en pleine séance le patron de Microsoft de « crimes contre l’humanité » en Inde, au point que le ministre de la santé indien a dû démentir lui-même. Tour d’horizon, donc, des rumeurs qui ne seront plus acceptées en débat et feront que je me réserve le droit de qualifier les propos de quiconque les utiliserait de « foutaises » (si je suis polie et de bonne humeur).

* « Bill Gates a créé l'Institut Pirbright qui avait un brevet sur le coronavirus avant l’épidémie » : la FBMG a financé cet institut, qui est un centre de recherche en épidémiologie, pour des travaux sur les zoonoses. L’institut ne travaille sur aucun virus animal et le fameux brevet (ici : https://patents.justia.com/patent/10130 ... ptJw5YA8xE) traite d’u autre coronavirus qui donne des bronchites aux volailles (oui, les conspi ont confondu une pandémie mondiale avec des poules qui toussent, tout va bien).
* « Bill Gates a empoisonné des petites en Inde avec un vaccin contre le cancer du col et sept d’entre elles en sont mortes » : la FBMG a financé une ONG locale, appelée PATH, qui a mis sur pied une campagne de vaccination HPV. Sept décès sont survenus, et il y a donc eu enquête pour en connaître la cause (le rapport d’enquête est ici : https://pdfslide.net/reader/f/hpv-vacci ... NpIN7-S5pY) et sur les 7 fillettes décédées, une est tombée dans un puit, une a été mordue par un serpent, deux ont été empoisonnée au phosphore lors de travaux agricoles, une autre encore du paludisme. Les deux seuls cas potentiellement liés à des effets secondaires (fièvre inexpliquée) sont survenu plusieurs mois après le vaccin, qui a été mis hors de cause.
*Variante : « Bill Gates est poursuivi par l’Inde pour avoir injecté ce vaccin » / Variante « En fait ce vaccin était un moyen de stériliser des femmes contre leur consentement et Bill Gates est poursuivi en Inde pour ça » : des irrégularités ont été soulignées dans la campagne de PATH (la FBMG n’a été à aucun moment en cause) liées à des problèmes de consentement éclairées des patientes en raison de problème de dialecte. Le pays a estimé que c’était un simple problème logistique et n’a souhaité poursuivre personne. Le rapport est ici : http://164.100.47.5/newcommittee/report ... ATonvdQlNk
* « Bill Gates a vendu 1.2 milliards de dollars un vaccin contre la polio qui a paralysé un demi-million d’enfants » : celle-là est un peu technique, parce qu’il y a deux problèmes mélangés. Le premier, une étude controversée car méthodologiquement faible qui étudie la survenue d’une maladie ressemblant à la polio et trouvant un surnombre de 491.000 cas par rapport à l’incidence attendue, qui pensent que cela est lié à des surréaction immunitaires et qui préconisent de réduire la fréquence ou la dose des campagnes de vaccination contre la polio. Les conclusions des auteurs sont contestées et je vous laisse un lien pour comprendre pourquoi (https://factuel.afp.com/non-le-vaccin-c ... HQOv6C56IA). Le second, le chiffre de 1.2 milliards, qui est le montant investi (et non reçu) par la FBMG dans des projets de développement en Inde. Ce chiffre englobe des projets variés (vaccination, mais aussi soins néonataux, contraception et accès à l’eau potable) depuis 2003, donc ce n’est pas le montant impliqué dans cette campagne précise.
* « Bill Gates devrait être poursuivi pour crime contre l’humanité, d’ailleurs l’Inde a rompu tout partenariat avec la fondation et la menace en justice » : je cite le ministre de la santé indien lui-même "C’est une affirmation trompeuse et erronée. La Fondation Bill et Melinda Gates continue de coopérer et de soutenir le Ministère de la santé et du bien-être de la famille".
* « Bill Gates va nous implanter des micro-puces avec le vaccin » : hormis la traditionnelle panique de la puce liée au vaccin, on peut peut-être trouver l’origine de celle-là dans le projet de tatouage vaccinal développé par la FBMG pour les pays où il est compliqué de disposer d’un carnet de santé. Comme préciser ici (https://stm.sciencemag.org/content/11/5 ... P0_KQjiMh4), ce système permet de laisser une marque vaccinale, indiquant quel produit a été reçu et quand, de manière à pouvoir être lu par un appareil spécialisé. Il n’est pas lisible par le quidam, ne géolocalise rien ni personne, n’est pas un objet de contrôle mental, et la liste des divagations est longue.

Voilà, si jamais vous entendez tourner en boucle un autre fake sur l’homme qui a quand même permis le développement des ordinateurs que les complotistes utilisent pour l’insulter, faites-moi signe, je verrai si ça peut faire l’objet d’un prochain débunkage.


POINT METHODE DE LA SEMAINE « c’est un vieux médicament » est un vieil argument
Avec la méta-analyse sur l’hydroxychloroquine, on voit ressortir le discours « c’est un vieux médicament/on connait bien ses effets/si vraiment ça n’était pas bon, on ne l’utiliserait plus ». Tout ça, c’est l’appel à l’ancienneté, ou argument ad antiquitatem, qui nous fait préférer les choses anciennes ou les méthodes « parce qu’on a toujours fait comme ça ». Or, s’il est intéressant d’avoir du recul sur des produits, celui-ci ne sert pas à grand-chose quand le problème auquel il s’attaque est, lui, nouveau. La tradition ou l’habitude, ça peut être un bon point de départ, mais si accrocher coûte que coûte est une erreur parfois fatale. En médecin, l’exemple de la saignée est bien connu : quelque chose pratiqué pendant des siècles, qu’on pensait bien comprendre, qu’on croyait bénéfique et dont on ne voyait pas pourquoi changer de méthode. Et si cette attitude nous parait stupide aujourd’hui, rappelons-nous que nous sommes tous sujets à ce biais, simplement, sur d’autres objets.


En espérant avoir pu apporter un peu de lumière dans le chaos ambiant, je rends l'antenne, et on y retourne la semaine prochaine, car l'épidémie ne semble pas vouloir nous lâcher. En attendant, prenez soin de vous et des chercheurs qui bossent dur, et, autant que possible, restez chez vous.

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sept. 2020 06 21:00

Re: Point COVID de la semaine

Message par leon macnoussi

#7

Aujourd'hui, c'est dimanche. Voici des infos de Dendrobate Doctor et nous sommes ensemble pour faire l'état de la recherche sur l'épidémie de Covid-19.

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FAKE DE LA SEMAINE
Il y a des fakes viraux, quasi instantanés, qui se répandent comme des trainées de poudre et qui partent aussi vite qu’ils sont arrivés (mais souvent le mal est fait). Et il y a ceux qui s’installent dans la durée, la longue, très longue durée. Le cas Jean-Dominique Michel est de ceux-là.
Pour ma part, j’ai connu ce monsieur au début du confinement, lorsqu’il était question encore de savoir si celui-ci était une bonne idée, si l’épidémie allait réellement ou non nous exploser à la tronche et si l’hydroxychloroquine marchait ou non. Si ça n’avait pas encore atteint le niveau de violence d’aujourd’hui (voir la section « Bonne nouvelle de la semaine »), les échanges étaient déjà assez houleux, et des articles de ce monsieur m’ont été envoyés par des membres de ma famille, qui voyaient en lui un spécialiste diplômé et reconnu prenant la défense d’un autre spécialiste reconnu. Dès les premières phrases, il m’avait fait bondir, alignant les chiffres faux sur les interprétations mensongères et les déclarations sans source et je l’avais rangé avec les autres énergumènes lambda qui essayaient de tirer profit de la détresse collective et dont on n’entendrait plus parler par la suite. Sur ce dernier point, j’avais tort.
Car, sa supercherie mise à jour (on en reparle tout de suite derrière), l’homme a trouvé un autre créneau qui consiste à expliquer aux complotistes pourquoi ils ont raison de l’être, pourquoi ceux qui accusent les autres d'être complotistes ont simplement arrêté de réfléchir et que donc il ne faut jamais écouter leurs preuves et leurs arguments quels qu’ils soient (comme c’est pratique) et pourquoi, de nos jours, être taxé de complotiste devrait être un honneur. A une époque de défiance vaccinale majeure en France (voir la section « Mauvaises nouvelles de la semaine ») et de violence du grand public envers les chercheurs (Futura Science vient de sortir un papier intitulé « France : Les scientifiques sont-ils en sécurité ? », on en reparle ensuite), de tels propos sont dangereux et doivent être dénoncés.
Car, comme je le disais plutôt, Jean-Dominique Michel n’est en rien le spécialiste qu’il prétend être. Il se présente comme anthropologue de la santé, mais il n’a fait aucune étude de santé qui ne soit pas liée à des dérives médicales sectaires (telle la bio-généalogie, appelée aussi décodage biologique, une branche de la Nouvelle Médecine Germanique, qui a tout de même valu à son créateur l’interdiction d’exercer la médecine, 4 condamnations et un sympathique séjour à Fleury-Mérogis, ça vous pose le niveau, je vous mets la fiche Psiram pour ceux que ça intéressent https://www.psiram.com/fr/index.php/Méd ... _UrQc5W2s4) et il n’a pas de diplôme en anthropologie (en tout cas pas de diplôme ayant une valeur réelle délivré par un institut digne de ce nom). Il n’est pas spécialiste reconnu, puisqu’on ne trouve aucune publication scientifique à son nom (une recherche Google Scholar renvoie à un livre sur les chamans, un PDF de conférence et c’est tout). Pour plus de détails, je vous laisse ici :



l’excellente vidéo réalisée par La Tronche en Biais à son sujet.
Signe inquiétant qui plus est, l’homme commence à s’associer avec des personnages très défavorablement connus de nos services, comme qui dirait, on l’a vu ainsi en interview-entretien avec un partisan des chemtrails, lui expliquer tout de même « que toi et moi, on est de vrais électrons libres dont le monde a besoin » (non, laissez le monde tranquille, entre le Covid, la campagne de Trump et la mort d’Annie Cordy, il en bave déjà assez comme ça !).
Que peut-on retenir, à part que chaque crise génère des rapaces près à tout pour se nourrir de la détresse humaine ? Qu’il est important de vérifier que les gens sont bien ce qu’ils prétendent être, même quand ils passent à la télé ; que dans le doute, il faut toujours solliciter l’avis de quelqu’un du milieu pour évaluer si une personne est bel et bien un scientifique ; et que, en ce qui concerne le cas de M. Michel, non seulement rien de ce qu’il dit ne doit être cru, mais plus encore chaque personne, chaque idée, chaque thérapie qu’il défend doit être regardée avec méfiance car il n’y a probablement rien de scientifique là-dedans.


DECOUVERTE DE LA SEMAINE
Et si les orages de cytokines n’étaient pas des orages de cytokines ? C’est la conclusion, toujours en pointillés et en cours de vérification (disponible ici : https://elifesciences.org/articles/5917 ... _UrQc5W2s4), à laquelle est parvenue une équipe du Oak Ridge National Lab, dans le Tennessee. L’équipe a soumis plus de 40.000 gènes du Sars-Cov-2 à Summit, le deuxième superordinateur le plus puissant au monde. Plus d’une semaine de calculs plus tard, Summit donnait un modèle de fonctionnement du virus, et celui-ci était assez cohérent pour que les résultats soient considérés comme fiables.
En effet, Summit a bien mis en évidence le lien entre le virus et les récepteurs ACE2 (la serrure préférée du virus pour rentrer dans une cellule, si vous vous souvenez de mes poussives tentatives de vulgarisation à base de clé et de porte). Ce fait, déjà connu, explique pourquoi la muqueuse du nez est la porte d’entrée préférée du virus (et pourquoi il faut mettre correctement son masque, aussi !). Mais il a révélé que, rapidement, Sars-Cov-2 est capable de s’infiltrer partout où ce récepteur est abondant, comme dans les intestins, expliquant les symptômes digestifs passés inaperçus au début de ce qu’on pensait être une maladie pulmonaire.
Mais la principale révélation de Summit est encore plus intéressante : une fois en place dans suffisamment de cellules, il pirate le système de régulation du corps, obligeant des cellules qui ne l’utilisent normalement pas ou très peu à exprimer le récepteur ACE2, donnant ainsi au virus de nouvelles portes d’entrée vers des organes jusque là inviolables. Et cela n’est pas sans conséquence (je veux dire, outre la conséquence qui fait que d’un seul coup vos poumons ou votre cerveau deviennent des terrains de jeu) car le système piraté par le virus est aussi celui qui régule une partie de l’immunité et, notamment, une hormone aux effets intéressants : la bradykinine. Si celle-ci est une hormone là où les cytokines sont des protéines, elles sont assez cousines dans leur fonctionnement et un orage de cytokines produit peu ou prou les mêmes effets qu’une surcharge de bradykinine (emballement du système immunitaire, augmentation de la pression artérielle, risque d’hémorragie interne). Mais là où l’orage de cytokines entraine généralement la mort par œdème pulmonaire (un gonflement qui écrase l’organe, si on veut faire très simple), la surcharge de bradykinine la génère par bronchoconstriction (le resserrage des vaisseaux et des tissus des bronches). Et ça ne se traite pas de la même façon.
La piste va donc être explorée plus en détails et devrait donner lieu à des essais cliniques sur l’humain.


PISTES DE LA SEMAINE
*Cas sévères : les corticoïdes seraient bel et bien efficaces pour traiter les cas sévères. Une méta-analyse publiée dans Journal of American Medical Association (disponible ici : https://jamanetwork.com/journals/jama/a ... _UrQc5W2s4), regroupant 7 études (dont une menée par l’AP-HP) montre que l’usage systématique de la corticothérapie dans les cas graves fait baisser la mortalité de 21%.
*Enfants : on ne sait toujours pas pourquoi les enfants sont si peu malades, en revanche on en apprend tous les jours à leur sujet. Une étude réalisée par le Children’s National Hospital de Washington (disponible ici : https://www.jpeds.com/article/S0022-347 ... _UrQc5W2s4) a montré que chez les enfants le virus et les anticorps peuvent cohabiter, le virus restant en moyenne 25 jours dans l’organisme alors que les anticorps apparaissent en moyenne au jour 18. Le Dr Burak Bahar explique également que les plus jeunes et les filles semblent mettre plus de temps à éliminer le virus, mais on ignore pourquoi et l’échantillon n’est pas assez grand pour être sûr.


IMPASSE DE LA SEMAINE
*Visière : contrairement au masque, la visière ne permet pas de protéger les autres si on est infecté. Dans une étude publiée dans Physics of Fluids (disponible ici : https://aip.scitation.org/doi/10.1063/5 ... _UrQc5W2s4&), des chercheurs de la Florida Atlantic University ont montré que les visières de protection ne freinaient que très peu la dispersion des gouttelettes et ne pouvaient être utilisées seules pour fournir une protection efficace.


MAUVAISES NOUVELLES DE LA SEMAINE
*Rentrée des classes : la rentrée a à peine une semaine et déjà 22 établissements et plus d’une centaine de classes ont dû fermer pour cause de cas de Covid. Un démarrage difficile qui laisse augurer d’une année compliquée.
Source : Ministère de l’Education Nationale
*Vaccin : on n’arrête plus les Français en matière de défiance vaccinale. Une étude Ipsos publiée sur le site du Forum Economique Mondial dresse un portrait peu reluisant de l’état d’esprit du citoyen moyen. Ils ne sont que 59% à être pour un vaccin contre le Covid contre une moyenne de 74% à l’échelle mondiale (le Brésil, durement touché, affiche par exemple un solide 88%). La France est donc un des pays du monde où les gens sont le moins prêts à se faire vacciner contre le Covid, devancé seulement par la Russie, la Pologne et la Hongrie (il y aurait sans doute une énorme analyse géopolitique à faire de ce regroupement, mais je n’ai clairement pas le courage). A l’inverse, nos concitoyens sont 20% à être farouchement opposés à ce vaccin quelles que soient les conséquences contre seulement 12% à l’échelle mondiale, devancés cette fois uniquement par les Russes et les Hongrois.
Source : https://www.ipsos.com/fr-fr/59-des-fran ... _UrQc5W2s4
*Espagne : la deuxième vague est bien là à Madrid. La ville s’affaire à la construction en urgence de l’hôpital Isabel Zendal pour tenter de contenir le flux de patients et médecins comme syndicats parlent d’un système de santé au bord de l’effondrement.


BONNE NOUVELLE DE LA SEMAINE
*Dépôt de plainte : je ne vais clairement pas me faire que des amis sur ce coup-là, et je vous avoue que ça m’importe peu. La Société de Pathologie Infectieuse de Langue Française (c'est-à-dire 500 spécialistes du sujet) a porté plainte devant l’Ordre des Médecins contre D. Raoult pour infractions multiples au code de déontologie médicale. Au moins neuf infractions lui sont reprochées, dont des essais cliniques illégaux, la promotion d’un traitement à l’efficacité non-prouvée et un manque criant au devoir de confraternité (ce qui est un terme savant pour dire « on ne se tire pas dans les pattes par ego au beau milieu d’une épidémie mondiale »).
Alors. Pourquoi classer ça dans les bonnes nouvelles me direz-vous ? Déjà, parce qu’il faut arrêter de faire n’importe quoi avec la science et de croire que passer à la télé vous donne tous les droits. Il y a des protocoles éthiques pour les essais cliniques, si vous les enfreignez, vous enfreignez le droit du patient et vous devriez être en taule (oui, monsieur Joyeux, ça vaut pour vous aussi !). Ensuite, parce que, et tous les chercheurs du monde le disent, pas juste en France, cet homme a fait énormément de mal à la recherche dans un moment critique. Son influence sur les patients a bloqué de nombreux essais cliniques (on en a déjà parlé), a coûté une fortune en argent et en temps pour tester bien plus que n’importe quel autre un traitement (on en a aussi parlé) qui en plus n’avait aucune chance théorique de marcher (on en a également parlé). Mais plus encore, et là, je reconnais tout de suite que ça commence à devenir personnel : parce qu’il a lancé, orchestré et soutenu des mouvements (voir des campagnes, pour certains de ses collègues) de harcèlements, de menaces et d’injures systématiques contre quiconque avait le culot d’oser s’opposer à lui, de démontrer que son travail était biaisé ou simplement de dire qu’il avait tort. Depuis que je tiens cette page, les seuls cas d’insultes, de menaces, de prises de contact avec mes proches dans l’espoir de faire pression sur moi que j’ai eus à subir étaient directement liés à ses défenseurs pour lesquels celui qui osait le contredire devait être puni. Plus grave, les chercheurs ayant publié la méta-analyse dont j’ai parlé la semaine dernière se retrouvent aujourd’hui menacés, physiquement parfois (leur adresse privée a été publiée en ligne), harcelés et victimes de campagnes d’insultes et de dénigrement monstrueuses. La réaction de L’IHU et de son directeur a été de faire une vidéo (donc pas une critique entre chercheurs, une vidéo à destination du grand public, donc de leurs fans, je vois pas comment appeler ça autrement à présent) pour dire que l’étude était pourrie et que c’était un complot, puis se taire sans jamais essayer de porter secours à leurs collègues quand ils ont commencé à être menacés de mort.
La plainte n’aboutira sans doute pas (quand on voit qu’ils ont toujours pas radié Joyeux pour des essais clandestins sur des patients vulnérables atteints d’Alzheimer…), mais c’est le message qui compte : ce comportement n’est pas acceptable. Il n’est pas normal de manipuler des foules qui ont peur, il n’est pas normal de s’en servir pour faire taire les chercheurs, il n’est pas normal de remplacer la science par les injures et les menaces. Cela doit cesser.
Futura-Science a sorti un très bel article à ce sujet je vous le mets ici : https://www.futura-sciences.com/science ... _UrQc5W2s4


« QU’EST-CE QUE PUTAIN DE QUOI ? »
Le gouvernement canadien a-t-il réellement recommandé à sa population de mettre un masque pour faire l’amour ? Alors oui, sinon ce ne serait pas dans cette rubrique, mais c’est un poil plus compliqué que cela.
D’abord, cette recommandation s’adresse aux couples ne vivant pas ensemble ou dont l’un est très souvent absent du domicile conjugal. Ce qui ne concerne déjà pas tout le monde. Ensuite, je tiens à rappeler que ce n’est pas la première fois que des dispositifs de protection médicale s’invitent dans nos rapports sexuels (sortez couverts, tout ça, ben là c’est juste le niveau du dessus). Egalement, le gouvernement se veut rassurant car il ne semble pas y avoir de contamination possible par le sperme ou les sécrétions vaginales et c’est déjà ça. Enfin, il est précisé que ce dispositif doit s’appliquer dans les cas où la distanciation à plus d’un mètre est impossible.
Du coup, rien que pour vous, j’ai réalisé l’accouplement improbable (mais fort à propos) de la littérature étrangère et des mathématiques : le Kama-Sutra et le théorème de Pythagore ! Donc, soit un couple en levrette constituant un angle droit avec leurs deux troncs, et soit donc le triangle rectangle ABC où BC est l’hypoténuse formée par la droite reliant leurs deux têtes. Admettons que la taille moyenne du tronc des femmes de ma génération est entre 80cm et 90cm et celle des hommes entre 85cm et 95cm. Dans le cas le plus petit nous avons √(80²+85²)= 116.72cm, ce qui est donc bien au-dessus du mètre de distanciation nécessaire, avec en plus les visages qui ne respirent pas dans le même sens. Voilà. De rien.


POINT METHODE DE LA SEMAINE Croyance, connaissance, science
J’entends beaucoup cette rengaine ces temps-ci : la science est une croyance comme une autre.
On le dit tout net, on ne croit pas à la science, personne ne croit à la science. On peut lui faire confiance ou pas, à la limite, mais personne ne croit à la science. Pourquoi donc ?
Il existe deux acceptions au terme « croire ».
*la foi « je crois en Dieu », qui ne demande pas de preuve, vous croyez parce que c’est votre ressenti et ça s’arrête là, tant que vous ne dérangez personne avec ça, nul n’a à vous demander de preuve parce que la foi s’applique à des domaines où il n’y en a pas.
*l’opinion « je crois qu’il fera beau demain/que c’est ce tableau que je préfère/que c’est Mlle Rose avec le chandelier dans la bibliothèque », qui elle se base sur un faisceau d’indices, mais qui ne sont pas des preuves, simplement des éléments qui, si on les agence d’une certaine façon, semblent donner une réponse. Mais on n’est pas sûr que ce soit ça.
De fait, la science démarre souvent avec une croyance du deuxième type « je crois que telle molécule marche bien contre telle maladie/telle particule peut apparaitre si je cogne telle autre contre telle autre/tel site antique pourrait se trouver à tel endroit », mais la différence, c’est que la science va prendre cette croyance et la torturer de toute les façons possibles et imaginables pour lui faire avouer qu’elle est fausse, et c’est seulement quand elle aura assez échoué qu’elle se dira « basé sur tout le travail effectué, maintenant, on sait que telle molécule marche, telle particule apparait, tel site est ici ». Et c’est ce savoir qui est de la science.
On ne peut pas croire en la science : on peut avoir plus ou moins confiance en les hommes et les femmes qui la font, on peut avoir plus ou moins de critiques envers ses méthodes, on peut la comprendre plus ou moins bien, on peut la penser plus ou moins capable d’amener le progrès ou des désastres. Mais on n’y croit pas. Le jour où on vous demande de croire, sans vous apporter de preuves, sans vous donner les clés pour les lire, sans souffrir la contradiction, alors vous retombez sur le premier cas de croyance. Ça devient de la religion.


En espérant avoir pu apporter un peu de lumière dans le chaos ambiant, je rends l'antenne, et on y retourne la semaine prochaine, car l'épidémie ne semble pas vouloir nous lâcher. En attendant, prenez soin de vous et des chercheurs qui bossent dur, et, autant que possible, restez chez vous.

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leon macnoussi
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sept. 2020 13 21:26

Re: Point COVID de la semaine

Message par leon macnoussi

#8

Aujourd'hui, c'est dimanche. Voici des infos de Dendrobate Doctor et nous sommes ensemble pour faire l'état de la recherche sur l'épidémie de Covid-19.

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FAKE DE LA SEMAINE

Alors, je préviens, c’est pas ma faute, c’est pas moi qui m’acharne, mais j’y peux rien si on va encore parler de Raoult cette semaine, d’autant plus que le cas dont je vais parler ici m’a été soumis par un lecteur, donc c’est bien que ça pose question.
Lundi, le directeur de l’IHU Marseille publie dans un tweet un lien vers la nouvelle étude de son équipe qui a tenté sa propre méta-analyse sur l’hydroxychloroquine, et le lien est introduit ainsi « Voici notre revue de la littérature COVID, concernant l'histoire et le traitement de la maladie. Nos conclusions se rapprochent de celles de l'équipe d'Harvey Risch (deuxième schéma), qui a publié dans l'American Journal of Medicine. ». Bon, alors j’ai lu l’étude, et la méthodologie n’est pas meilleure que celle des précédentes, pour ceux que ça intéresse, ils savent donc à quoi s’en tenir, mais les derniers mois nous ont montré que parler méthodologie ne suffisait pas à convaincre, donc je vais parler d’autre chose, à savoir, la phrase d’introduction.
De un, Harvey Risch n'a pas publié d'étude dans l'American Journal of Medicine : il a publié une lettre d'opinion, qui est un document dans lequel on donne son avis mais qui n'a aucune valeur scientifique (c'est l'équivalent du courrier des lecteurs des revues, si vous voulez, vous pouvez le trouver ici, et vous constaterez qu'il y a bien marqué dans le titre "opinion" https://academic.oup.com/aje/advance-ar ... QGCqxbhy00). Donc, il ne peut pas y avoir de « conclusions » du côté d’Harvey Risch, puisqu’il n’y a pas eu d’étude, seulement quelqu’un qui donne son avis. Vous pourrez également constater que ce monsieur a publié en son seul nom, il n'y a donc aucune équipe derrière. Donc déjà, une introduction honnête aurait été "Nos conclusions vont dans le sens de l'opinion que Harvey Risch en son nom propre a envoyé à l'American Journal of Medicine".
De deux, cette opinion a été visée par un certain nombre de "concerns" (ce que les chercheurs envoient au journal lorsqu'ils estiment que celui-ci a publié quelque chose qui comporte des erreurs, je ne vais pas toutes vous les lister, mais en voici un en exemple https://academic.oup.com/aje/advance-ar ... QGCqxbhy00 vous constaterez que cette fois il s'agit bel et bien d'une équipe), car le document semblait truffé d'erreurs à beaucoup de spécialistes. En conséquence, une introduction plus honnête aurait été "Nos conclusions vont dans le sens de l'opinion, invalidée par de nombreux confrères, que Harvey Risch en son nom propre a envoyée à l'American Journal of Medicine". Ce n'est quand même pas la même chose.
Maintenant, vous me direz "oui mais, peut-être que l'étude est valide tout de même" (et quelqu’un qui n’a pas les connaissances pour éplucher l’étude par lui-même est parfaitement en droit de se poser la question). Mais ça doit déjà alerter que, pour donner du crédit à son travail, la meilleure référence que l'IHU ait trouvé soit une simple lettre d’un mec tout seul au courrier des lecteurs désavouée par de très nombreux spécialistes du sujet, et non une autre étude solide et sérieuse. Aboutir aux mêmes conclusions que quelqu'un dont les autres spécialistes estiment qu'il a tort, notamment à cause de graves erreurs méthodologiques, et qui n’a tellement pas de résultats allant dans son sens que ça n’a pas donné lieu à une publication scientifique, ça ne devrait pas être quelque chose qu'on met en avant comme une bonne nouvelle quand on est un chercheur rigoureux et honnête.


DECOUVERTE DE LA SEMAINE

Ce n’est pas une découverte à proprement parler, plutôt un ensemble d’avancées, je me suis donc dit qu’il serait bien de faire le point sur la situation actuelle de la recherche sur un vaccin.
Nous avons eu deux rebondissements majeurs cette semaine, le premier concernant le candidat russe et le second concernant le britannique.
*Concernant le vaccin russe, les résultats des essais préliminaires (phases 1 et 2) ont été publiés la semaine dernière (disponibles ici https://www.thelancet.com/journals/lanc ... QGCqxbhy00) et font depuis l’objet d’un certain nombre de critiques. Si les résultats en soi ne montrent pas d’effets secondaires particuliers et attestent que l’injection génère bel et bien la fabrication d’anticorps (on ne parle pas encore d’immunité à ce stade, mais c’est une étape nécessaire), le problème vient des données utilisées pour produire ces résultats. Tout d’abord, le nombre de patients impliqués est faible (76 patients, dont seulement 40 avec une double dose) et très jeunes (la moyenne d’âge est de 27 ans), aucune idée donc de si des profils plus âgés ou plus hétérogènes vont réagir aussi bien. Ensuite, le suivi est très court (40 jours), il est donc impossible de savoir si oui ou non un risque d’effet secondaire à long terme existe, et cela, alors que Moscou a annoncé tester le vaccin sur 40.000 personnes en ce moment-même pour sa phase 3. Enfin et plus grave, plusieurs experts pensent purement et simplement que les données patients sont truquées : Andréa Cossarizza (Modène) ou encore Enrico Bucci (Philadelphie), ont écrit au journal pour signaler des profils de patients qu’ils qualifient de « photoshoppés », les données « sont trop similaires et trop peu plausibles du point de vue statistique ». Devant l’avalanche de critiques, les éditeurs ont réclamé des explications aux auteurs, qui se sont contentés de nier en bloc, sans apporter d’éléments de preuve à l’heure actuelle.
*Concernant le vaccin britannique, AstraZeneca avait annoncé en début de semaine une pause dans les essais (et non pas un arrêt, comme on a pu le lire partout) afin d’investiguer un « signalement inquiétant » (et non pas un « effet secondaire grave », on manque terriblement de journalistes scientifiques, si vous saviez). En effet, lors d’essai clinique d’un vaccin, si un patient tombe malade de manière suspecte, l’essai est mis en pause le temps de savoir 1- ce qu’il a 2- si c’est lié au vaccin 3- à quel point c’est rare et/ou grave. L’idée étant d’une part que si un effet secondaire grave existe, on stoppe tout dès qu’on en a connaissance et d’autre part qu’il est normal, quand on teste une grande cohorte, que certains patients développent des pathologies graves qui n’ont rien à voir. C’est ce qui semble s’être passé dans ce cas, puisque l’université d’Oxford a annoncé samedi que le doute été levé et que les essais allaient reprendre.


PISTE DE LA SEMAINE

*Mortalité : on commence mieux à comprendre les différents facteurs influant sur la mortalité de la maladie. Si l’âge est un facteur prépondérant (sur 1.000 malades de plus de 75 ans, 116 vont mourir contre seulement 5 morts sur 1.000 malades de 50 ou 60 ans), le sexe l’est également puisque, tous âges confondus, les hommes meurent en moyenne deux fois plus que les femmes. Pour la Science a publié un très bon article résumant l’ensemble des données sorties des différentes études sur le sujet, je vous le mets ici : https://www.pourlascience.fr/sr/covid-1 ... QGCqxbhy00


IMPASSE DE LA SEMAINE

*Immunité de groupe : la couverture vaccinale de nombreux pays, la France en tête du tableau, risque de ne pas être suffisante pour atteindre l’immunité de groupe et enrayer l’épidémie. Les conclusions d’une étude (disponible ici https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articl ... po=37.5000) sur les différentes stratégies vaccinales, basées sur les épidémies du SRAS et du MERS, cousines du Covid, montrent qu’il faudrait une couverture vaccinale de 75% chez les soignants comme dans la population pour que les nouveaux cas chutent rapidement, et cela, avec un vaccin à l’efficacité théorique de 80% (ce qui veut dire que 1 vacciné sur 5 peut l’attraper quand même). Un chiffre inatteignable au regard de l’intention de vaccination de la France (59%).


MAUVAISE NOUVELLE DE LA SEMAINE

*2e vague : avec 42 départements en zone rouge, la France compte désormais parmi les pays les plus touchés du monde (en valeur relative comme en absolue). Avec 44.992 nouveaux cas la semaine passée, seuls l’Espagne, les Etats-Unis et l’Inde ont fait pire. Le tableau n’est pas mieux quand on rapporte les cas au nombre d’habitants (689 cas pour 1 million), où cette fois seuls l’Espagne et les Etats-Unis nous dépassent. Un chiffre qui ne peut être mis sur le compte du nombre de tests, la Suisse, la Belgique ou l’Allemagne testant beaucoup et affichant des taux de positivité de, respectivement, 2.6%, 2.1% et 0.8%, là où nous tenons un solide 4.8%. Après des semaines de répit, la réanimation recommence à se remplir (Marseille doit rouvrir des lits, ceux attribués Covid étant saturés) et les morts repartent à la hausse (nous déplorions par exemple, 80 décès vendredi).
Sources : ARS, Santé Publique France


BONNE NOUVELLE DE LA SEMAINE

*Quatorzaine : la durée d’isolement obligatoire va être réduite et passera de 14 jours à 7 jours pour les cas positifs sans symptômes. Pour les cas symptomatiques, il faudra désormais attendre 7 jours après la disparition des symptômes, les cas contacts eux devront attendre 7 jours avant de se faire tester et rester à l’isolement le temps de recevoir leurs résultats.


« QU’EST-CE QUE PUTAIN DE QUOI ? »

Alors, je ne veux pas tirer sur l’ambulance. Et cette pauvre Eve Engerer n’est pas quelqu’un à qui je souhaite m’en prendre. Quand elle déblatère aux journalistes ses délires à base de « vaccin à nanoparticules activé par la 5G », de « trafic d’embryons autorisé par des lois votées la nuit au Parlement » ou de « la franc-maçonnerie profonde avec des réseaux pédo-pornographiques » qui encourage le port du masque comme étant « un rituel pédo-sataniste », je pense que la seule réaction humaine à avoir, c’est la compassion. En revanche, ce qu’elle raconte est révélateur de gens pour qui je ne vais avoir aucune pitié.
Car si ses termes vous semblent un peu familier, c’est qu’il s’agit en réalité d’éléments de langage que vous avez parfaitement pu entendre ailleurs, ceux d’une mouvance qui s’infiltre partout et nous arrive droit des bas-fonds conspirationnistes américains.
QAnon.
Le mouvement est tellement barré (les mecs croient quand même que Trump est un sauveur venu empêcher les démocrates et les stars d’Hollywood d’extraire de l’adénochrome du sang d’enfants livrés au sacrifice par des réseaux francs-maçons) que je vous laisse ici (https://fr.wikipedia.org/wiki/QAnon?fbc ... QGCqxbhy00) la fiche Wikipédia, pour vous faire une idée de l’historique, sinon ça serait trop long. Notons toutefois que le mouvement est considéré comme terroriste par le FBI depuis 2019, notamment après des épisodes de violence à main armée (si vous vous souvenez du taré qui a débarqué avec un fusil à pompe dans une pizzeria pour « sauver les enfants » retenus à la cave, c’était déjà eux), des incidents de kidnappings et même un meurtre en 2019, à New-York. Donc oui, leur discours fait rire, mais la menace est très sérieuse.
Je ne peux que vous encourager à vous documenter un peu sur ce groupe et ses exactions, surtout celles se produisant en France. Récemment, une pizzeria de mon arrondissement a fait les frais d’un « pizzagate à la française » quand des membres francophones de QAnon ont cru reconnaître un « logo pédophile » dans le dessin d’une pizza qu’on couvre de sauce tomate. Le restaurant s’appelant Pizza Girl, il n’en a pas fallu plus pour déclencher une campagne de harcèlement et de menaces, accusant le gérant de pédo-sataniste qui vendrait dans les sous-sols de vraies filles « Hawaïenne », « Américaine » ou « Napolitaine » (perso, pour avoir déjà utilisé leurs services, ça a jamais été Elizabeth qui a livré ma Reine, je suis très déçue).
Je rappelle que la pédophilie est une anomalie constitutive, que l’immense majorité des pédophiles sont abstinents, que les seuls groupes à logos qu’ils font sont des groupes de parole pour essayer de vivre sans faire de mal à personne puisqu’on leur refuse encore souvent les traitements dont ils auraient besoin (il y a peu Vice a fait une présentation des recherches et groupes de soutien en cours, si ça vous intéresse je pose ça là https://fr.wikipedia.org/wiki/QAnon?fbc ... QGCqxbhy00). Ceux à qui il faut s’en prendre, ce sont les pédocriminels, dont la moitié n’est absolument pas pédophile, simplement opportuniste.
Bon et les satanistes alors, me direz-vous ? Est-ce que eux ils mangent des bébés ou les sacrifient pour le pouvoir ? Comme ma dévotion n’a pas de limite, je suis allée demander à un proche concerné de m’expliquer le satanisme. Sa réponse est assez brève : Bible Satanique, Prologue, commandement n°9 « Ne maltraitez pas les petits enfants ». Voilà. Je peux pas faire plus clair.


POINT METHODE DE LA SEMAINE : My Lover Dunning-Kruger

L’effet Dunning-Kruger est un biais cognitif se traduisant par le fait, paradoxal, que les personnes les moins compétentes dans un domaine surestiment leurs capacités avec aplomb, là où les plus compétentes sont celles qui feront preuve de plus de prudence et de modestie. Plus précisément, cet effet se décompose en 4 facteurs :
1-la personne incompétente tend à surestimer son niveau de compétence ;
2-la personne incompétente ne parvient pas à reconnaître la compétence de ceux qui la possèdent véritablement ;
3-la personne incompétente ne parvient pas à se rendre compte de son degré d’incompétence ;
4-si une formation de ces personnes mène à une amélioration significative de leur compétence, elles pourront alors reconnaître et accepter leurs lacunes antérieures.
La progression de chacun au sein d’un type de savoir suit donc une courbe très connue que je vous mets en illustration et qui explique, notamment, pourquoi Facebook est rempli d’experts sur tout, pourquoi les vrais experts ont tant de mal à se faire entendre, et pourquoi on croit plus facilement quelqu’un sans compétence réelle que quelqu’un de vraiment compétent, la surconfiance du premier étant plus communicative que la prudence du deuxième.


En espérant avoir pu apporter un peu de lumière dans le chaos ambiant, je rends l'antenne, et on y retourne la semaine prochaine, car l'épidémie ne semble pas vouloir nous lâcher. En attendant, prenez soin de vous et des chercheurs qui bossent dur, et, autant que possible, restez chez vous.

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sept. 2020 20 21:57

Re: Point COVID de la semaine

Message par leon macnoussi

#9

Aujourd'hui, c'est dimanche. Voici des infos de Dendrobate Doctor et nous sommes ensemble pour faire l'état de la recherche sur l'épidémie de Covid-19.

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FAKE DE LA SEMAINE

Je. Vous. Jure. Je vous jure que j’essaye de ne pas en parler, mais il se passe pas une semaine sans que tombe une nouvelle qui soit encore plus affligeante que les précédentes.
Donc. Comme j’en avais parlé il y a deux semaines, il n’a échappé à personne qu’une plainte à été déposée contre D. Raoult auprès de l’Ordre des Médecins. Bon, on en a parlé je ne reviens pas dessus. Il ne vous aura sans doute pas échappé non plus que, quasiment instantanément, parait une tribune/pétition/lettre ouverte signée par environ 200 médecins, s’insurgeant contre cette plainte et demandant à ce qu’on « laisse D. Raoult tranquille », arguant notamment qu’il a « donné de l’espoir aux gens » (mais croyez-moi, les gens intubés n’ont pas besoin d’espoir, ils ont besoin d’un traitement sûr à l’efficacité prouvée…). Bref.
Sur ce, parait sur Egora (je vous mets le lien ici : https://www.egora.fr/actus-pro/temoigna ... Vp_MUxb2z0) le témoignage scandalisé d’une endocrinologue qui indique que sa signature (ainsi que sa spécialité et localisation, donc pas d’erreur d’homonymie possible) apparait sur cette tribune, qu’elle n’a jamais signée et ne soutient pas. Immédiatement, le compte Twitter Zenutopia relaie l’info et invite les médecins à consulter la liste et se signaler s’ils sont dessus contre leur gré. Le Figaro, qui a partagé la tribune mais suit de près les rétractations annonce qu’à ce jour, sur un peu moins de 210 signataires, une quinzaine ont contacté le journal pour dire qu’ils n’avaient rien à voir avec ça (et sont donc retirés de la tribune telle que publiée par le journal, disponible ici avec l’erratum : https://www.lefigaro.fr/vox/societe/l-a ... Q_VeO3tbZU). Les questions qui se posent à présent sont : Combien de personnes encore sur la liste y sont à tort parce qu’elles n’ont juste aucune idée que leur nom y figure ? Que doit-on conclure de l’honnêteté de la démarche derrière cette tribune (et donc de ce qu’elle défend) quand des éléments comme ceux-là sont mis au jour ?


DECOUVERTE DE LA SEMAINE

Encore une fois cette semaine, pas vraiment une découverte mais plutôt un bilan des avancées, en l’occurrence sur les vaccins en course à l’heure actuelle. Petit passage en revue des principaux candidats :
*Royaume-Uni : ChAdOx1, le poulain de l’écurie AstraZeneca en lien avec l’université d’Oxford, a donc repris ses essais de grande ampleur. Afin d’éviter les biais liés à la localisation des essais, les milliers de volontaires sont répartis entre le Royaume-Uni, les USA, l’Afrique du Sud et le Brésil. Les essais avancent bien, et sauf nouvelle interruption, le laboratoire annonce un possible lancement début 2021.
*Russie : Spoutnik-V, le candidat russe est en cours d’essai sur 40.000 volontaires russes (principalement moscovites), mais la publication des résultats est entachée de suspicion de fraude, après que deux (dont j’ai parlé la semaine) puis 30 chercheurs aient rédigé des lettres au journal s’inquiétant du fait que les données semblaient « photoshopées ». Ces données reposeraient plus sur la notion d’efficacité que de sécurité du vaccin car celui-ci, comme celui d’AstraZeneca, se base sur un adénovirus pour transporter les fragments du vaccin, une technique connue pour être fiable et avoir provoqué peu d’incidents.
*Chine : 4 vaccins sont au banc d’essai, je vais parler en particulier des 2 issus de SinoPharm qui sont également en phase 3 et qui ont la particularité d’avoir été fortement critiqués, non pas à cause de leurs résultats (la sécurité semble correcte et, même si l’immunité n’est pas prouvée, il semblerait bien que des anticorps apparaissent à la suite de l’injection) mais pour avoir été déjà inoculés à plusieurs dizaines de milliers de personnes avant la fin des essais cliniques et le tout hors protocole (et ce même si tout laisse à penser que ces personnes étaient bel et bien volontaires).
*USA : avec ARNm-1273, le laboratoire Moderna mise sur l’innovation, en proposant un vaccin à ARN messager, testé actuellement en phase 3 sur 30.000 volontaires américains. S’il est annoncé pour fin 2020, il faut noter qu’il s’agit d’une technologie nouvelle qui, si aucun incident de sécurité n’a été rapporté, n’a pas encore fait ses preuves en matière d’efficacité.

Que retenir de tout ça ? Déjà, qu’il n’y aura rien avant au mieux la fin de l’année, voire 2021. Ensuite, que plusieurs pays développent des vaccins avec des techniques différentes (ce qui est bien, on ne met pas tous les œufs dans le même panier) mais dont certaines se ressemblent (ce qui veut dire que si l’un marche, on devrait avoir de bonnes chances que les autres aussi). Enfin que la recherche, ça prend du temps, et que quand un dirigeant (et il y en a eu un peu partout) vous annonce que son pays possède un vaccin alors que les essais ne sont pas terminés, au mieux, il pêche par excès d’optimisme, au plus probable c’est de la propagande (ce qui ne veut pas dire que ça ne marchera pas, juste qu’il faut rester en alerte), au pire, c’est un indice fort de potentielles pressions sur les chercheurs pour produire vite quelque chose, peu importe les résultats. Il va donc falloir redoubler de vigilance quant aux annonces à ce sujet dans les semaines et les mois à venir.


PISTES DE LA SEMAINE

*Mutations : contrairement à ce qui a été annoncé de manière assez anxiogène, le virus semble muter très peu depuis sa découverte. Une étude des équipes de la Walter Reed Army Institute of Research, dans le Maryland (publiée ici : https://www.pnas.org/content/early/2020 ... 2jln6H6icg) montre que le génome du virus est particulièrement stable. Etant un virus assez massif, les différentes mutations rencontrées n’ont que peu d’impact sur sa structure et son fonctionnement général. Une bonne nouvelle pour les prochaines campagnes de vaccination.
*Masque : porter un masque permettrait une immunisation contre le Covid, selon un mécanisme proche de la variolisation, selon une étude des Dr. M. Gandhi et G.W. Rutherford, de l’université de Californie, publiée dans le New England Journal of Medicine (disponible ici : https://www.nejm.org/doi/full/10.1056/N ... T7Zgd5wqo4). Le fonctionnement est le suivant : en réduisant fortement, mais pas complètement, la quantité de virus qui parviennent aux individus, le masque permettrait une exposition de faible ampleur conduisant à une contamination mineure qui permettrait tout de même au système immunitaire de faire son travail, comme ce qui se faisait avant la vaccination lorsqu’on inoculait de faibles quantités de variole aux adolescents afin qu’ils développent une immunité à moindre risque. Une piste intéressante, mais très difficile à démontrer de manière satisfaisante.


IMPASSES DE LA SEMAINE

*Remdésivir : pour cause de « service médical faible » comparé à son coût élevé, le Remdésivir ne sera pas remboursé en France, les protocoles actuels préférant se concentrer sur d’autres traitement, notamment les corticoïdes, bien moins coûteux.
Source : Haute Autorité de Santé
*Azithromycine : l’antibiotique est dangereux pour les patients Covid, selon une étude publiée le 15 septembre (disponible ici : https://jamanetwork.com/journals/jamane ... 31oXTBGTzo), en particulier lorsqu’il est associé avec un antipaludéen, un opioïde, ou des traitements contre l’hypertension. Il serait à l’origine d’une augmentation de plus 40% des effets cardiaques graves chez les patients traités.


MAUVAISES NOUVELLES DE LA SEMAINE

*France : alors que Marseille a dû rouvrir des lits de réanimation pour les patients Covid, les hôpitaux d’Ile-de-France ont annoncé que désormais 20% des lits de réanimation occupés de la région l’étaient par des patients Covid. Confronté à une augmentation des cas nécessitant une prise en charge médicale, le SAMU de Toulouse a quant à lui rouvert sa cellule de crise mise en place pendant la première vague.
*Espagne : Madrid a déclenché une forme de reconfinement partiel face à l’ampleur des nouveaux cas. Les parcs sont fermés et les déplacements limités à une « zone sanitaire » autour du lieu de résidence, à l’exception des déplacements professionnels, urgents, ou liés à la scolarisation et la garde des enfants. 850.000 personnes sont concernées par ces mesures.
*Israël : le pays a décrété, à partir du 18, un reconfinement général de la population pour 3 semaines, en raison d'un rebond d'épidémie incontrôlable.


BONNE NOUVELLE DE LA SEMAINE

*Décès : le pic de décès survenu en fin de semaine est dû (non pas à une erreur de Santé Publique France comme on a pu le lire partout) mais à un rattrapage lié au fait qu’un établissement de santé d’Ile-de-France n’avait pas transmis plusieurs jours de son décompte de décès. Bon c’est tiède comme bonne nouvelle, mais j’ai pas grand-chose de mieux : il y a désormais plus de personnes en réanimation qu’au déclenchement du confinement et le nombre de décès est à nouveau clairement à la hausse.


« QU’EST-CE QUE PUTAIN DE QUOI ? »

Le patron de Moderna a-t-il réellement annoncé que son laboratoire allait sortir le vaccin qu’ils étudient sans passer par la troisième phase des essais cliniques ? Comme toujours, la réponse est plus compliquée que ça.
Tout d’abord reprenons l’historique : pressé par le président (puisque Moderna est américain) qui annonce qu’il y aura des vaccins pour tout le monde avant les élections du 3 novembre, le laboratoire a annoncé dans un premier temps qu’une commercialisation était envisageable sans souci de sécurité en se passant de la phase 3.
Ceci n’est pas techniquement faux, puisque la sécurité du vaccin, c’est la phase 2 qui s’en occupe (vous pensez bien qu’on ne demande pas des milliers de volontaires pour un test si on est pas à peu près confiant en l’innocuité d’un produit), la phase 3 étant bien plus une phase qui teste l’efficacité. Mais au-delà du fait que injecter à tout le monde un vaccin sûr mais qui ne fait rien, on le fait déjà avec le vaccin homéopathique contre la grippe chaque année, et ça n’empêche pas les gens de mourir, et c’est donc pas une idée brillante, il y a un autre problème. En phase 3, le vaccin rencontre un panel plus large de personnes, avec des pathologies, des atypismes, des génétiques variables et des antécédents familiaux cachés. C’est lors de cette phase qu’on peut voir apparaitre et recenser les effets secondaires les plus rares. De fait, si le vaccin est alors sûr pour la majorité des gens, il peut encore poser problème à certains, et ça, il faut qu’on le sache.
Le patron de Moderna a donc été rappelé à l’ordre par ses confrères, qui n’ont aucune envie de payer les pots cassés d’un développement hâtif, et Moderna fait désormais partie, avec 8 autres géants, des signataires d’un engagement commun (extrêmement rare dans ce milieu très concurrentiel) « à ne pas faire de demande d’autorisation, même d’urgence, auprès de la FDA (Food and Drug Administration), l’agence de contrôle des médicaments, si des essais cliniques en bonne et due forme ne démontrent pas l’efficacité et la sûreté du vaccin ». Le document est disponible, par exemple, ici (c’est la version en français de Sanofi, qui en plus propose une présentation de chacun des laboratoires signataires https://www.sanofi.fr/fr/Actualites/nos ... A3UAmQhlHs) et il tacle au passage la FDA, que les laboratoires accusent d’avoir validé tout et n’importe quoi dès que le président le demandait (le cas de l’hydroxychloroquine aux USA est particulièrement sous-entendu). Le Pr. Hotez de la faculté de médecine de Baylor décrit ainsi le phénomène : « Nous n’avions jamais vu les compagnies pharmaceutiques protéger, en quelque sorte, la population contre le gouvernement ». Le monde devient un endroit très étrange.


POINT METHODE DE LA SEMAINE : Godwin, Hitler et les pédophiles, ou comment stériliser le débat (et me faire signaler sur Facebook)

La semaine dernière, suite à cette incroyable interview d'une médecin expliquant que le port du masque était un "rituel pédo-sataniste", j’évoquais le cas des QAnon et leur fixation sur lesdits pédo-satanistes. J’évoquais aussi le fait que jamais rien, à part des pseudo-affaires qui se sont révélées être des hoax, n’a jamais démontré l’existence de complots/réseaux/sectes pédo-satanistes (même un cas isolé qui aurait servi d’amalgame, comme je pourrais comprendre que certains commencent à faire l’amalgame entre pédophilie et Eglise, vus les scandales mis au jour ces dernières années). La seule chose qui aurait vaguement pu ressembler à une affaire amalgamant les deux, est l’affrontement qu’il y a eu au sénat entre Tipper Gore (la femme du démocrate Al Gore) et des musiciens convoqués (dont Frank Zappa, pour vous donner l’ambiance) lorsque celle-ci a voulu obliger (et a obtenu) la création d’un label pour protéger les enfants de ce qu’elle nommait « porn rock », avec des accusations pêle-mêle d’incitation à la masturbation, au sexe prémarital et, donc, au satanisme. Mais c’est tout.
Lorsque j’ai expliqué cela, j’ai eu droit à des commentaires qui m’accusaient, de manière à peine voilée, de complaisance avec les pédophiles (et je n’insisterai jamais assez sur la nuance avec les pédocriminels, il va falloir que les gens commencent à intégrer ça). Certains sont même aller jusqu’à retrouver une ancienne vidéo d’un cours d’esprit critique pour ados (dans la section vidéo, si ça vous branche) où j’utilise Alice Cooper en exemple, pour m’accuser de nier le pédo-satanisme et de ne pas apprendre aux enfants à se défendre de leurs agresseurs (alors encore une fois, Alice Cooper est chrétien évangéliste, son seul lien avec les enfants, c’est son association de prévention du suicide chez les ados, et, si vous avez des enfants, il est moins un danger pour eux à ce sujet que leur cousin ou votre nouveau conjoint, même si c’est très dur à admettre).

M’est alors venue l’idée que brandir le spectre de la pédophilie contre quelqu’un était une forme de point Godwin, et que c’était intéressant d’en parler.

*La loi de Godwin s’énonce ainsi : Plus une discussion en ligne dure, plus la probabilité d'y trouver une comparaison impliquant les nazis ou Adolf Hitler s’approche de un.
*Le point Godwin est donc le point de non-retour d’une conversation où cet évènement se produit. Attention, on ne parlera pas d’un point Godwin si le débat porte effectivement sur un sujet comparable (l’esclavage, l’eugénisme, la déportation ou mise à mort d’homosexuels ou de croyants minoritaires etc.).
*Le point Godwin peut donc être vu comme l’emballement d’une discussion où les gens ne peuvent plus se comprendre, mais il peut aussi être envisagé comme un moyen de saboter le débat et d’empêcher l’adversaire de défendre sa position : une fois qu’elle a été comparée à celle des nazis, plus personne ne pourrait être d’accord avec, car l’évocation de ce type de pensée est trop odieuse.
*De fait, en ce qui concerne la situation présente, je me demande si nous ne sommes pas face à une sorte de point Godwin déguisé : en effet, une fois qu’on brandit la menace du pédophile, dans notre société, on met tout le monde de son côté. Cela me semble un dangereux moyen de stériliser le débat, mais surtout de désigner son adversaire (politique, idéologique, voire même personnel) avec un qualificatif si ignoble que tout le monde ne peut que se ranger à notre côté sans réfléchir, sans exiger de preuve.

Comme le mouvement semble prendre de plus en plus d’ampleur en France, je vous invite, au contraire, plus que jamais, à réfléchir et exiger des preuves. Et j’ai toujours aucune idée de ce que les satanistes foutent dans cette histoire.


En espérant avoir pu apporter un peu de lumière dans le chaos ambiant, je rends l'antenne, et on y retourne la semaine prochaine, car l'épidémie ne semble pas vouloir nous lâcher. En attendant, prenez soin de vous et des chercheurs qui bossent dur, et, autant que possible, restez chez vous.

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leon macnoussi
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sept. 2020 28 08:35

Re: Point COVID de la semaine

Message par leon macnoussi

#10

Voici des infos de Dendrobate Doctor et nous sommes ensemble pour faire l'état de la recherche sur l'épidémie de Covid-19.

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FAKE DE LA SEMAINE

Une fois n’est pas coutume, le fake de la semaine nous arrive tout droit de Belgique. Mais il concerne quand même la France. Relayée principalement sur WhatsApp (qui est décidément le mouton noir de cette saison), le pavé alarmiste stipule que les hôpitaux français toucheraient 5000€ de l’Etat par patient déclaré Covid, afin de faire monter les statistiques et de permettre la manipulation de la population.
Bon, outre le fait que si c’était vrai, les hôpitaux se porteraient bien mieux que ce n’est le cas actuellement, on peut légitimement se demander : attendez, qu’est-ce que les Belges viennent foutre dans l’histoire ? L’hypothèse la plus probable est la suivante : à la sortie de son confinement, la Belgique a adopté la stratégie de la « bulle sociale », c’est à dire l’interdiction, pour chaque foyer, de fréquenter plus d’un certain nombre de personnes extérieures. Ayant d’abord droit à 15, puis à 5 contacts rapprochés, identiques sur un mois, les Belges ont assez mal vécu cette mesure drastique, alors que l’épidémie était à son plus bas, post-confinement. Le gouvernement a donc décidé d’assouplir la mesure face à la grogne. Désormais, c’est chaque personne qui a le droit individuellement à 5 contacts rapprochés, qui doivent être toujours les mêmes sur l’ensemble du mois, les enfants ne sont pas comptés, et une dérogation est possible à 10 personnes, pour un évènement privé ponctuel. Sauf que depuis quelques jours, les données françaises inquiètent tout le monde. Désormais 3ème pays le plus touché au monde en nombre de cas quotidiens par habitants, nous sommes présentés comme un repoussoir, exemple de ce qu’il ne faut surtout pas faire, et nos voisins craignent que les nouvelles mesures chez nous (voir section « Qu’est-ce que putain de quoi ? ») ne se soldent aussi par le retour de mesures drastiques chez eux. Décrédibiliser nos statistiques, c’est donner moins de poids aux arguments de leur gouvernement.


DECOUVERTE DE LA SEMAINE

C’est une découverte assez mystérieuse qui va nous intéresser cette semaine. L’Institut Pasteur de Lille a annoncé avoir « découvert » une molécule particulièrement efficace contre le virus. Si je mets « découvert » entre guillemets, c’est parce qu’il s’agit d’une molécule déjà existante et commercialisée, qui bénéficie déjà d’autorisations de mise sur le marché (une bonne nouvelle pour la vitesse à laquelle elle peut être rendue disponible). Le Pr. B. Deprez à sa tête explique ainsi « Pris aux premiers symptômes de la maladie, ce médicament réduit la charge virale du porteur de la maladie, évite la contagion. Pris plus tard, il contrecarre ses formes graves. Son action est bien celle d’un anti-viral et non celle d’un anti-inflammatoire ».
Alors quelle est-elle, cette fameuse molécule ? Eh bien on ne saura pas pour l’instant. Pourquoi cela ? Parce que, échaudé par le scandale de l’hydroxychloroquine, l’Institut ne veut publier ses résultats qu’après avoir réellement fait la preuve de l’efficacité de son traitement, via un « essai clinique extrêmement rigoureux, respectant toutes les étapes de la procédure ». Le risque étant, en plus de l’effet pétard mouillé, de créer une rupture de stock car elle est produite par un petit laboratoire européen. B. Deprez insiste « Nous ne pouvons donner son nom. Les stocks sont limités et nous avons besoin de réserves pour l’essai clinique. Nous souhaitons également éviter toute frénésie. Si cela fonctionne, sa production sera augmentée dans la sérénité et non sur la base d’une demande sauvage. »
Mais alors, pourquoi en parler ? Parce que justement, l’Institut a besoin de fonds pour lancer son essai clinique. Ne vivant que à 25% grâce aux subventions publiques, tirant le reste des dons et des legs, l’Institut Pasteur de Lille espère, par cet effet d’annonce, recevoir assez de fonds pour mener à bien sa recherche. Auquel cas, et si les résultats sont concluants, l’accès à ce traitement serait prévu pour début 2021.
Source : Institut Pasteur de Lille


PISTES DE LA SEMAINE

*Génétique : 15% des formes graves de la maladie s’expliqueraient par une variante génétique chez le patient. Une alliance de chercheurs de l’Inserm, des universités de Paris, de Paris-Sorbonne, de Rockefeller et de médecins de l’AP-HP et du Howard Hughes Medical Institute a mis au jour un défaut d’activité des interférons de type 1, des antiviraux naturels du corps. Celui-ci a deux causes identifiées : une anomalie génétique abaissant la production de ces interférons (représentant 3-4% des formes graves, disponible ici : https://science.sciencemag.org/…/early/ ... /science.a…), et des maladies auto-immunes génétiquement induites qui bloqueraient l’action de ces molécules (pour 10-11% des formes graves, disponible ici : https://science.sciencemag.org/content/ ... ooXUI6UeSU). La mauvaise nouvelle : 1% de la population générale en bonne santé serait porteuse de ces mutations sans le savoir.
*Vaccination : pour contourner la lente mise au point d’un vaccin, la start-up Codagenix propose d’injecter directement le virus vivant mais « désorganisé », c’est-à-dire peu fonctionnel. Sa présence directe induirait une bien meilleure réponse immunitaire. Mais le risque de mutation est important et fait craindre un produit peu sûr. Futura-Science a produit ici (https://science.sciencemag.org/content/ ... ooXUI6UeSU) un article résumant les arguments des différents bords.


IMPASSE DE LA SEMAINE

Je vous conseille l’Impasse Casteggio, dans le 20e arrondissement de Paris. Mais sinon rien de bien probant.


MAUVAISES NOUVELLES DE LA SEMAINE

*France : ai-je besoin d’expliquer que depuis le temps qu’on annonce qu’on va dans le mur, il commence à nous chatouiller le bout du nez ? Après avoir franchi le cap des plus de 70.000 nouveaux cas hebdomadaires la semaine dernière (notre record absolu), tandis que le nombre de personnes en réanimation recommence à augmenter pour la 5ème semaine consécutive et que le nombre d’admissions à l’hôpital double toutes les deux semaines, de nouvelles mesures de restrictions sont tombées en France (et si vous avez rien compris, je reviens dessus dans la section « Qu’est-ce que putain de quoi ? »)
*Monde : le Covid aura bientôt fait 33 millions de malades et on approche dangereusement et sûrement du million de morts.


BONNE NOUVELLE DE LA SEMAINE

J’avoue cette semaine je sèche.



« QU’EST-CE QUE PUTAIN DE QUOI ? »

C’est sans doute l’expression qui vous est passée par la tête en voyant les annonces du gouvernement. On fait le point.
* « Pourquoi des restrictions de 10/30 personnes en extérieur ou en privé et rien pour les transports, c’est complètement con ! » : alors, en effet, il faudrait aussi des mesures pour les transports. Mais cette limite fait particulièrement sens quand on sait que la plupart des contaminations ont lieu entre amis ou en sorties/évènements familiaux, et non dans les transports ou les magasins. Les rencontres amicales ou familiales sont ainsi la 3ème source de clusters, représentant ainsi 12% des contaminations.
* « Et on fait quoi pour les deux premiers ? » : pour le premier, qui est l’entreprise (26% des contaminations), il est recommandé de privilégier à nouveau le télétravail. On ne peut que regretter que ce ne soit pas imposé partout là où c’est possible. Le second est le pôle établissements scolaires (16%), pour lequel rien ne semble avoir été décidé. Il est vrai que leur gravité est faible, mais quand même, ça vaudrait le coup qu’on s’y penche pour de vrai avant que ça nous explose au visage…
* « Mais du coup, pourquoi on ferme les bars (et les restaurants pour les zones les plus touchées), c’est quoi le rapport ? » : déjà, que les bars sont des lieux de sortie entre amis, et rentrent facilement dans le cas vu plus haut. Mais surtout que, comme vous le voyez, il manque ici des contaminations. Or, les études menées par le Centre américain de contrôle et prévention des maladies ont montré que les patients positifs étaient 2.4 fois plus souvent allé dans un bar les 14 jours précédents que les patients négatifs du groupe contrôle. En France, un cluster d’entreprise sur 5 est lié à la restauration, selon Santé Publique France. De manière générale, ce sont des lieux où on ne porte pas son masque, face à des gens et en milieu clos.
* « Ok, mais ça change pas selon l’heure ça, le Covid il sort pas que à 22h ! » : certes non, mais nous, nous changeons de comportement. Passé 22h, l’alcool aidant on parle plus fort (plus de projections), on se tient plus près (désinhibition) et on oublie les gestes barrière, le masque en particulier. 22h est effectivement une heure arbitraire, parce qu’il fallait bien en mettre une, ça aurait pu être 21h45 ou 22h18, mais c’était moins clair. Et si vous pensez que les gens iront juste se rassembler en after dans des lieux privés passée cette heure, c’est possible, mais l’interdiction de la vente d’alcool à emporter au-delà de 20h a été pensée pour minimiser ce risque.


POINT METHODE DE LA SEMAINE : le scientifique est-il un surhomme ?

Aujourd’hui, je vais réfléchir avec vous sur la remarque envoyée par un des lecteurs, et j’estimais que cela ferait une base intéressante. Voici donc, cité dans le texte.

« Que l'on arrête de présenter le scientifique comme un surhomme! Je suis toujours désolé de lire les scientifiques qui disent qu'ils n'ont pas de croyances (au sens généralisé de la/d'une psychologie, - La croyance désigne l'attitude intellectuelle d'une personne qui tient pour vrai un énoncé ou un fait sans qu'il y ait nécessairement une démonstration objective et acceptable de cette attitude.). » :
Les scientifiques ont en ce sens des croyances. Certains croient en Dieu, d’autres en la réincarnation, certains à la vie après la mort, d’autres non. En revanche, il importe de tenir nos croyances à distance de notre travail.
« Si les scientifiques explicitaient leurs croyances directes ou indirectes, ils se placeraient à égalité avec le commun des mortels, mais ils pourraient aussi expliciter en quoi ces croyances les "coincent" dans des schémas de découverte de la vérité. » :
Ils le font. Tout le temps. C’est d’ailleurs à ça que sert la revue par les pairs : quand une croyance nous « coince » et nous amène à une réponse erronée, il est rare que nous partagions la même avec nos collègues de labo ou avec les autres chercheurs du colloque. Les scientifiques sont ainsi les surveillants de croyance les uns des autres, car ils ne peuvent mathématiquement pas avoir tous la même.
« Exemple de croyances : La nature se donne à comprendre à l'homme au moyen de l'observation et de la raison. » :
La nature ne se donne rien du tout, mais je comprends ici l’idée. Sauf que cette formulation est erronée. Ce n’est pas « la nature » qu’il nous est possible de comprendre au moyen de l’observation, de la raison, de l’expérimentation et bien d’autres, c’est « la part de la nature qui est connaissable ». Il existe de l’inconnaissable (en physique et cosmologie on peut penser à ce qu’il y a au-delà de l’univers observable), mais ce n’est pas le domaine de la science, elle ne s’y intéresse pas.
« Tout homme est capable de se tromper (involontairement, erreur cognitive non motivée), tout homme est capable de se tromper ("involontairement", erreur motivée par des éléments non conscientisés). Nombre d'hommes sont capables de tromper les autres. La méthode scientifique partagée par une communauté très large offre dés lors une robustesse dans la démarche de découverte, non une infaillibilité. » :
Exactement, et c’est pour ça que tout chercheur digne de ce nom dira toujours que quelque chose est vrai « en l’état actuel des connaissances ». Parce que si ça se trouve on s’est planté. Mais c’est pas grave, on se plante tout le temps. Et ce n’est pas grave qu’on se plante justement parce que, ce qui est robuste, c’est la méthode scientifique, et cette méthode permet aussi bien de trouver la vérité que de découvrir nos propres erreurs passées et de les corriger.
« D'autres croyances qui concevraient que certains hommes ont un accès immédiat à la vérité peuvent être consistantes. Cependant, en général, les partisans de telles croyances se déclarent en accord avec les croyances de base du scientifiques pour nombre de situations. C'est (peut-être) en partant de là que l'on a fait /et l'on peut encore faire émerger la fragilité de l'hypothèse d'accès immédiat à la vérité du gourou et des croyances proposées par celui-ci. » :
Pour être très honnête, je ne suis pas convaincue d’avoir bien compris ce passage. Si, tel que je le comprends, il dit que ce que racontent les gourous a l’air cohérent au départ mais ne tient pas la route au final, et qu’on peut le montrer en partant des connaissances partagées, cela fait tout à fait sens. Mais il est dans ce cas faux de parler de « croyances scientifiques » puisque justement, comme dit plus haut, ce qui est scientifique, c’est ce qui a été démontré alors qu’une croyance ne l’est pas et ne peut pas l’être.
« Enfin, les scientifiques se plaignent d'être maltraités par le commun des mortels. Quelle suprise! Que leur font-ils d'abord? Et puis, dans la communication, je perçois cette incapacité à se décentrer pour prendre le point de vue de la cible. » :
Chers lecteurs qui vous posez sans doute la même question, posons ceci : lorsque vous harcelez des gens parce que vous n’êtes pas d’accord avec ce qu’ils disent, quand vous les insultez en public ou par message privé, quand vous les menacez de violence, de viol, de mort, quand vous vous en prenez à leurs collègues, leurs proches, leurs familles, quand vous envoyez des mails à leur laboratoire dans l’espoir de les faire virer et que vous diffusez leur adresse physique sur les réseaux dans l’espoir que quelqu’un de plus costaud que vous aille leur faire la peau, pensez-vous réellement que c’est à eux de se décentrer, qu’ils ne devraient pas être surpris et que, dans le fond, ça n’est pas vraiment un problème ? Si oui, je vous invite cordialement à dégager de cette page et ne plus jamais y revenir. Je n’ai pas envie de perdre plus de temps que j’en ai déjà perdu en dépôt de plainte.
« Au scientifique "moi je sais", j'attends que se substitue le scientifique "j'applique la méthode, et je CROIS que tous mes collègues et moi ensemble avons la meilleure chance de construire une représentation pertinente, fiable de la réalité. » :
Aucun scientifique, à part ceux qui disent qu’ils sont l’élite, ne vous dira « moi je sais ». Il dira « nous savons » quand il est très sûr (« nous savons que la gravité fonctionnera toujours demain et que si vous sautez par la fenêtre vous allez mourir », il n’y a pas lieu de dire qu’on croit cela), il dira « nous pouvons dire que », il dira « voici la meilleure explication que nous avons à l’heure actuelle », il dira « en l’état actuel de la science, voici la vérité ». Et rien de tout cela n’a quoi que ce soit à voir avec la croyance au sens on nous en parlions plus haut. Au lieu de « je crois » il faudrait dire « je pense ». Si vous croyez en Dieu, vous n’avez pas de preuves et vous n’en aurez jamais. Si vous pensez que le Sars-Cov2 mute peu, c’est parce que vous avez un faisceau de preuves, insuffisant pour une certitude mais déjà reposant sur des éléments de preuves. Si vous savez que la Terre tourne autour du Soleil et non l’inverse, c’est que le niveau de preuves suffisant pour écarter tout doute a été atteint.
« PS Il y a probablement des approximations ou pire. Pardonnez-moi, je ne suis pas philosophe des sciences. » :
Je ne le suis pas non plus. Mais cette question a été longuement débattue par ceux qui l’étaient et elle est bien tranchée. Si les chercheurs sont des hommes comme les autres, avec des croyances personnelles, la croyance est par définition exclue de la méthode scientifique. Il n’y a que ce qu’on sait, ce qu’on ignore et ce qu’on pense ou suspecte sur la base de preuves trop maigres pour entrer dans la première catégorie mais suffisantes pour sortir de la seconde.

En espérant avoir pu apporter un peu de lumière dans le chaos ambiant, je rends l'antenne, et on y retourne la semaine prochaine, car l'épidémie ne semble pas vouloir nous lâcher. En attendant, prenez soin de vous et des chercheurs qui bossent dur, et, autant que possible, restez chez vous.

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oct. 2020 05 03:31

Re: Point COVID de la semaine

Message par leon macnoussi

#11

Aujourd'hui, c'est dimanche. Voici des infos de Dendrobate Doctor et nous sommes ensemble pour faire l'état de la recherche sur l'épidémie de Covid-19.

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FAKE DE LA SEMAINE

Vous avez été plusieurs (techniquement deux, mais de fait ça fait plusieurs) à m’envoyer cette purge qu’est la dernière pétition à la mode (depuis quand la médecine se fait par pétition, sérieusement…) proposée, ce coup-ci, par les Belges (parce qu’il n’y a pas de raison que ce soit toujours nous les plus ridicules du monde francophone). La pétition en question est relayée sur Agoravox, un média dont la crédibilité est enterrée à côté de celle de FranceSoir.
La pétition s’insurge contre les recommandations d’intensifier la vaccination contre la grippe saisonnière cette année (pour rappel cette idée a deux buts : permettre de poser plus vite un diagnostic de Covid si le patient est vacciné contre la grippe et soulager la charge hospitalière). Le prétexte avancé est que le vaccin contre la grippe augmenterait le risque d’infection à coronavirus de 36%. Et la question qu’on se pose est « puisque nous n’avons jamais vécu un épisode de grippe saisonnière en même temps que la pandémie de Covid, d’où sort ce chiffre ? ». Pour le justifier, l’article avance 9 sources. Une est un simple lien dans lequel il faudrait voir une corrélation préoccupante, mais rien de factuel, je l’élimine donc. Deux sont des billets d’opinion écrit par des journalistes, je les considère donc également comme non probants. Que reste-t-il ?
Un premier article qui supporterait le fameux « risque d’infection au coronavirus majoré de 36% » chez les vaccinés. Pourtant si on prend la peine d’aller lire le papier, dans les résultats on trouve ceci « Receipt of influenza vaccination was not associated with virus interference among our population. » (Recevoir le vaccin contre la grippe n’a pas été associé à la survenue d’autres virus au sein de notre population ). C’est un résultat moyen, lors du détail des sous-groupes, il semblerait que le vaccin protège aussi contre d’autres virus que la grippe et affaiblisse légèrement la résistance face à d’autres mais la variabilité n’est pas statistiquement significative. Voilà, donc déjà ça, on oublie. Quoi d’autre ?
Un deuxième article qui montrerait que ce phénomène s’était déjà produit avec la grippe H1N1. L’étude en effet dit que, au Canada en 2009, ceux vaccinés avec la souche de grippe 2008 était tombés plus malades du H1N1. Mais si on fait bien son travail, dans l’article, on lit aussi ça « The finding of an association between prior receipt of 2008–09 TIV and an increased risk of pH1N1 illness is not conclusive and needs to be investigated further, particularly since some other observational studies conducted in other countries have reported that seasonal vaccination had no influence or may have been associated with reduced chances of pH1N1 illness. » (La découverte d’un lien entre une vaccination antérieure contre la grippe et une augmentation du risque de contracter le H1N1 n’est pas concluante et doit être investiguée plus en détails, en particulier car d’autres études observationnelles dans d’autres pays ont conclu que cette vaccination n’avait pas d’effet ou un effet protecteur contre le H1N1). Un tout beau cas de cherry-picking donc (on prend une étude dans notre sens et on tait l’existence de toutes les autres). Intéressant potentiellement mais pas super pertinent. Quoi d’autre ?
Trois articles expliquant que le vaccin contre la grippe ne protège de toute façon pas de la grippe et que même il rend plus contagieux. Bon. Le premier explique simplement que le vaccin des personnes âgées seul ne suffit pas à réduire la mortalité et que d’autres mesures (hygiène et vaccination des cas contact) doivent être envisagées. On le savait déjà un peu, c’est pour ça que les soignants se vaccinent. Le deuxième explique que le vaccin des individus jeunes et sains ne réduit pas la mortalité dans cette population. Ce dont on se doutait, puisqu’ils ne meurent déjà pas (en revanche ça réduit leurs jours d’arrêts de travail, signe qu’ils sont quand même moins malades). Le dernier explique que PARMI LES MALADES DE LA GRIPPE (et c’est un point important), ceux qui avaient été vaccinés exècrent plus de virus. Et c’est normal, car si vous arrivez à tomber malade en étant vaccinés, c’est que votre système n’est pas au mieux de sa forme, n’a sans doute pas réagi au vaccin ou n’a pas fait assez d’anticorps, rien d’étonnant donc à ce que le virus se multiplie plus dans votre corps. Donc ça on savait, quoi d’autre ?
Un dernier article dont ils se servent pour dire que franchement on emmerde le monde alors que seuls 0.01% des cas de grippe se compliquent suffisamment pour devoir être hospitalisés. Alors déjà, vous pouvez être très mal sans être hospitalisé, ma dernière grippe ça a été 4 jours de lit, une visite en urgence de SOS Médecin et un garde-malade qui a dû poser deux jours de congés pour s’occuper de moi. C’est pas parce que vous êtes pas hospitalisé que c’est pas grave. Mais surtout, dans l’article on trouve le chiffre de « 1 cas grave pour 1000 malades » et ça… ben ça fait pas 0.01% en fait, ça fait 0.1%, et se gourrer d’un facteur 10 quand on prétend avoir tout mieux compris que tout le monde c’est gênant. On estime qu’en moyenne, lors d’une épidémie 5% de la population va choper la grippe (c’est entre 2% et 10% selon les années). Pour la France, ça ferait donc 3.392.408 malades à des degrés divers (dont certains s’en rendront à peine compte) et donc 3.392 cas nécessitant une hospitalisation. C’est pas un chiffre ridicule à l’heure où on manque de lits.
Donc comme d’hab, on ne relaye pas les lettres ouvertes, les pétitions et autres tribunes, parce que si c’était de la bonne science éclairée, depuis le temps, ça se saurait.


DECOUVERTE DE LA SEMAINE

Pas de découverte majeure cette semaine.


PISTES DE LA SEMAINE

*Vaccin : l’Inserm recherche 25.000 volontaires pour participer à des essais cliniques de phase 3 sur des vaccins (les produits n’ont pas été explicitement nommés mais, pour raison de manque de transparence des données, les vaccins chinois et russe ont été exclus des protocoles). Si cela vous intéresse, le lien pour postuler est ici : https://www.covireivac.fr/
*Afrique : l’OMS a produit un rapport compilant les données de différents pays d’Afrique, expliquant pourquoi le continent est moins touché qu’on ne l’avait craint. Les principaux éléments sont : des mesures drastiques et rapides (limitations des déplacements de populations, interdiction des rassemblements), une moindre connectivité au monde (le continent est plus isolé des autres que l’Europe ou l’Asie par exemple), une population beaucoup plus jeune (seulement 3% de personnes de plus de 65 ans dans la plupart des pays africains), un mode de vie plus rural (avec un virus qui se transporte mal à l’extérieur et plus de distance entre les habitants) et plus familial (avec des personnes âgées à domicile et qui n’ont donc pas généré des clusters d’EHPAD comme ailleurs).
Source : OMS


IMPASSE DE LA SEMAINE

*Monde : l’épidémie, après un léger essoufflement en mai-juin, repart un peu partout. L’Inde a atteint ses 100.000 morts et le chiffre est sans doute sous-estimé. L’Espagne a confiné Madrid et des villes alentour, affectant 3.2 millions d’habitants qui ne peuvent plus quitter leurs quartiers sauf motif impérieux. Au Royaume-Uni aussi, restaurants et pubs sont contraints de fermer à 22h. L’Allemagne annonce des mesures régionales de restrictions, avec notamment interdiction des rassemblements de plus de 50 personnes pour les Länder dépassant le seuil de 35 cas pour 100.000 habitants (quand vous pensez que nous, ça commence à agir à partir de 100 cas pour 100.000 habitants, ça laisse songeur). En Italie, le port du masque est désormais obligatoire pour tous les élèves dès 6 ans, les attroupements sans masque sont punis d’une amende de 400€, et les restaurants ne restent ouverts qu’à condition que chaque client remplisse une fiche d’identification et de rappel, avec prise de température à l’entrée.


MAUVAISES NOUVELLES DE LA SEMAINE

*Paris : face à l’augmentation des cas et le remplissage des lits de réanimation, l’AP-HP envisage purement et simplement de supprimer les congés des soignants pour la Toussaint.
*France : il n’y a pas qu’à Paris que les effectifs commencent à être réquisitionnés. Déjà réactivé en métropole lyonnaise, aux CHU de Montpellier, Grenoble, Roanne et dans certains hôpitaux du Var et d’Alpes-Maritime, le blanc plan vient d’être redéclenché par les hôpitaux de Roubaix, qui font face à un afflux de malades difficile à gérer.



BONNES NOUVELLES DE LA SEMAINE

*France : Après l’application de mesures drastiques, on observe enfin un début d’embellie à Nice, légèrement à Marseille et surtout à Bordeaux, qui montre une progression de sa courbe très encourageante.
*USA : … on va pas se mentir, on l’entendait un peu tous. D. Trump est positif au coronavirus. Si peu d’infos filtrent sur l’état de santé du président, il a été admis à l’hôpital militaire et son état aurait suscité des inquiétudes avant d’aller vers un mieux. Espérons que, comme se fut le cas pour Boris Johnson, cette contamination soit à l’origine d’une prise de conscience et d’une meilleure gestion de l’épidémie dans le pays qui compte le plus de victimes au monde.


« QU’EST-CE QUE PUTAIN DE QUOI ? »

Il n’y a pas que les Belges dans la vie, il y a les Suisses aussi ! Les journalistes de Heidi News ont eu une idée formidable : menacés de violence et de mort régulièrement par les complotistes franco-suisses, ils ont infiltré un jeune journaliste dans ce qui est certainement le groupe complotiste le plus influent du monde helvétique et peut-être francophone. C’est bien simple, on dirait les Avengers : ils sont tous là ! Jean-Dominique Michel (dont on a déjà parlé ici) ? Check ! Christian Schaller (le médecin proche de Casasnovas qui prétend guérir le Covid par l’ingestion d’urine) ? Check ! François de Siebenthal (organisateur d’un référendum pour faire interdire SwissCovid, l’équivalent de StopCovid, et proche des QAnon) ? Check ! Chloé Frammery (qui a essayé d’importer le mouvement Gilets Jaunes en Suisse et créatrice d’Agora TV) ? Check ! Tous là je vous dis.
Il en ressort un feuilleton journaliste ahurissant, le bingo du grand n’importe quoi, en sept épisodes plus le papier de lancement (que vous pouvez trouver en accès libre ici : https://www.heidi.news/explorations/au- ... X7VyKzVWMI). Ils sont (sauf peut-être le premier) accessibles sur abonnement, ce qui pourrait être dommage, mais ayant récupéré des identifiants de connexion auprès d’un contact helvète, je vous ferai une synthèse de lecture dans quelques semaines, je pense que ça vaudra son poids en Milka. En attendant, sachez déjà que :
*Il existe une Suisse sous la Suisse, en tous points similaire, où le gouvernement cache les enfants enlevés à leurs familles pour que les pédocriminels viennent se servir
*Epstein était un agent du Mossad (parce que qu’est-ce qu’un bon complot si on ne peut pas taper sur les Juifs, je vous le demande)
*Peu importe le problème, c’est Satan qui est derrière tout ça (et entre le Covid, la 5G, les vaccins, Bill Gates et le Mossad, Satan a l’air d’être quelqu’un de très occupé)
*Christian Maillaud, le gendarme français actuellement en prison pour tentative d’enlèvement d’enfants n’a jamais commis de kidnapping, non, il a tenté de soustraire des enfants à des réseaux pédophiles sataniques (d’ailleurs il y a une levée de fond en cours pour l’aider à faire appel)
*SwissCovid sert à traquer la puce que vous ne portez pas encore et qui sera injectée dans le vaccin qui ne marche pas contre le Covid qui n’existe pas.
Tout. Va. Bien.


POINT METHODE DE LA SEMAINE : pourquoi les gens croient des trucs faux (sur Internet et ailleurs) ?

Une fois encore, le point méthode de la semaine va faire suite à un message reçu d’un lecteur. Il me pose, parmi d’autres, la question suivante « […] pourquoi autant de gens versent dans un obscurantisme destructeur. Certains de mes amis commencent à être polués par ces thèses , je n'ai pas de mode d'emploi pour réagir avec eux... ». Le lecteur qui pose cette question souffre lui-même de séquelles (probablement, avec tout le conditionnel lié au fait qu’on connait encore très mal cette maladie), et la dérive de ses proches est d'autant plus préoccupante qu'ils ont un exemple vivant et familier sous les yeux. Alors, pourquoi autant de gens adhèrent à des idées au mieux farfelues au pire dangereuses et destructrices ?
Bien sûr, vous vous en doutez, je ne vais pas pouvoir vous fournir une réponse unique et définitive ni un mode d’emploi parfait. Mais je vais évoquer ici des raisons et des pistes de réflexions qui, je l’espère, aideront ceux de mes lecteurs dans cette situation à se sentir moins désemparés.
*Pour que le monde soit juste : on a tous envie de vivre dans un monde juste, un monde où tout tourne bien pour les gens qui font tout comme il faut, où les méritants et généreux sont récompensés et les malveillants punis. Sauf que le monde n’est pas juste, et quand cela arrive à grande échelle (une catastrophe naturelle, une épidémie, une crise économique etc.), tout cela parait tellement injuste qu’il est tentant de chercher un coupable. On peut prétendre que des gens répandent volontairement la maladie (le labo secret de Wuhan pour nous, les Juifs pour la Grande Peste), organisent la ruine des honnêtes travailleurs (les Francs-Maçons et/ou Bill Gates pour nous, les Juifs pour l’Allemagne pré-seconde guerre mondiale), voire même, si on est un peu sensibles aux explications surnaturelles, provoquent des catastrophes en punition de leur mécréance ou de leur péché (si je vous dis que c’est encore tombé sur les Juifs, ça vous étonne ? Rassurez-vous, de nos jours, il y a aussi les femmes en jupe courte qui provoquent des tsunamis et les homosexuels qui sont la cause des tornades…). Parce qu’il est plus facile de chercher des coupables que d’admettre que le monde est injuste, que vous pouvez mourir du cancer du poumon sans jamais avoir fumé de votre vie et que votre fille sera peut-être fauchée dans la fleur de l’âge sur un passage piéton par un chauffard ivre qui s’en sortira sans blessure.
*Pour que le monde ait du sens : voir des complots partout, c’est voir des patterns, des schémas, des organisations qui font que le monde est ce qu’il est pour des raisons compréhensibles à défaut d’être bonnes. Et c’est bien plus rassurant que l’hypothèse la plus probable, à savoir que rien n’a vraiment de sens, personne n’est réellement une créature précieuse voulue par un dieu omnipotent ou une mère nature généreuse, personne n’est en charge de ce gigantesque bazar cosmique, le monde est absurde, la vie est absurde et l’univers se fiche de notre présence. Et ça, c’est compliqué à avaler, quand même.
*Pour avoir du contrôle : s’il y a un sens et s’il y a des coupables, alors, si notre vie est pourrie c’est la faute de quelqu’un ou quelque chose sur qui on peut agir ou tenter d’agir. Vous remarquerez ainsi que aucune théorie obscurantiste n’est fataliste, du genre « c’est ainsi, on ne peut rien y faire », il y a toujours un moyen d’agir, un moyen de se « révolter ». Ces croyances permettent de lutter contre le sentiment d’impuissance lorsque quelque chose qui arrive nous écrase : notre entreprise ferme, notre mère a un cancer, notre femme nous quitte. Dans le monde des croyances et des conspirations, on est sabotés par les reptiliens parce qu’on en savait trop, un remède efficace existe que Big Pharma nous cache et il est possible de raviver magiquement la flamme de l’amour. Dans le monde réel, vous êtes une victime parmi d’autre d’un système économique aveugle, votre maman va mourir et votre femme ne reviendra jamais. Et ce monde là est trop dur.
*Pour y comprendre quelque chose : les théories du complots sont généralement des explications très simples à des problèmes très compliqués. C’est compliqué, la crise économique (moi-même j’y panne rien), mais brandir le Nouvel Ordre Mondial et dire que tout ce qui arrive arrive parce que c’est « voulu et pensé », c’est facile. C’est compliqué une épidémie (si vous suivez mes posts, vous commencez à bien le savoir), mais dire que c’est, au choix, un mensonge d’état, ou alors une maladie pour laquelle existe un remède qu’on nous cache, c’est facile. C’est pour cette raison aussi que vous voyez de plus en plus fleurir des fausses médecines avec « quantique » dans le nom : parce que personne ne comprend rien à la physique quantique, mais s’en servir comme si c’était un procédé magique qu’on fourre dans tout, c’est facile.
Pour aller plus loin, je vous conseille les vidéos de très bons vulgarisateurs sur le sujet :
Sur le « quantique » partout




Sur la désinformation sur Internet




Sur la croyance en un monde juste






En espérant avoir pu apporter un peu de lumière dans le chaos ambiant, je rends l'antenne, et on y retourne la semaine prochaine, car l'épidémie ne semble pas vouloir nous lâcher. En attendant, prenez soin de vous et des chercheurs qui bossent dur, et, autant que possible, restez chez vous.

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Re: Point COVID de la semaine

Message par leon macnoussi

#12

Aujourd'hui, c'est dimanche. Voici des infos de Dendrobate Doctor et nous sommes ensemble pour faire l'état de la recherche sur l'épidémie de Covid-19.

The conspiracy chart.jpg
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FAKE DE LA SEMAINE

Cette semaine, histoire de varier les plaisirs, on va parler d’une députée bien de chez nous. Martine Wonner (exclue LREM, ex-EDS, ex-LT, tout ça en une seule année) a fait cette semaine des déclarations à l’assemblée qui ont fait réagir et pour cause.
Tout d’abord, elle explique qu’il faut arrêter de dire qu’il n’y a pas de traitement contre le Covid, que la combinaison hydroxychloroquine et azithromycine fonctionne (elle avait déjà prétendu l’avoir prouvé en publiant une étude tellement mauvaise que le seul journal qui avait accepté de la publier était… la même revue prédatrice qui avait publié l’étude-canular sur la réduction des accidents de trottinettes grâce à l’hydroxychloroquine) et que c’est pour ça que la Belgique allait ré-autoriser le traitement. L’agence nationale de santé belge a démenti cette information.
Dans la même intervention, elle explique que le Centre for Disease Control américain a reconnu que les masques ne servaient à rien et étaient une mesure sanitaire inutile. Sauf que la dernière mise à jour du site de cet organe, le 5 octobre, explique au contraire que le virus peut bel et bien être aéroporté et réitère sa recommandation de porter un masque, qui couvre bien le nez et la bouche. C’était vérifiable en quelques secondes. Mais du coup d’où sort cette information ? Je vous jure que c’est pas moi qui fait une obsession, mais le fake est sorti tout droit d’un post de QInfos… le site francophone de désinformation lié aux QAnon. Encore.
Rappelons que Martine Wonner était déjà à l’origine du collectif « Laissons les médecins prescrire » qui réclamait le droit de prescrire de l’hydroxychloroquine alors qu’aucune étude n’avait montré encore un quelconque bénéfice, et qu’elle vient juste de rejoindre « Bon Sens » (mais ça on en parle dans la section « Qu’est-ce que putain de quoi » de la semaine).


DECOUVERTE DE LA SEMAINE

L’agence coréenne de contrôle et de prévention des maladies (KDCA) a déclaré cette semaine que neuf personnes sur dix ayant été malades puis guéries du Covid développait des séquelles à moyen et/ou long terme. Le chiffre de 91.1% avancé par l’agence est cohérent avec les résultats des études menées sur la France (https://science.sciencemag.org/content/ ... DIemvPzbXQ), l’Italie (https://jamanetwork.com/journals/jama/f ... 7VfGOt-nuQ) ou encore le Royaume-Uni (ici il s’agit encore seulement d’un pré-print https://www.medrxiv.org/content/medrxiv ... JCEKwOFhiY). Toutes les informations commencent donc à pointer en direction d’une maladie qui, si elle présente un faible risque de mortalité, en particulier chez les populations jeunes, pourrait lourdement affecter l’existence de la plupart des malades, même ceux ayant apparemment guéris sans problème.
Les séquelles les plus fréquentes sont une fatigue chronique (26.2%) et des difficultés importantes de concentration (24.6%). Suivent ensuite des troubles aussi variés que des troubles mentaux, la persistance de la perte de goût et d’odorat, ou encore une capacité respiratoire altérée.
Aucune de ces cohortes ne comportait d’enfant, la situation est inconnue en ce qui les concerne.


PISTE DE LA SEMAINE

*Institut Pasteur de Lille : si vous vous souvenez, l’Institut avait appelé aux fonds pour tester une molécule très prometteuse, dont il se refusait à dévoiler le nom avant d’avoir des essais cliniques solides à l’appui, afin de ne pas créer de pénurie. Les tests en question vont pouvoir commencer après que le groupe LVMH ait mis 5 millions d’euros sur la table cette semaine. Espérons qu’ils seront fructueux.



IMPASSE DE LA SEMAINE

*Pénurie : les autorités sanitaires françaises s’inquiètent du risque de pénurie du vaccin contre la grippe. Habituellement boudé par la population, les intentions de vaccination montrent cette année un intérêt jamais vu, cohérent avec les recommandations des médecins à son sujet. Malgré une augmentation de 30% de la production, le risque de pénurie est réel et les autorités sanitaires appellent médecins et pharmaciens à prioriser les publics fragiles.



MAUVAISE NOUVELLE DE LA SEMAINE

*Reconfinement : une note interne de l’Elysée indique que le gouvernement, en accord avec l’avis du conseil scientifique, envisage désormais la mise en place de reconfinements localisés pour lutter contre l’épidémie. Ces mesures concerneraient les zones d’alerte maximale qui basculeraient en état d’urgence sanitaire. Paris, Marseille, Lille et Lyon sont particulièrement dans le collimateur.


BONNE NOUVELLE DE LA SEMAINE

*Immunité : Bien que lentement, l’immunité progresse en France. Les résultats de l’étude EpiCov et Sapris (toutes deux présentées sur Santé Publique France ici https://www.santepubliquefrance.fr/les- ... k77tMiEJ0Q) indiquent que fin mai, 3 millions de Français avaient développé des anticorps. Les taux varient énormément d’une région à l’autre (avec 9% pour Paris et 10.8% pour le Haut-Rhin contre seulement 1.5% en Bourgogne-Franche-Comté ou 2% en Nouvelle-Aquitaine) mais ne laissent toutefois pas envisager rapidement une immunité collective, qui nécessite au moins 75% de la population immunisée.


« QU’EST-CE QUE PUTAIN DE QUOI ? »

Après les Avengers du complot en Suisse, voici les Avengers des conspis en France ! Le groupe « Bon Sens », nouvellement crée, est un florilège de ce qui se fait de plus n’importe quoi dans notre beau pays. Destiné à engager des “actions juridiques ordonnées” , des “débats contradictoires” ou des “élaborations d’avis” sur la crise, le groupe surprend d’abord en ce fait qu’il a déjà lancé des appels à cotisations avant même d’être enregistré. Oui car si je parle de groupe et non d’association comme eux le font, c’est parce que, au début de cette semaine en tout cas, aucune trace de l’association ni à son tribunal de secteur (Illkirch Graffenstaden) ni au tribunal de Strasbourg. Le groupe propose pourtant depuis le 25 septembre des adhésions de 5€ à 1000€ via son compte HelloAsso…
Bon, et qui est derrière tout ça ? Et bien les membres fondateurs sont :
*Xavier Azalbert, directeur et seul membre de la rédaction de FranceSoir, qui a publié tellement de fake news depuis le début de l’épidémie que NewsGuard lui a retiré le statut de journal d’informations (j’en ai déjà parlé dans l’Echo des Labos du 21 juin)
*Martine Wonner, dont on a parlé dans le fake de la semaine
*Gérard Guillaume, celui qui en mai expliquait que « il n’y a pas de deuxième vague, l’épidémie est finie » (il l’a déclaré à plusieurs reprises dont ici



*Christian Perrone, qui a produit des études tellement frauduleuses sur l’hydroxychloroquine que ce sont les membres de sa propre équipe qui ont contacté le journal pour les faire retirer parce que ça salissait leurs noms (j’en ai déjà parlé dans l’Echo des Labos du 24 mai) et il a même droit à sa fiche sur Conspiracy Watch (ici https://www.conspiracywatch.info/christ ... RI0cX5DFfU)
*Corinne Reverbel, qui a régulièrement collaboré sur FranceSoir pour défendre le traitement de Raoult avec une mauvaise foi qui frise le déni (genre ici http://www.francesoir.fr/societe-scienc ... 6du6hlVUSA)
*Julien Cantoni, sur qui je n’ai rien trouvé de spécial, qui a l’air d’être le monsieur numérique du groupe
*Silvano Trotta, complotiste notoire, adepte des chemtrails, du « on a jamais marché sur la Lune », des ovnis, anti-vax et également fiché sur Conspiracy Watch (ici https://www.conspiracywatch.info/silvan ... iv6YN5MjJY)
*Arnaud Upinsky, pseudonyme de Henri Hedde d'Entremont, qui prétend que le suaire de Turin est authentique, que c’est bien celui de Jésus et que c’est lui qui l’a prouvé
*Jean-Luc Duhamel, sur lequel je n’ai pas trouvé grand-chose non plus notamment parce qu’il y a des homonymes et cela rend compliqué de savoir de qui ont parle
*Alexandra Henrion Caude, généticienne avec qui l’Inserm a pris ses distances notamment car elle affirme qu’il est possible de démontrer l’existence de l’âme d’un embryon, également fichée sur Conspiracy Watch, parce que y a pas de raison (ici https://www.conspiracywatch.info/alexan ... iv6YN5MjJY)
Je ne saurai trop vous recommander de vous tenir loin de ce groupe si vous voulez éviter de gravir des échelons dans la pyramide des croyances hors-sol.


POINT METHODE DE LA SEMAINE : le postulat, qu’est-ce que c’est ?

Une fois encore, je vais adresser aujourd’hui la question d’un lecteur. Mais avant ça, je voudrais mettre un point au clair. Si je m’efforce de répondre à chacun de vous qui m’écrit (en particulier quand vos questions sont personnelles ou inquiètes), comprenez bien que j’ai désormais plus d’un millier d’abonnés et je ne peux pas répondre à tout le monde.
Encore moins quand vous m’écrivez des pavés énormes, me demandant de vous expliquer des points entiers de méthodologie, de défendre les positions scientifiques ou de démentir du contenu de désinformation.
Encore moins quand ces questions sont posées sur des tons semi-agressifs, me « sommant » de vous expliquer ce qui vous parait être une faille si évidente, à vous, qu’il faut vraiment que les chercheurs soient idiots pour ne pas s’en être aperçus. Ça ne m’incite guère à la patience.
Je vais donc vous proposez des pistes. Si vous estimez réellement avoir à vous seul mis le doigt sur une faille dans la méthode scientifique que des armées de chercheurs de tous les pays ayant fait au moins 8 ans d’études n’ont pas su voir, faites une thèse sur le sujet, le monde en sortira grandi. Si vos questions et interrogations sont sincères, vous pouvez toujours les poser, en ayant en tête que vous n’aurez pas forcément de réponse individuelle et que si le point que vous soulevez est intéressant, cela fera sans doute l’objet d’un paragraphe public, comme ici. Si enfin vous vous passionnez réellement pour la méthodologie, la philosophie des sciences et l’épistémologie, prenez des cours, il y a de plus en plus de plateformes en accès libre qui vous fourniront du contenu clair et sourcé, pour lequel leurs auteurs auront été soutenus et parfois même rémunérés, ce que je ne suis pas, et je n’ai pas vocation à dispenser gratuitement des cours par messages privés.
Une fois cela dit, examinons donc la question « Question principale: La démarche scientifique telle que vous la pratiquez se fonde-t-elle sur des postulats? Si oui, en quoi, pour vous, le postulat ne répond-il pas à la définition de croyance? » La réponse à cette question est un peu délicate parce que la manière même dont elle est formulée montre que la personne a une idée bien arrêtée mais fausse de ce qu’est un postulat. Ce terme a en réalité plusieurs sens.
*Au sens strict, on ne parle de postulat qu'en mathématiques. C’est un principe « non démontré utilisé dans une construction car légitime, intuitivement incontestable et se basant sur l’expérience ». « Par un point donné et parallèlement à une droite donnée passe une et une seule droite » est un postulat dans la géométrie d’Euclide. Il n’était pas démontré mais sans doute que celui qui affirme le contraire n’est pas bien parti pour avoir son bac.
*Au sens plus général, un postulat peut être confondu avec une « hypothèse de travail » lorsqu’on est face à un problème trop grand. Par exemple, dans le cas d’une maladie émergente, pour aller plus vite, on pourrait répartir les chercheurs en trois groupes, l’un partant du postulat que c’est une bactérie, l’autre que c’est un virus, le troisième un parasite. A partir de là, notre groupe se basant sur le postulat d’une bactérie joue un jeu « on ferait comme si c’était une bactérie » et va émettre des hypothèse (anaérobie, antibiorésistante etc.) qu’il va tester. Mais il n’y a aucune croyance là-dedans, il est question de choisir une piste de travail, et si le groupe virus obtient des résultats, tout le monde se rabattra là où il y aura des preuves (car ce sont toujours les preuves qui comptent).
*Enfin, dans la situation qui me concerne, on peut appeler en science un postulat un point sur lequel notre démonstration/hypothèse/expérimentation/théorie se base et qui n’est pas démontré AU SEIN MEME de ce travail. Chaque fois que j’écris sur les rats, je ne vais pas redémontrer la théorie de l’évolution, re-justifier le fonctionnement de la classification taxonomique et re-prouver que le rat est bien un mammifère. Je vais partir du principe que ces choses, parce qu’elles ont été démontrées avant moi, sont vraies. Il n’est donc pas question de croyance non plus puisque la définition du postulat dans ce cas indique qu’il est démontré avant par d’autres.
En réponse donc, en quoi le postulat ne répond-il pas à la définition de la croyance, j’ai envie de dire que c’est dans la définition même : soit c’est une hypothèse de travail auquel on accorde aucun crédit jusqu’aux preuves, soit c’est une information tenue pour vraie parce qu’elle a été démontrée et éprouvée ailleurs par d’autres dans le passé. (Soit c’est des maths, mais pour les maths, je laisserai les collègues expliquer, je doute d’en être moi-même capable).


En espérant avoir pu apporter un peu de lumière dans le chaos ambiant, je rends l'antenne, et on y retourne la semaine prochaine, car l'épidémie ne semble pas vouloir nous lâcher. En attendant, prenez soin de vous et des chercheurs qui bossent dur, et, autant que possible, restez chez vous.

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oct. 2020 18 23:00

Re: Point COVID de la semaine

Message par leon macnoussi

#13

Aujourd'hui, c'est dimanche. Voici des infos de Dendrobate Doctor et nous sommes ensemble pour faire l'état de la recherche sur l'épidémie de Covid-19.

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FAKE DE LA SEMAINE

Une fois n’est pas coutume, cette semaine on ne va pas parler d’un fake, mais de lutte contre les fakes. YouTube, qui est quand même un bastion de la désinformation (dois-je rappeler que nous vivons dans un monde où Casasnovas, le mec qui explique que les diabétiques peuvent se passer d’insuline en buvant les bons jus de fruits, a un demi-million d’abonnés ?), a décidé, sans doute un peu forcé, de faire le ménage sur sa plateforme.
Elle a donc commencé par supprimer toutes les vidéos MONETISEES (et c’est important) indiquant que le vaccin contre le Covid (le jour où il existera, parce que pour l’instant, on est pas rendus) peut tuer, stériliser ou implanter des puces électroniques. L’idée étant que personne ne doit pouvoir faire d’argent en diffusant de fausses informations qui mettent les gens en danger.
La plateforme avait déjà fait un premier ménage depuis février, supprimant 200.000 vidéos jugées dangereuses ou trompeuses sur le Covid.
De son côté Facebook semble vouloir aussi se racheter une virginité sur le sujet (salut Mark, comment ça va ? la forme ?) en interdisant les publicités et posts payés qui décourageraient les internautes de se faire vacciner contre le coronavirus (si tant est, encore une fois, que ce vaccin existe un jour).
Alors, vaste question : la suppression des contenus est-elle une bonne solution ? La communauté des vulgarisateurs est partagée à ce sujet, avec d’un côté le risque d’un appel à la censure, disant que « si ILS nous suppriment, c’est bien qu’on a raison » et de l’autre le risque que des gens influençables soient exposés à du contenu dangereux (cf. l’exemple de Casasnovas et du gamin diabétique qu’il a envoyé aux soins intensifs…). Je n’ai pas d’avis tranché sur la question pour être honnête, mais je pense que la suppression des contenus qui rapportent de l’argent uniquement (et pas les autres) peut être un juste milieu : peut-être que moins de charlatans produiront ces contenus si ça leur rapporte moins…


DECOUVERTE DE LA SEMAINE

Plus qu’une découverte à proprement parler, la grosse avancée de la semaine c’est la classification du Covid en 6 formes de maladies distinctes, avec des niveaux de gravité différents (et je vous vois venir, donc je vous arrête tout de suite : il est question de formes prises par la MALADIE, ça n’a rien à voir avec une éventuelle mutation du virus qui serait par hasard moins dangereux qu’avant juste quand ça arrangerait plein de gens de faire l’autruche pour ne pas se plier aux nouvelles restrictions sanitaires…)
L’étude est disponible ici (https://www.medrxiv.org/content/10.1101 ... NtgUEkLU-4) et elle identifie, basée sur les données de 1653 patients, les formes suivantes.
*Paucisymptomatique (type grippal sans fièvre) : une forme non compliquée alliant maux de tête, perte d’odorat, toux, maux de gorge et douleurs musculaires. La forme pourrait toutefois avoir des séquelles, comme la non-récupération (à terme ignoré) de l’odorat.
*Bénigne (semblable au type 1 mais avec fièvre) : une forme non compliquée combinant les symptômes précédents avec de la fièvre et une perte d’appétit. Les sujets très âgés ou vulnérables doivent être surveillés en raison de ces deux derniers symptômes.
*Légère (type gastro-intestinal) : une forme non compliquée alliant diarrhée, perte d’odorat, perte d’appétit, maux de tête, maux de gorge et douleurs thoraciques sans détresse respiratoire. Il n’y a en général pas de toux et les sujets fragiles doivent être surveillés, notamment face au risque de déshydratation et dénutrition et hospitalisés si besoin.
*Modérée (type fatigue) : une forme alliant grande fatigue, maux de tête, perte d’odorat, toux, douleurs thoraciques et fièvre. Un nombre assez important de sujets seront hospitalisés et 8.6% d’entre eux auront besoin d’assistance respiratoire.
*Grave (semblable au type 4 mais avec confusion) : une forme combinant les symptômes précédents auxquels s’ajoutent une confusion mentale, plus ou moins importante en fonction du degré d’hypoxie et des atteintes nerveuses Un nombre important de sujets seront hospitalisés et 10% seront placés sous assistance respiratoire.
*Sévère (type abdominal et respiratoire) : une forme alliant maux de tête, fièvre, perte d’odorat, perte d’appétit, toux, mal de gorge, douleurs thoraciques, essoufflement, diarrhée, douleurs abdominales, douleurs musculaires, confusion mentale et fatigue importante. Environ 50% des sujets devront être hospitalisés, environ 20% auront besoin d’assistance respiratoire.


PISTE DE LA SEMAINE

*Aéroportage : après des mois de doutes à ce sujet, le CDC semble avoir tranché. Le virus est dans l’immense majorité des cas transporté par les gouttelettes de salive mais peut, dans le cas d’une pièce fermée non ventilée ayant contenu un malade et une personne saine de manière prolongée, être aéroporté. De nouvelles guidelines prenant cet aspect en compte ont été publiées ici : https://www.cdc.gov/coronavirus/2019-nc ... oyKJ-Yvyb0


IMPASSES DE LA SEMAINE

*Solidarity : la totalité des résultats de l’étude en ce qui concerne la branche « antiviraux » est tombée. Le résultat est sans appel : RIEN ne marche. Si le Remdesivir a un léger effet sur la durée d’hospitalisation, il ne réduit pas la mortalité, pas plus que l’interféron ou le Lopinavir. Sans surprise, l’hydroxychloroquine, elle, aggrave l’état des patients. Les résultats sont dispos ici : https://www.medrxiv.org/content/10.1101 ... HWKjgXxplI
*Immunité : l’immunité collective, mes amis, ça n’est pas pour demain, et sans doute pour jamais. Alors que les cas documentés et attestés de réinfections commencent sérieusement à flamber (voir section « Mauvaises nouvelles de la semaine »), une étude publiée dans Immunity (et disponible ici : https://www.cell.com/immunity/fulltext/ ... ZFteSSQUNE) tend à montrer que l’immunité (en tout cas l’immunité naturelle, voir section « Point méthode de la semaine ») ne dure que 5 à 7 mois. Si vous faites le calcul, ça veut dire que à partir de maintenant, les malades de la première vague qui l’ont choppé début mars peuvent à nouveau l’avoir. Si cette donnée se confirme, toutes les stratégies visant à rechercher une immunité de groupe de la population par des moyens non-médicaux sont purement et simplement vouées à l’échec.


MAUVAISES NOUVELLES DE LA SEMAINE

*Ré-infection : nous avons recensé cette semaine le 15e cas avéré de réinfection au monde. Un chiffre sans aucun doute très largement sous-estimé, puisque pour rejoindre ce cercle très privé il faut : avoir été hospitalisé pour Covid, testé positif au virus, guéri, testé négatif à au moins 2 reprises après disparition des symptômes, à nouveau malade avec des symptômes et re-testé positif au virus. Clairement, tous les patients ne passent pas par ce parcours. Si vous voulez en savoir plus, vous trouverez (ici : https://www.thelancet.com/journals/lani ... I5P9bWG8k0) une analyse du phénomène par Dr. A. Iwasaki, du département d’Immunologie de Yale.
*France : un couvre-feu a été déclaré pour un minimum de 4 semaines pour les métropoles de Marseille (déjà en alerte maximale depuis un petit moment), Lille, Lyon, Saint-Etienne, Grenoble, Montpellier, Toulouse, Paris + petite et grande couronnes (déjà en alerte renforcée) ainsi que Rouen, dont la situation s’est dégradée très brutalement. Bordeaux échappe aux restrictions du fait d’une inversion de sa courbe constatée après une première vague de mesures radicales.
Source : Santé Publique France
Pour ceux qui en auraient besoin et ne sauraient pas où la trouver, la dérogation pour déplacements pendant le couvre-feu est à remplir ici : https://media.interieur.gouv.fr/attesta ... 2NSlQbmeTA
*Europe : il n’y a pas que chez nous que ça barde. En Suisse le port du masque est désormais obligatoire dans tous les lieux publics fermés, les rassemblements de plus de 15 personnes dans l’espace public sont interdits, les manifestations privées de plus de 15 personnes fortement réglementées (entendez que vous obtiendrez peut-être une dérogation pour des obsèques mais vous pouvez vous asseoir sur votre mariage) et le télétravail recommandé, afin de contenir un rebond important des cas. La République Tchèque, relativement épargnée par la première vague, se retrouve à construire un hôpital de campagne en périphérie de Prague pour faire face à ce qui est, actuellement, le plus fort taux de décès par habitants du continent. En Pologne, écoles, collèges et lycées ferment les uns après les autres, bars et restaurants doivent fermer à 21h, les cérémonies de mariage sont interdites jusqu’à nouvel ordre et le nombre de personnes est limité pour les magasins, les transports et les offices religieux. Au UK, le pays le plus endeuillé d’Europe, les réunions en intérieur sont interdites entre amis et parents de différents foyers dans plusieurs zones pour un total de 11 millions de personnes concernées.


BONNE NOUVELLE DE LA SEMAINE

*Monde : il y a quand même des pays qui s’en sortent pas trop mal. Israël a entamé dimanche la première étape de son déconfinement progressif, Melbourne commencent à assouplir ses restrictions, la Corée du Sud a aplati sa seconde vague et la Nouvelle-Zélande râle parce qu’ils ont eu un nouveau cas hier et ça leur pète leur combo.


« QU’EST-CE QUE PUTAIN DE QUOI ? »

J’avais qualifié il y a peu (peut-être la semaine dernière, je me perds dans mes posts parfois) de 4 bras cassés de l’Apocalypse Raoult, Perrone, Toussaint et Toubiana. Comme quoi ce n’est pas moi qui voyais entre eux un lien fort de désinformation qui n’existait pas, ils sont depuis cette semaine affublés du surnom de « rassuristes » par leurs confrères qui commencent sérieusement à en avoir marre de les voir trafiquer les données sur les plateaux télé.
Hé bien, mes amis, il ne faut jamais perdre espoir, comme quoi ! Depuis quelques jours/semaines selon les journaux, il semblerait que les médias aient enfin pris conscience qu’ils avaient peut-être un peu beaucoup trop démesurément donné à ces gens tout le temps d’antenne qu’ils ne méritaient pas. Après le coup de gueule du Dr N. Peiffer-Smadja du service infectiologie de Bichat (« Franchement, leur donner la parole, c’est comme inviter Dieudonné à parler de tolérance ! Beaucoup essaient de s'appuyer sur des données et d'apporter des informations mesurées, d'autres ne s'appuient sur rien et se camouflent derrière des opinions. Une épidémie qui augmente, ça devrait faire consensus ! ») de nombreux médias TV ont décrété qu’il n’était désormais plus question de les recevoir sur leur plateau sans avoir un contradicteur éclairé. FranceInfo déclare désormais refuser de leur donner la parole sans étude fiable et chiffres sourcés à l’appui (« on a très clairement un devoir particulier et une attente du public qui ne pardonnerait pas de spectaculariser, a fortiori sur un sujet pareil » indique S. Guillin, patronne de la chaîne).
Mais la plus grosse surprise, celle qui m’a conduite à refaire une cafetière alors qu’il est 18h, vient, ni plus ni moins, de BFMTV. Oui, ceux qui ont donné des interviews fleuves de D. Raoult, qui ont teasé chacune de ses apparitions de la manière la plus outrancière possible, qui l’ont laissé dire en plateau « Des infections respiratoires dans lesquelles il y a des secondes vagues, il n'y en a pas. Je ne vois pas pourquoi il y en aurait pour celle-là. », ce BFMTV là. Et bien celui-là a décrété que, en raison de leurs erreurs successives, mais de leur ton qui reste catégorique, de leur manipulation des chiffres et des menaces que subissent ceux qui les contredisent à chaque interview, les « rassuristes » étaient désormais privés d’audience chez eux et priés d’aller parler ailleurs.
BFMTV fait du boulot de journalisme... je vais me refaire un café tiens.
Ai-je dit que le monde était un endroit très étrange ?
Source (pas la plus exhaustive mais les autres sont sur abonnement) : https://www.leparisien.fr/culture-loisi ... I5P9bWG8k0


POINT METHODE DE LA SEMAINE : comment faire un vaccin contre une maladie non-immunisante ?

Je vois beaucoup passer cette question ces temps-ci, à mesure que les preuves s’accumulent d’une immunité plutôt…meh… on va dire. « Comment un vaccin pourrait-il nous immuniser là où notre corps ne le peut pas ? » Je vous rassure c’est possible, mieux : on l’a déjà fait. Plusieurs fois. Petit tour d’horizon.
Si comme moi vous êtes une flamboyante personne ayant passé l’apogée de la jeunesse et entrant dans la force de l’âge (vous avez un peu plus de 25 ans quoi), vous devez être à jour/faire votre rappel de votre DTPCoq pour Diphtérie, Tétanos, Polio, Coqueluche. A noter que vous avez également un rappel lors de votre marche sereine vers la maturité (45 ans) et un tous les 10 ans à compter de votre entrée dans le noble âge de la sagesse (65 ans). Ce vaccin est particulier pour les deux premières pathologies contre lesquelles il protège (avec succès). La diphtérie et le tétanos sont en effet des maladies non-immunisantes : vous pouvez les attraper 10 fois ça changera rien (mais vu la mortalité de 30% du tétanos même dans nos pays technologiques et équipés, je vous déconseille de tenter). Je vais m’intéresser plus précisément à la diphtérie, car cette maladie, comme celle qui nous occupe en ce moment, est contagieuse, et qui plus est de manière proche (toux, éternuements postillons), contrairement au tétanos donc la bactérie fait juste sa vie dans le sol.
*Le pathogène à l’origine est une bactérie, plus précisément une corynébactérie. L’humain est son seul réservoir, mais, pour les raisons qu’on va voir par la suite, ça n’en fait pas forcément une maladie éradicable, contrairement à la rougeole.
*Lorsque la bactérie se multiplie chez un individu, elle fabrique une toxine particulière. Et c’est cette toxine qui donne ce qu’on appelle la diphtérie.
*Si la bactérie infecte un sujet vacciné, il va avoir une simple angine, car la vaccination n’est pas contre le pathogène mais contre la toxine.
*Comme dans le cas du tétanos, la toxine produite par ces bactéries est beaucoup trop violente pour l’organisme et la dose qu’il aurait besoin de recevoir naturellement pour produire son immunité est au-dessus de la dose létale (ça arrive dans certains cas toutefois, mais c’est rarissime, et déjà il faut avoir survécu).
*Le vaccin va donc, par le biais des fameux adjuvants dont les anti-vaxx expliquent qu’ils sont inutiles et dangereux, forcer l’organisme à réagir à une dose bien plus faible de la toxine, générant une immunité à celle-ci, et donc à la maladie issue de celle-ci.
*Le bon point : les gens ne meurent pas. C’est cool.
*Le mauvais point : on immunise contre la toxine, pas contre le pathogène qui lui, circule toujours. De fait, la maladie n’est pas éradicable car, contrairement à, par exemple, la rougeole, où si tout le monde est vacciné, le pathogène se prend un uppercut dans les dents à chaque tentative d’infection et donc disparait faute d’hôte disponible, ici le pathogène continue à infecter les humains, étant simplement rendu inoffensif. Ce qui fait que à chaque baisse de la couverture vaccinale, on peut voir des cas ressurgir. En France où on est un peu obtus avec les vaccins, il y a ainsi des cas sporadiques de diphtérie et de tétanos. Tous sont non ou mal vaccinés et, pour le tétanos, 23% des malades meurent et 34% survivent avec des séquelles.
Dans le cas qui nous occupe, ça veut dire que, même si les anticorps ont l’air de faire des trucs très bizarres, il est possible d’avoir un vaccin contre un pathogène face auquel on fait pas, peu ou peu de temps des anticorps. Ça veut dire aussi qu’il faudra l’inclure définitivement dans le calendrier vaccinal pour ne pas se le remanger régulièrement dans la tronche parce qu’il ne sera pas éradicable, mais ça… c’est une autre histoire.


En espérant avoir pu apporter un peu de lumière dans le chaos ambiant, je rends l'antenne, et on y retourne la semaine prochaine, car l'épidémie ne semble pas vouloir nous lâcher. En attendant, prenez soin de vous et des chercheurs qui bossent dur, et, autant que possible, restez chez vous.

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oct. 2020 25 20:34

Re: Point COVID de la semaine

Message par leon macnoussi

#14

Aujourd'hui, c'est dimanche. Voici des infos de Dendrobate Doctor et nous sommes ensemble pour faire l'état de la recherche sur l'épidémie de Covid-19.

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FAKE DE LA SEMAINE

Il est venu le temps pour moi de vous annoncer une belle nouvelle (et de tirer ma flemme par la même occasion), mais d’abord, un peu de fake en apéro.
Cette semaine, on a beaucoup vu passer des posts, illustrations bancales, articles pourris et autres déclarations à l’emporte-pièce expliquant que le Covid n’a crée aucune surmortalité en France, et le post qui a le plus tourner est sans doute un tableau de mortalité de l’Insee… qui s’avère être truqué.
Et là, je ne vous en dis pas plus, je vous laisse aller voir le débunkage de ce tableau ici :
Et là, vous allez me dire « Ho Doctor, tu te foules pas sur ce coup-là ! Depuis quand tu paresses comme ça, en plus ça hiberne pas les grenouilles, t’as vraiment aucune excuse ! »
Alors déjà, si, certaines grenouilles hibernent je vous fais dire, et ensuite, c’est là la bonne nouvelle.
L’équipe de The Dendrobate Doctor est heureuse de vous annoncer qu’elle a rejoint un collectif de chercheurs, vulgarisateurs et médecins bien décidés à s’attaquer aux fake news, aux questions en suspend et à la mauvaise science. Vous pouvez joindre le groupe (https://www.facebook.com/groups/697055387583783) et suivre la page (https://www.facebook.com/covid19.explications) pour du contenu de qualité, et des partages de nos merveilleux partenaires (Hervérifie, Toubib or not Toubib etc.). Enjoy !
PS : si VRAIMENT vous voulez utiliser la mortalité toutes causes confondues pour avoir une idée de l’ampleur de la crise, il existe des études publiées et sérieuses (genre celle-là : https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articl ... iovIIUnyvs) alors arrêtez de faire tourner n’importe quoi…


DECOUVERTE DE LA SEMAINE

On l’a compris depuis le temps, le Covid n’est pas (seulement) une maladie respiratoire et les séquelles neurologiques sont celles qui commencent à inquiéter le plus. A mesure que l’épidémie progresse, le risque d’avoir dans la jeune génération beaucoup de malades qui ne meurent pas mais souffrent de séquelles cérébrales à long terme commence à être un scénario possible qu’il faut investiguer.
Avec cette idée en tête, une équipe de chercheurs allemands et finlandais (y a aussi quelque suisses et estoniens, vous verrez c’est un gros groupe) a mis le doigt sur un processus intéressant. Si vous vous souvenez, je vous parle souvent de clé du virus et de serrure des cellules pour expliquer comment le premier arrive à infecter les secondes. La serrure visée par le virus, c’est ACE2, un récepteur qu’on trouve beaucoup dans la cavité nasale (d’où le fait qu’il faut que votre masque couvre la bouche ET le nez). Mais cette serrure a une sœur pas-tout-à-fait-jumelle-mais-presque, le récepteur NRP1, et la clé du virus peut, dans les cas où les deux sœurs sont côte à côte, arriver à ouvrir les deux.
Où sont-elles côte à côte du coup ? Hé bien principalement dans le tissu olfactif (d’où les anosmies) et… dans le système nerveux central (où pour le coup il y a peu de ACE2 mais beaucoup, beaucoup de NRP1). D’un seul coup, les symptômes neurologiques s’expliquent beaucoup plus clairement dans ce qui était jusque là une maladie vasculaire avec symptômes respiratoires : Sars-Cov2… se trompe de porte parfois.
Plus inquiétant en revanche, NRP1 est impliqué dans la croissance et la réparation des systèmes nerveux et cardiovasculaires : son piratage pourrait poser de vraies difficultés pour reconstruire les zones abimées (une piste, peut-être pour expliquer les formes longues du Covid ?).
L’article est ici : https://science.sciencemag.org/content/ ... ecYqyy9TjE et une explication résumée en a été faite par un camarade ici :


PISTES DE LA SEMAINE

*Tociluzumab : une étude complète sur la molécule est enfin sortie (dispo ici : https://jamanetwork.com/journals/jamain ... hNMCh3kN9g) un résultat en demi-teinte car le traitement permettrait bel et bien de prévenir l’aggravation des patients et de limiter les besoins en réanimation, mais la baisse de la mortalité n’est pas réellement significative. Son utilité serait plus de permettre aux malades moins de temps d’hospitalisation et de séquelles que de réduire vraiment la létalité de la maladie.
*Application : StopCovid fait peau neuve (espérons que des leçons aient été tirées et que son successeur soit plus stable…) et est remplacée par TousAntiCovid (pour ceux qui avaient déjà la première, pas besoin de télécharger la seconde, une simple mise à jour suffit). Alors le nom est nul mais si ça me permet de pas fêter une deuxième fois mon anniversaire en quarantaine, je prends. A noter également, si vous avez des symptômes ou êtes cas contact, l’appli donne les lieux où vous faire dépister.


MAUVAISE NOUVELLE DE LA SEMAINE

*France : 54 départements sont désormais sous couvre-feu de 21h à 6h. La mesure affecte désormais 46 millions de Français, et vu que nos voisins européens tendent à faire pareil ou pire, il semblerait qu’on ne soit pas sortis d’affaire avant un moment. Tel le Grinch, le Covid va-t-il voler
Noël ?


BONNE NOUVELLE DE LA SEMAINE

*Vaccin : il commence à y avoir pénurie de vaccin contre la grippe. Oui, c’est ce que j’ai trouvé de mieux comme bonne nouvelle cette semaine, le monde est pas très coopératif ! Certes, c’est un vrai problème, mais dans un pays affichant une aussi grande défiance vaccinale (il n’y a pas qu’au foot qu’on est champions du monde), cette réaction peut être vue comme une évolution des mentalités et une vraie bonne nouvelle. Sans compter que les hôpitaux commencent à être débordés et qu’il n’ont pas besoin d’une deuxième épidémie à gérer.


« QU’EST-CE QUE PUTAIN DE QUOI ? »

Vous êtes fatigués de ces gens qui refusent de porter un masque ? Oui, moi aussi. Vous avez essayé de leur expliquer que c’était important ? Oui, je me doute bien. Vous pensez avoir vraiment tout essayé ? Vous leur avez expliqué, fait suivre des liens, vous leur avez montré, vous leur avez même fait un dessin ? Je vous plains. Mais est-ce que vous avez essayé de leur chanter ? Et bien il y en a qui l’ont fait ! Si vous aimez la parodie, les classiques Disney et rester en vie, cette vidéo est faite pour vous (et pour les récalcitrants à qui vous pouvez la partager) :



Car même la mort c’est plus marrant, c’est moins désespérant en chantant.



POINT METHODE DE LA SEMAINE : c’est quoi le portage d’un virus ? (ou d’une bactérie, ou d’un parasite, vous avez compris l’idée, mais là c’est un virus qui nous intéresse)

Il y a eu un peu de confusion la semaine dernière lorsque j’ai parlé du masque qui arrête bien les gouttelettes mais ne suffit pas quand le virus est aéroporté et j’ai compris que pour beaucoup de gens, c’était un peu la même chose. Donc je me suis dit qu’on allait faire un point. Comment un virus se ballade-t-il d’un hôte à l’autre ?
On considère qu’il existe en général 4 grands moyens pour un virus (ou autre, vous avez compris) de se répandre : les voies aériennes, orales, sanguines et de contact.
*Pour la voie aérienne, plusieurs possibilités :
**la première (rare) est liée aux chirurgies, lorsque les tissus internes du patients projettent dans l’air des fines gouttes très contaminantes (c’est pour ça aussi qu’on évite les autopsies et les soins mortuaires dans les suspicions de maladie très contagieuse) ;
**la deuxième est liée à la respiration de substance inerte (dite « par inhalation ») et se produit lorsqu’on respire (par exemple sous la douche) une substance contaminée (par exemple de l’eau contenant la bactérie qui donne la légionellose) qui provoque une maladie non transmissible entre humains ;
** la troisième enfin est la transmission par gouttelettes, dans laquelle on distingue :
*** la transmission par projection de gouttelettes (le mode principal de contagion du Sars-Cov2), qui sont des particules assez grosses (donc arrêtées par les masques), assez peu mobiles (elles ne « planent » pas bien) qui entrent par les muqueuses de l’hôte même s’il a l’impression de n’avoir pas été touché (pour vous faire une idée, chaque éternuement produit 40.000 gouttelettes en moyenne) ;
*** la transmission par aérosol, c’est-à-dire des gouttelettes qui ont séché (dite, donc « aéroportée »), où les particules sont donc beaucoup plus petites et plus mobiles (donc le masque ne suffit pas en face) mais aussi plus fragiles (et c’est ça la question qui se pose pour Sars-Cov2)
*Pour la voie orale, il s’agit simplement de consommer de l’eau ou des aliments contaminés, c’est la voie d’entrée de prédilection des parasites et autres organismes massifs (en comparaison d’un virus)
*Pour la voie sanguine (dite « parentérale »), on tend à distinguer deux catégories (traumatique et chirurgicale) mais le principe est le même : suite à rupture dans la barrière qui isole le système sanguin de l’extérieur (blessure, acte médical, piercing, ce qu’on veut) les pathogènes ont accès au sang et peuvent se répandre dedans directement
*Enfin pour la voie de contact, on différencie :
** la transmission par la peau, qui concerne majoritairement des affections dermatologiques contagieuses (gale, parasites externes) mais aussi des virus avec des symptômes cutanés (comme la varicelle ou l’herpès) ;
** la transmission par les mains (dite « manuportée »), où c’est la main qui sert de relais entre une zone contaminée (la bouche par exemple) et l’hôte suivant (via par exemple la poignée de main et le contact au visage ensuite (Sars-Cov2 s’en sert aussi, mais c’est le mode principal des virus qui ne sont pas très mobiles) ;
** la transmission par muqueuses et/ou fluides sexuels (dite « sexuellement transmissible ») où le pathogène se transmet d’une muqueuse à une autre (les organes génitaux sont les plus touchés, mais l’anus et la bouche le sont également).


En espérant avoir pu apporter un peu de lumière dans le chaos ambiant, je rends l'antenne, et on y retourne la semaine prochaine, car l'épidémie ne semble pas vouloir nous lâcher. En attendant, prenez soin de vous et des chercheurs qui bossent dur, et, autant que possible, restez chez vous entre 21h et 6h.

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Re: Point COVID de la semaine

Message par leon macnoussi

#15

Aujourd'hui, c'est dimanche. Voici des infos de Dendrobate Doctor et nous sommes ensemble pour faire l'état de la recherche sur l'épidémie de Covid-19.

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FAKE DE LA SEMAINE

Un petit fake cette semaine, car avec le collectif, nous sommes sur deux gros débunkages et, comme beaucoup de choses dans la vulgarisation scientifique, ça prend un temps fou pour lequel on est même pas payé, donc désolée, mais c'est un peu long (et d’ailleurs, si vous voulez en apprendre les bases, je vais vous donner de la méthodo dans la section « Point méthode de la semaine »).
Après, les Belges, après les Suisses (d’ailleurs, je vous fais un point Heidi News dans la section « Qu’est-ce que putain de quoi ? » vous allez voir, ça vaut son pesant d’emmental), cette fois-ci la nouvelle vient d’Allemagne.
Une interview d’un virologue allemand a ainsi pas mal tourné sur les sites de complotistes/réinformateurs autoproclamés/éveillés/rebelles du système/biffez les mentions inutiles/à mon avis elles le sont toutes. Selon ce document, ce spécialiste réputé tiendrait des propos tels que « Le coronavirus n’est pas si dangereux », « Une vaccination ne sert à rien » ou encore « Les mesures contre le Corona sont complètement exagérées ». Ce qui n’est pas rien. Or, si on remonte à la source (c’est-à-dire à l’interview de base donnée ici : https://www.fuldaerzeitung.de/fulda/cor ... MgpyGHinUM), on s’aperçoit qu’il y a un couac. Pour ceux qui ne parleraient pas la langue de Rammstein, vous avez ici une traduction Google (oui c’est boiteux, mais, ça vous permettra de saisir le problème https://translate.google.fr/translate?h ... XXVfKhRusE) à savoir que l’interview porte en réalité sur le débunkage de fausses informations. Lesquelles sont de fait citées par ledit vriologue, pour pouvoir les débunker…et lui ont été attribuées par des conspi en manque de sources solides. La question de savoir si les gars ont juste été assez mauvais pour ne pas se rendre compte que le mec qu’ils citent disait l’exact inverse de ce qu’ils prétendaient, ou s’ils le savaient et ont délibérément manipulé les gens en se disant qu’ils n’arriveraient jamais à traduire la source originale, est à trancher en votre âme et conscience, en fonction de ce qu’il vous reste de foi en l’être humain.


DECOUVERTE DE LA SEMAINE

L’épidémie va nous poser un gros problème sanitaire, et pas qu’en termes de morts. C’est ce que montre une étude parue dans Seizure : European Journal of Epilepsy (dispo ici : https://www.seizure-journal.com/article ... -VfCcwjPns), qui combine 84 études portant sur les séquelles cérébrales chez les patients Covid. Celles-ci se retrouvent chez un tiers des patients, allant de 45 à 69 ans, et le lobe frontal semble être le plus touché. Cette découverte est cohérente avec ce qu’on sait déjà des complications des autres coronavirus, puisque les attaques d’épilepsie faisaient déjà partie des complications recensées du SRAS. Elle pourrait expliquer une partie des symptômes des « Covid longs » qu’on commence à voir massivement apparaître, avec notamment fatigue et troubles de la concentration sur plusieurs mois. Le mécanisme qui les cause est en revanche toujours inconnu, les deux hypothèses principales étant, au choix, un dysfonctionnement cérébral lié à l’hypoxie due à la détresse respiratoire, ou une attaque plus directe du virus sur les cellules nerveuses. A suivre de près donc.


PISTE DE LA SEMAINE

*Intelligence artificielle : des chercheurs des Universités de Paris, de Paris-Sarclay, de l’Inserm, de l’Institut Gustave Roussy et de l’Inria, associés à l’AP-HP, à Centrale Supélec et à TheraPanacea ont démontré que l’intelligence artificielle, entrainée à reconnaître des biomarqueurs appropriés sur des images de scanner, pouvait diagnostiquer la sévérité de la maladie chez les patients Covid et donner un pronostic fiable. Cette assistance permettrait aux médecins d’identifier plus facilement les patients à risque de forme grave, leur permettant ainsi de faire les bons choix de priorisation des soins.
Source : https://www.centralesupelec.fr/fr/antic ... KTaC0WxHYI


IMPASSES DE LA SEMAINE

*Hydroxychloroquine : vous en reprendrez bien une couche ? Car, s’il est maintenant établi que la molécule ne marche pas contre le Covid, les chercheurs se sont demandé à quel point ça ne marchait pas. L’étude (toute récente donc encore en préprint, dispo ici https://www.medrxiv.org/content/10.1101 ... aoD-efqxYc), ou plutôt la méta-analyse, compile 28 essais cliniques, impliquant 23 pays, rassemblant 10.012 patients, et a demandé les efforts de pas moins de 94 chercheurs (sérieusement, je n’ai jamais vu une liste de co-auteurs de cette taille). La conclusion est sans appel : si l’hydroxychloroquine avait été utilisée massivement comme certains le préconisaient, elle aurait causé entre 2% et 20% de mortalité supplémentaire selon les pays (oui c’est une sacrée fourchette, mais la population n’a pas les mêmes facteurs de risque au Pakistan qu’aux USA). En France, le scénario du pire indique donc que son usage aurait coûté plus de 7.000 vies supplémentaires.
*Immunité : toujours pour continuer avec les pré-prints (oui je sais, c’est pas le top, mais ces deux-là sont complémentaires et cohérents entre eux), deux nouvelles études continuent à doucher les espoirs en matière d’immunité. La première se concentre sur l’évolution de l’immunité dans la population globale. Menée par l’Imperial College of London (et dispo ici : https://www.imperial.ac.uk/media/imperi ... dSP6Un2lyw), elle a impliqué 365.104 adultes (dont 17.576 positifs), ce qui est beaucoup. Elle a trouvé que, en l’espace de trois mois, la proportion de personnes possédant des anticorps avait chuté de plus d’un quart, avec des variables selon l’âge, les plus de 75 ans perdant leurs anticorps plus vite (-39%) que les 18-24 ans (-14.9%). Ces résultats sont cohérents avec ce qu’on sait des autres coronavirus (avec une immunité max de 6-12 mois) et avec ceux de la seconde étude, menée cette fois par le King’s College of London (et dispo ici : https://www.medrxiv.org/content/10.1101 ... 3s3MopA9BM). Celle-ci s’est intéressé à un plus petit nombre de patients, mais suivis individuellement sur un peu plus de trois mois, avec des degrés de gravité allant de l’asymptomatique à celui qui a dû être mis sous circulation extra-corporelle pour oxygéner le sang de manière mécanique. Elle a montré que les anticorps étaient plus présents chez les formes graves (on le savait déjà), que ceux ayant eu des formes asymptomatiques pouvaient perdre l’immunité très vite (tous les anticorps testés étaient indétectables pour deux des patients passés les 34e et 39e jour) et que même pour les autres, les anticorps chutaient de manière régulière assez rapidement (pour plus de précisions, voir la figure 1 page 18). Rien de très réjouissant donc.


MAUVAISES NOUVELLES DE LA SEMAINE

*Reconfinement : la France est reconfinée (je le dis pour ceux qui auraient vécu dans une grotte ces derniers jours, auquel cas, retournez-y), mais sa forme actuelle risque fort de ne pas être du tout suffisante (je vous encourage à suivre la page du collègue Toubib or not Toubib, ici https://www.facebook.com/medecinedesnuls/, il en parle régulièrement et c’est très drôle).
*Réanimation : quoi qu’en disent certains perchés, la réanimation en France commence bel et bien à saturer. A l’heure actuelle, 21 départements ont 100% ou plus de leurs lits de réanimation occupés par des patients Covid (big up aux Hautes-Alpes avec son score de 238%) et seuls 34 (sur un total de 101, j’ai compté les Dom-Tom) sont sous les 50%. A noter que ça n’est que l’occupation Covid, les lits restants ne sont pas nécessairement vides et d’autres malades en ont besoin, donc oui, ça commence à être très plein.
Source (régulièrement actualisée) : https://www.francetvinfo.fr/sante/malad ... uVkqOw7DOA


BONNE NOUVELLE DE LA SEMAINE

*Suivi : TousAntiCovid a rencontré plus de succès que son prédécesseur, et avait été téléchargée plus de 4 millions de fois lundi. Un succès à relativiser toutefois puisqu’encore bien en-dessus du seuil d’efficacité (20 millions de téléchargements), accompagné encore de problème de stabilité. Le fonctionnement ne convainc pas les spécialistes de l’informatique et de la compilation des données, et c’est encore le White Hat (ça veut dire que c’est un hackeur mais gentil) Baptiste Robert qui en parle le mieux ici : https://france3-regions.francetvinfo.fr ... wnJclIp06w


« QU’EST-CE QUE PUTAIN DE QUOI ? »

J’ai compilé les 8 épisodes de l’infiltration d’Heidi News chez les conspirationnistes de Suisse Romande. Et bien mes amis, si ce n’était pas aussi nuisible, ça serait à mourir de rire. On a pêle-mêle une prof de maths qui balance « si tu veux mourir c’est ton problème » à ses élèves qui sortent de cours pour bénéficier d’une campagne de vaccination contre le papillomavirus dans leur établissement, des conspis qui infiltrent les manifs de parents dont les enfants ont été retirés par les services sociaux pour leur faire croire qu’ils ont en réalité été vendus à des pédo-satanistes (ils ont VRAIMENT un problème avec ça c’est assez dingue) qui sont à l’origine de l’application SwissCovid, un gilet jaune qui se balade avec des homards gonflables pour aller exiger une interview de Raoult grâce à son tee-shirt militaire, un professeur de français qui est convaincu que parce qu’il est un sympathisant QAnon il est traqué par la CIA surtout depuis qu’il explique que BlackLivesMatter est une action des pédo-satanistes (et cet homme est noir… comme quoi), un fervent catholique qui explique que lui et les autres conspis sont « les rois et les reines » qu’on veut pousser à la vaccination obligatoire, Jean-Dominique Michel ( !), Idriss Aberkane ( !!) et, surtout, un journaliste en infiltration qui finira par mettre un terme à l’expérience quand des visiteurs viendront le remercier de son incroyable travail pour AgoraTV, en particulier la dernière vidéo (expliquant que le vaccin à venir contiendra le virus du SIDA et comptabilisant 2 millions de vues). De fait, ce serait donc hilarant si tous ces gens-là n’avaient pas un réel pouvoir de persuasion, sans la moindre preuve autre qu’un millefeuille argumentatif de délires, de « faites vos propres recherches » et de vidéos attractives. Mais ils l’ont. Donc c’est juste puissamment terrifiant. Si vous avez un contact suisse, ou un peu d’argent à dépenser, je vous encourage vivement à vous procurer les articles de cette série, dont l’introduction est toujours disponible librement à la consultation (ici https://www.heidi.news/explorations/au- ... UhppFotcsQ) ainsi que l’épisode 1.


POINT METHODE DE LA SEMAINE : débunkage mode d’emploi – Niveau débutant

Aujourd’hui je commence un triptyque sur le débunkage, car c’est pas tout de lire ceux des autres, des fois, c’est bien d’avoir les clés pour faire les choses soi-même. Le mode d’emploi que je vais donner va être décomposé en différents niveaux, selon votre maîtrise du domaine et vos connaissances méthodologiques. Donc si vous avez arrêté l’école avant le bac, mais que vous voulez quand même savoir si c’est de la bonne science, pas de panique, ce premier point méthode est fait pour vous. A noter que, vu le passage en revue assez superficiel que nous allons faire dans cette première partie, cela ne vous permettra pas de savoir si un article est bon, mais cela vous permettra déjà de repérer quand il ne l’est probablement pas.
*Les auteurs : quatre points à vérifier chez les auteurs, avant même de lire l’article
1-Sont-ils compétents sur le sujet ? Pour cela vous pouvez simplement chercher leur bio et regarder s’ils ont fait des études ou ont travaillé dans un secteur qui les rend compétents pour traiter le sujet de l’article. Soyez exigeants, il ne suffit pas, par exemple, d’être médecin pour parler du Covid. On parle de contagiosité chez les enfants ? Il faut un infectiologue ou un pédiatre. On parle séquelles cérébrales ? Un neurologue ou un spécialiste de l’imagerie sont nécessaires. On se demande l’impact de l’épidémie sur la population ? Il faudra un épidémiologiste, sans doute avec un statisticien.
2-Sont-ils affiliés à une structure sérieuse ? A côté du nom des auteurs, vous devriez trouver une note (lettre ou chiffre) qui renvoie à l’affiliation, c’est-à-dire le laboratoire, l’université ou la structure où les chercheurs travaillent. Vérifiez bien leur existence et leur vraie nature, certaines associations se donnent le nom pompeux de « faculté » mais n’en sont pas (Wikipédia est votre allié).
3-Ont-ils déjà publié des travaux sérieux ? Pour cela, vous pouvez taper leur nom dans Google Scholar, et voir ce qui en ressort. Ça n’est pas une preuve absolue mais un auteur qui a déjà beaucoup publié, dans des revues sérieuses, des articles bien cités et jamais rétractés, c’est un gage de sérieux du travail. Ce critère n’est pas pertinent si les auteurs sont jeunes, et ont donc encore peu eu l’occasion de publier.
4-Sont-ils fichés ? Vous m’avez déjà vu citer des gens comme étant « fichés » sur Psiram (https://www.psiram.com/fr/index.php/Acc ... 7Hlr4bm3GE) ou ConspiracyWatch (https://www.conspiracywatch.info/?fbcli ... dSP6Un2lyw). Ce sont des gens déjà repérés pour leur sale manie de tordre la science et lui faire dire n’importe quoi. Tout ce qui sort de leur bouche doit être regardé avec beaucoup, BEAUCOUP de vigilance.
*L’étude : toujours sans entrer dans l’article lui-même, il y a trois choses à vérifier sur la « vie » de l’étude en elle-même
1-Quel est son statut ? Le mieux est bien sûr que l’étude soit publiée dans une revue (on revient sur ce point après). Elle peut être en pré-print, c’est-à-dire soumise mais pas encore validée, il faudra donc la prendre avec du recul. Si elle est non publiée, et non en pré-print, il faut toujours s’inquiéter : soit elle a été rejetée de toutes les revues sérieuses où elle a été soumise, et donc elle est bancale, soit ses auteurs n’ont même pas voulu la soumettre, et c’est souvent parce qu’ils savent qu’elle ne tient pas la route.
2-Où est-elle publiée ? Il ne suffit pas qu’elle soit publiée pour que ce soit une bonne chose. Si vous vous souvenez du papier sur l’hydroxychloroquine et les accidents de trottinettes, vous savez que certaines revues dites prédatrices sont prêtes à publier tout et n’importe quoi. Vous pouvez trouver des listes de ces revues en ligne (ici : https://predatoryjournals.com/journals/ ... nNdl6qzDpE ou là : https://beallslist.net/?fbclid=IwAR0qlP ... tZsJ2H0Xds) et si la revue y apparait, passez votre chemin.
3-Où est-elle partagée ? La vie d’une étude est souvent signe de sa bonne santé. L’article est partagé par des vulgarisateurs, des centres de recherche, il est cité sur les chaines des institutions comme le CNRS ? Il est probablement solide. Il tourne surtout chez les sites de « réinformations », les plateformes de vidéos en ligne et les blogs de gens fichés sur Psiram ou ConspiracyWatch ? Il ne l’est probablement pas.
*Les sources : enfin, en entrant dans l’article mais en allant directement à la fin, il y a déjà des choses à vérifier en ce qui concerne les sources de l’article
1-L’auto-citation : s’il est normal pour un auteur de citer un travail précédent, surtout s’il travaille depuis longtemps sur le même sujet, l’abus d’auto-citation doit alerter. Il doit y avoir d’autres gens qui ont dit la même chose que lui, sinon c’est troublant. Egalement, attention si les auto-citations sont récentes, cela peut signaler des travaux faits dans la foulée, simplement pour servir de source à l’article, et qui peuvent donc être des arguments ad hoc, et non validés.
2-Le genre des sources : les meilleures sources, ce sont les articles publiés dans des revues sérieuses. Les livres, les communiqués de conférence, les articles non publiés ou, pire que tout, les vidéos Youtube et les posts de blog (sauf quand ils servent de source première, par exemple quand on les analyse) ne sont pas des sources fiables et n’indiquent pas un article de qualité.
3-La présence des sources : en dernier lieu, parcourez rapidement l’article. Tous les points importants, les affirmations ou les choix méthodologiques doivent avoir une note renvoyant à une source (fiable, du coup). Méfiez vous particulièrement des affirmations sans source, renvoyant à des sources de piètre qualité, à paraître (donc invérifiable), rétractées ou non-publiées.
Avec tout ça, vous ne saurez pas si un travail est de qualité. Mais vous pourrez détecter celui qui ne l’est probablement pas. Et c’est déjà beaucoup vu le marasme dans lequel on est…


En espérant avoir pu apporter un peu de lumière dans le chaos ambiant, je rends l'antenne, et on y retourne la semaine prochaine, car l'épidémie ne semble pas vouloir nous lâcher. En attendant, prenez soin de vous et des chercheurs qui bossent dur, et, autant que possible, restez chez vous entre.

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leon macnoussi
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nov. 2020 08 22:11

Re: Point COVID de la semaine

Message par leon macnoussi

#16

Aujourd'hui, c'est dimanche. Voici des infos de Dendrobate Doctor et nous sommes ensemble pour faire l'état de la recherche sur l'épidémie de Covid-19.

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FAKE DE LA SEMAINE

Une fois n’est pas coutume (oui je dis ça régulièrement, mais que voulez-vous, le monde est changeant, surtout en ce moment), nous n’allons pas aujourd’hui parler d’un fake mais des conséquences d’un fake. Des conséquences juridiques, plus précisément. Car oui, peut-être qu’en faisant n’importe quoi on devient n’importe qui, mais en racontant n’importe quoi en public au risque de créer méfiance et panique, on devient juste un prévenu comme les autres.
Si vous vous souvenez, au début d̶u̶ ̶c̶o̶n̶f̶i̶n̶e̶m̶e̶n̶t̶ du premier confinement (faut que je m’y fasse), une vidéo avait énormément tourné sur les groupes Whatsapp ainsi que sur les groupes et pages de Gilets Jaunes, dans laquelle un homme vous présentait le brevet secret (disponible en libre accès sur PDF) prouvant que Pasteur (l’Institut, pas Louis) avait crée le virus à l’origine du Covid. Le résultat avait été un nombre si impressionnant de courriers et d’appels malveillants que Pasteur s’était décidé, pour la première fois de son existence, à porter plainte pour diffamation. L’homme vient donc d’être condamné à 5.000€ d’amende avec sursis, à diffuser le jugement sur ses réseaux et à payer la publication de ce jugement dans 3 journaux au choix de Pasteur. C’est pas forcément énorme, mais ça remet les choses à leur place.
Si vous n’avez rien suivi à cette affaire, une mise au point de l’époque est disponible ici : https://www.francetvinfo.fr/sante/malad ... x1Y1z0TQ-s


DECOUVERTE DE LA SEMAINE

C’est une découverte assez saugrenue, mais la science prend des chemins souvent inhabituels (si vous saviez…). Des chercheurs du MIT ont récupéré une Intelligence Artificielle qu’ils avaient déjà utilisée pour la détection de la maladie d’Alzheimer et ont nourri le réseau « neuronal » d’apprentissage avec un nombre colossal (plusieurs dizaines de milliers) d’enregistrements de toux de personnes saines, de patients malades et de patients asymptomatiques dans l’espoir que l’IA puisse différencier à « l’oreille » les cas positifs, même sans symptôme.
Et le moins qu’on puisse dire c’est que le résultat laisse tout le monde comme deux ronds de flan (oui, moi non plus je n’ai jamais compris cette expression). Dans son étude (publiée ici : https://ieeexplore.ieee.org/document/92 ... gTv1ebox8s et présentée ici : https://news.mit.edu/2020/covid-19-coug ... swqLFAvj54 si vous voulez un résumé plus digeste) le MIT montre que son logiciel, mis à l’épreuve avec des vrais patients ayant des résultats PCR fiables, détecte correctement 98,5% des patients positifs (avec 5.8% de faux positifs) et, lorsqu’il est plus spécifiquement confronté à des patients asymptomatiques, il détecte correctement 100% des patients positifs (avec toutefois 14.8% de faux positifs). Si le test arrivait à s’affiner, il pourrait devenir un puissant outil de dépistage massif, disponible simplement sur téléphone. A suivre donc.


PISTES DE LA SEMAINE

*Tests antigéniques : ils commencent à être déployés en pharmacie (52% en serait équipées à l’heure où j’écris ces lignes) et donnent des résultats en parfois 15min. Toutefois, leur plus faible fiabilité les expose à un mésusage (et on a fait un point avec le collectif ici pour expliquer comment bien s’en servir :




A privilégier donc si vous avez des symptômes légers depuis 72h ou moins et n’êtes pas une personne à risque.
*Vaccin : AstraZeneca et Oxford ont annoncé qu’ils allaient déposer une demande de validation pour leur candidat vaccin, après des essais cliniques prometteurs (le dernier volet de la phase 3 est toujours en cours). Andrew Pollard, directeur du centre de recherche de l’université, a ainsi présenté les résultats du travail de ses équipes devant le parlement britannique ce mercredi 4 novembre. Si le feu vert est donné, le vaccin pourrait être disponible pour les personnes prioritaires (les soignants au contact direct des malades notamment) au compte-goutte dès décembre 2020 ou janvier 2021. Les laboratoires ont toutefois rappelé que le déploiement du vaccin dans la population générale prendra, lui, du temps et se heurtera à la défiance vaccinale. Nous n’en avons pas encore fini avec l’épidémie.


IMPASSE DE LA SEMAINE

*Obésité : un vaccin c’est bien, pour tous c’est mieux. Or, alors que les études pointent de plus en plus l’obésité comme un facteur de risque majeur dans le cas du Covid (comme ici, dans cet article d’avril https://onlinelibrary.wiley.com/doi/ful ... tS_P16saDw), une inquiétude, déjà ancienne, recommence à faire surface : et si le vaccin ne marchait pas chez les personnes en surpoids ? A l’origine de cette inquiétude, plusieurs études faites il y a quelques années montrant que les personnes obèses développent moins d’immunité lors d’un vaccin contre l’hépatite B ou la grippe (ici pour la grippe : https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/29161078/). La combinaison de cette moindre réponse et du facteur de risque augmenté devrait conduire à se poser de vraies questions sur la manière de gérer le cas du surpoids dans l’épidémie.


MAUVAISE NOUVELLE DE LA SEMAINE

*France : l’épidémie fait des ravages dans notre beau pays. A l’heure où je vous parle (enfin je parle pas vraiment, mais vous avez compris), un nouveau cas est déclaré toutes les 2 secondes, et un nouveau malade entre à l’hôpital toutes les 30 secondes. En réanimation, 3.878 lits étaient occupés par des patients Covid au 3 novembre, 71% sont des hommes, leur moyenne d’âge est de 62 ans, près d’un tiers appartient à la tranche des 44-65 ans et 21 patients ont moins de 14 ans. Un patient meurt toutes les 4 minutes et la France vient de franchir hier la barre des 40.000 morts (et pour que vous arrêtiez de me gonfler avec ça, la grippe, c’est entre 5.000 et 10.000 morts par an, genre 8.117 l’an dernier, donc arrêtez de vous cacher derrière votre petit doigt, c’est mauvais pour ma tension).
Source : Santé Publique France


BONNE NOUVELLE DE LA SEMAINE

*Couvre-feu : la mesure produirait son effet et on commencerait à observer une baisse de la contagion dans les métropoles qui y ont été soumises (là où ça continue à augmenter dans les autres). Paris, Montpellier ou encore Lille connaissent ainsi une bascule des cas (le moment où le nombre de cas quotidiens diminue au lieu d’augmenter) entre le 27 et 29 octobre, ce qui n’est pas le cas par exemple pour Brest ou Metz. Il est trop tôt pour que cette légère inflexion soit attribuée au confinement, mais cela laisse espérer que les mesures sont efficaces. Si vous voulez, vous pouvez retrouver plus de données et des superbes graphes ici : https://covidtracker.fr/covidtracker-fr ... mf518C_spw


« QU’EST-CE QUE PUTAIN DE QUOI ? »

On a entendu beaucoup BEAUCOUP de choses sur Sanofi, le Plaquénil, le Ministère de la Santé et l’IHU cette semaine. Donc on va faire le point.
Oui, Sanofi a bel et bien refusé de livrer l’IHU en Plaquénil, la fameuse hydroxychloroquine (HCQ). Oui, Sanofi, a bien écrit au Ministère de la Santé suite à ça (et d’ailleurs la lettre est là : https://www.mediterranee-infection.com/ ... Fj9j2ZoWXI). Et oui, on est bien face à un labo qui refuse de vendre une molécule en grande quantité contre une somme importante. Du coup, une question légitime et crue se pose : pourquoi donc un laboratoire pharmaceutique accepterait-il de s’assoir sur un gros paquet de pognon ? Et la réponse est très simple : pour éviter de devoir, plus tard, payer encore plus de pognon. Car le refus de Sanofi est clairement motivé par une chose : protéger le laboratoire contre les recours de patients intoxiqués. En effet, si le Plaquénil est toujours disponible à la vente, il l’est uniquement pour ses indications AMM (le lupus par exemple) dont les doses sont bien connues. Ce ne sont pas ces doses qu’emploie l’IHU. Il peut être aussi mis à disposition pour des essais cliniques sur l’humain (RIPH). Aucun protocole de ce type n’a été déclaré par l’IHU. Enfin, il est possible de le prescrire au cas par cas, dans l’intérêt du patient et en fonction des connaissances scientifiques disponibles. Or, l’IHU se vante clairement de faire de ce traitement un protocole standard et non une exception, et les études disponibles (dont les méta-analyses) montrent clairement que ce n’est pas dans l’intérêt du patient de donner ce traitement. En conséquence, Sanofi déclare refuser de procurer la molécule, alors que sa responsabilité pourrait ultérieurement être engagée : les études sont publiques, si un patient meurt suite au traitement, la famille est en droit d’attaquer le laboratoire qui savait que sa molécule avait un rapport bénéfice/risque défavorable
La lettre de Sanofi peut être résumée en une phrase « Hé m’sieur l’arbitre, y a l’IHU qui fait rien que c’qu’il veut avec ma molécule ! Hé j’veux pas prendre un carton à sa place, j’fais quoi ? ». Quand ce sont les labos qui en sont là, on peut vraiment se dire qu’on vit une drôle d’époque.


POINT METHODE DE LA SEMAINE : débunkage mode d’emploi – Niveau médian

On continue notre série avec cette fois des points un peu plus poussés en termes de vérification, ce tuto débunkage reste à votre portée si vous avez une bonne maîtrise de l’outil informatique et une connaissance de base de la méthodologie scientifique. Du fait que l’immense majorité des études sont en anglais, une bonne connaissance de la langue d’Elton John est souhaitable
*Structure : certains éléments sont indispensables dans un article digne de ce nom. Un papier qui ne donne pas sa méthode, qui n’explique pas comment il a sélectionné ses données, ses cas ou ses études (dans le cas d’une méta-analyse) n’est pas sérieux. Pas plus que celui qui n’explique pas comment il a obtenu ses données ou selon quel principe il a fait ses calculs. On ne vous demande pas ici d’en penser quelque chose, simplement de vérifier que c’est bien là.
*Ce qui est affirmé sans preuve peut être rejeté sans preuve : parcourez le texte, en particulier les sections « Matériel et méthode » et « Discussion ». A chaque affirmation que vous trouvez, que ce soit en lien avec des connaissances générales (« il a été prouvé » ou il existe de nombreuses preuves de ») ou avec les données de l’étude elle-même (« nous avons trouvé », « il est apparu »), il doit y avoir une justification. Ce sera souvent une source (un autre article) pour les connaissances générales et une figure, un tableau ou un graphique pour les données internes. Si une affirmation semble importante mais n’a pas de source, vous pouvez faire une recherche dans le document avec des mots-clés pour voir si elle n’a pas été démontrée/sourcée plus haut. Si vous ne trouvez rien, demandez-vous si la logique de l’article reste solide si cette affirmation saute. Si oui, ce peut être un oubli car les auteurs n’ont pas estimé ça important. Sinon, ça veut dire qu’il y a une faille logique (du moins en apparence) dans l’étude.
*Postulat et hypothèse : le postulat (« pour cette étude, nous sommes partis du principe que ») doit être solide et étayé. Soit il est sourcé soit il est une vérité générale dans le milieu. En l’absence de source, vous pouvez bêtement faire quelques recherches sur Wikipédia, qui liste les controverses sur les sujets. Un sujet bien ancré fait un bon postulat, un sujet avec une section entière de controverses est un postulat sujet à caution. De la même manière, regardez la formulation de l’hypothèse. Une hypothèse doit être la plus neutre et factuelle possible. Une hypothèse avec une forte composante idéologique dedans doit être sujette à caution.
*But de l’étude : le but affiché de l’étude (« nous allons mesurer le taux de mortalité à 28 jours ») doit correspondre avec ce qui est donné dans les résultats. Si les buts ont changé en cours de route (par exemple la mortalité n’a été mesurée que jusqu’au jour 8), c’est mauvais signe.
*Sources : les sources les plus fiables sont des articles dans des journaux avec revue par les pairs. Dans la liste des sources, éliminez tout ce qui est conférence, livre, chapitre d’ouvrage et voyez ce qui reste. Vous pouvez vous aider de modèles de notices bibliographiques en ligne pour bien comprendre quelle référence est un article et laquelle est un livre. Notez le nom des revues des sources restantes et vérifiez qu’il ne s’agit pas de revues prédatrices connues (les deux listes les plus utilisés dans le monde universitaire sont celles-là https://predatoryjournals.com/journals/ ... 3jK95FqH84 et https://beallslist.net/?fbclid=IwAR3fD_ ... p-L9JqdJ-I). La présence de sources publiées dans des revues prédatrices doit immédiatement alerter, idem pour un très petit nombre d’articles par rapport au nombre de sources.
Avec tout ça, vous ne saurez pas si un travail est fiable. Mais vous pourrez détecter celui qui essaye probablement d’enfumer le monde. Et c’est déjà beaucoup vu le marasme dans lequel on est…


En espérant avoir pu apporter un peu de lumière dans le chaos ambiant, je rends l'antenne, et on y retourne la semaine prochaine, car l'épidémie ne semble pas vouloir nous lâcher. En attendant, prenez soin de vous et des chercheurs qui bossent dur, et, autant que possible, restez chez vous entre.

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nov. 2020 16 06:18

Re: Point COVID de la semaine

Message par leon macnoussi

#17

Voici des infos de Dendrobate Doctor et nous sommes ensemble pour faire l'état de la recherche sur l'épidémie de Covid-19.

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FAKE DE LA SEMAINE

Oui, oui, je sais, on ne va pas y couper. L’actu brûlante de cette semaine, c’est de ce fameux « documentaire » (j’ai vu passer l’appellation « documenteur » mais sachez que le terme existe déjà pour un genre très respectable de film, je vous conseille à ce sujet Opération Lune ou encore les Documents Interdits). Je ne vais pas en faire le débunk ici, parce qu’on travaille dessus avec le collectif Covid19 Fédération, que ça représente des heures de boulot à plusieurs et que, conseillés par certains lecteurs, on va sans doute en faire une analyse par thème (l’OMS, les vaccins, la 5G, l’hydroxychloroquine etc.).
En attendant, je propose ici une remarque, un peu à contre-pied de mes collègues : je pense que le succès du film vient en partie du fait que peu de gens l’ont réellement regardé en entier avec attention. Ce qui est partagé, ce qui tourne, c’est beaucoup le trailer, ou des liens du film dont les gens regardent les 30 ou 45 premières minutes.
Or, si on n’est pas attentif, si on ne s’y connait pas ou si on n'a pas une vraie volonté de vérifier chaque allégation, la première heure et demie peut très bien sembler parfaitement crédible. Sembler.
Si vous êtes attentifs, vous remarquerez que Valérie Bugault considère que dire que le virus est né à Wuhan est un mensonge, et elle avance pour cela le fait qu’il y avait déjà des cas aux USA en mars/avril 2019, lesquels sont liés pour elle à une fuite de matériel biologique du laboratoire de Fort Detrick à l’été 2019. Soit, donc, 3 mois APRES les cas censés être provoqués par cette fuite. J’ai repassé 3 fois l’extrait pour être sûre, mais nul doute que quelqu’un qui vient déjà de se taper 1h de film peut passer à côté de ce paradoxe temporel.
Si vous n’êtes pas connaisseurs du sujet, vous pouvez trouver que, quand le narrateur affirme que Discovery a été annulé pour faire barrage à l’hydroxychloroquine qui affichait les meilleurs résultats intermédiaires « comme le montre ce croquis », effectivement, le graphique montre bien que Discovery était en train de prouver l’efficacité de la molécule. Sauf que moi, depuis des mois que je farfouille le sujet en tous sens, je commence à reconnaitre des choses au simple coup d’œil. Notamment que ce graphique n’est pas celui de Discovery (qui montrait exactement l’inverse), non, c’est celui de… la première étude de l’IHU de Marseille, celle qui disait avoir un groupe contrôle mais en fait non et qui a sorti les morts et les patients admis en réa de son protocole pour avoir de bons résultats.
Enfin si vous n’avez ni l’habitude ni le temps de vérifier chaque affirmation, vous pouvez être d’accord avec Martine Wonner quand elle trouve bizarre que la proposition de loi rendant le confinement légal ait été déposée le 5 décembre alors que le spectre de l’épidémie chez nous était encore loin. Sauf que, après avoir retourné tout Legifrance, la seule proposition de loi déposée le 5 décembre ayant trait aux épidémies que j’ai pu trouver porte sur les maladies transmises par les moustiques comme la dengue ou Zika et les mots « confinement », « quarantaine » ou « couvre-feu » n’apparaissent dedans nulle part.
Si, donc, le début du film peut convaincre qui n’y prend pas gare, arrivés à 2h, lorsque le film dévoile enfin le fond de sa pensée, je pense que personne de sensé ne peut y croire. Le fond est donc que le Covid est une maladie liée à un virus artificiel, lancé sur les populations afin de développer, via les applis comme StopCovid, la 5G et les paiements par téléphone, pour aboutir au Great Reset suite à quoi la génération de cryptomonnaie qui va en découler permettra à Google de manipuler notre conscience et à Elon Musk de tenter devenir immortel grâce au transhumanisme. Si vous pensez que j’exagère, le début de la diatribe expliquant ça se trouve à 2h10m53s (attention ce time code n’est valable que pour les versions intégrales, si celle que vous trouvez fait moins de 2h43m, c’est que vous avez une version raccourcie, dû au fait que, malgré les près de 200.000€ de financement participatif levés par le film, de nombreux extraits utilisés n’ont pas été achetés et donc ont dû être enlevés pour infraction au droit d’auteur…).


DECOUVERTE DE LA SEMAINE

On a beaucoup parlé cette semaine de l’annonce de Pfizer sur son vaccin « efficace à 90% ». Alors, certes c’est une bonne nouvelle, encore faut-il bien comprendre ce que ça veut dire.
Ce qui est testé dans ce vaccin, c’est la réduction des chances d’infection (donc d’être touché par le virus). Pour cela, Pfizer a constitué deux groupes d’environ 19.500 personnes chacun, un à qui était administré le vaccin, l’autre qui recevait un placebo. Dans le groupe vacciné, 8 personnes sont tombées malades (<0.05% de l’échantillon) contre 86 dans le groupe placebo (0.4%). Lorsqu’on calcule l’efficacité (c’est un peu barbare mais globalement c’est 1-(malades du groupe test/malades du groupe placebo)*100), on tombe bien à 90% (90.7, pour être exact).
Toutefois cela ne nous dit rien de l’efficacité de cette protection dans le temps. Cela ne nous dit rien non plus de l’efficacité du vaccin pour ceux qui développent la maladie quand même (est-elle moins grave avec le vaccin que sans ?). Donc c’est un peu tôt pour sabrer le champagne, sachons rester prudents et attendons les résultats finaux.
Le rapport intermédiaire lui est ici : https://clinicaltrials.gov/ct2/show/NCT ... 62b&draw=2


PISTES DE LA SEMAINE

*Greffe : la première double greffe du poumon en France comme traitement d’une forme grave du Covid vient d’avoir lieu. En réalité elle a eu lieu le 1e novembre mais l’équipe de l’hôpital Foch, qui a pratiqué la transplantation, n’a pas communiqué avant d’observer l’amélioration de l’état du patient. Il s’agit d’un homme, âgé de 58 ans, sans aucune comorbidité (ce qui a rendu l’opération possible), placé dans le coma artificiel depuis déjà 6 semaines, sans espoir d’amélioration.
Source : communiqué de l’hôpital Foch, Suresnes
*Contamination : une étude parue dans Nature (ici : https://www.nature.com/articles/d41586- ... KxML18tvU0) a établi la carte des principaux lieux de contamination en utilisant les données de géolocalisation de 98 millions d’américains. Le quinté perdant est constitué des bars et cafés, des restaurants (y compris restauration rapide), des hôtels, des salles de sport et des lieux de culte. Une étude à prendre toutefois avec recul, d’abord pour des raisons culturelles (les américains utilisent beaucoup la voiture et très peu les transports en commun), ensuite pour des raisons méthodologiques (pour des raisons éthiques, les données ont été anonymisées, seuls les flux de population sont visibles, et non le cas par cas).


IMPASSE DE LA SEMAINE

*Visons : la mutation du virus chez le vison, et l’abattage systématique de celui-ci qui en découle, ne semblent malheureusement pas pouvoir être contrecarrés. Après les premiers abatages suite à la contamination de deux employées aux Pays-Bas ce printemps, après la décision du Danemark d’abattre 17 millions de visons d’élevage ces derniers jours, la question se pose aussi en France, qui dispose encore de quelques élevages de fourrure. La menace est prise d’autant plus au sérieux que le vison est un cousin de la civette, l’animal qui avait servi d’hôte intermédiaire entre la chauve-souris et l’humain lors de l’épidémie du SRAS. L’OMS annonce que déjà 6 pays ont fait état de mutations du Sars-Cov2 liées au vison.
Source : OMS


MAUVAISE NOUVELLE DE LA SEMAINE

*2e vague : la seconde vague est en train de dépasser la première en France, alors que le pic de l’épidémie n’est pas encore atteint. Elle se caractérise par des contaminations plus disséminées, là où la première vague touchait majoritairement le Grand Est et l’Ile-de-France. Ces deux régions sont d’ailleurs plus épargnées que pendant la première vague, les clusters de l’épidémie se concentrant désormais sur Marseille, Lyon et Lille principalement.
Source : Santé Publique France


BONNES NOUVELLES DE LA SEMAINE

*Ordre des Médecins : après une audition en octobre suite à la plainte (entre autres) de la Société de Pathologies Infectieuses de Langue Française, l’Ordre des Médecins annonce que le comité départemental s’est joint à la plainte et poursuit désormais D. Raoult pour de multiples chefs d’accusation dont « essai clinique illégal », « exposition des patients à un risque injustifié » et « charlatanisme ». Si j’ignore ce qui va sortir de tout ça, il est quand même bon que le Conseil de l’Ordre commence à rappeler que le code de déontologie est là pour une raison et que chacun doit s’y plier. Sinon, on ne fait pas médecine.
*Couvre-feu : les effets s’accentuent à Paris qui affiche désormais un taux d’incidence du virus de 300 cas pour 100.000 habitants contre 600 il y a encore 15 jours. La baisse est continue depuis deux semaines et s’accompagne d’une baisse du taux de positivité des tests, ce qui en encourageant.


« QU’EST-CE QUE PUTAIN DE QUOI ? »

Aujourd’hui, alors que les libraires demandent une exception, les boutiques de soins et beauté demandent une exception, les catholiques demandent une exception, les parents d’élèves de primaires demandent une exception, je me suis dit que ça faisait beaucoup d’exceptions. Alors, je sais bien qu’on est en France et qu’il suffit d’ouvrir une grammaire pour comprendre que le français a plus d’exceptions que de règles générales, mais ça me permet surtout de parler d’un phénomène qu’on constate beaucoup depuis le retour des restrictions et avec lequel on n’en a pas encore fini. Je n’ai pas trouvé de nom pour ça lors de mes recherches, j’ai donc pris la liberté de le nommer : l’"effet rubalise".
Le nom est tiré des récits d’un proche, affecté à Sentinelle dans les aéroports, et qui a plus d’anecdotes avec des colis suspects que n’importe qui prenant le métro à Paris pendant un an. Lors de la découverte d’un bagage abandonné, un périmètre de sécurité est mis en place, matérialisé par de la rubalise. La rubalise, ça veut dire : personne ne passe. Et débute alors le festival du « oui, mais moi je ». Oui mais moi j’ai un vol à prendre, oui mais moi je passe juste sur le côté, oui mais moi je dois faire tout le tour et je suis fatigué, oui mais moi je… Tout le monde estime qu’il est, dans son individualité, une exception. Face à la rubalise, l’interdit (ou l’obligation) pour tous, chacun estime que ce tout le monde, ce n’est pas lui, que son cas à lui est spécial, qu’il est une exception, qu’il a le droit de transgresser, après tout « moi » ce n’est pas « tout le monde ». Le problème de ce point de vue, c’est qu’il oublie que si, ce coup-ci, la valise explose, on explose avec. Comme tout le monde.


POINT METHODE DE LA SEMAINE : débunker, pourquoi ?

Cas de force majeure oblige, je fais une pause dans mon manuel du petit débunker pour répondre à une interrogation légitime que je vois fleurir chez beaucoup de mes lecteurs (et des lecteurs du collectif). Est-ce que débunker ça sert vraiment à quelque chose ? Vous commencez à me connaitre, vous savez que chez moi, il n’y a pas de réponse simple. En l’occurrence, ça dépend du but visé.
*Pour expliquer aux indécis : le débunkage est utile quand des gens doutent, se posent sincèrement des questions, trouvent certaines choses étranges et sont en recherche de réponses. Beaucoup de gens nous ont par exemple demandé notre débunkage pour répondre à des proches avec qui ils avaient un débat. En ce sens, il est parfaitement utile et même, c’est là à mon sens sa première et plus importante visée.
*Pour exposer la méthode : quand on débunke, on montre comment on fait, où on a trouvé la source, comment on a senti le pot-aux-roses. En ce sens, le débunkage est utile à ceux qui sont en demande de développer leur esprit critique.
*Pour empêcher un gourou/arnaqueur de nuire : mettre en lumière les fausses informations, les mensonges, les approximations ou les manipulations de ceux qui vivent de la crédulité des gens et de leur fragilité, c’est un premier pas nécessaire, mais ce ne sera jamais suffisant. Ici, le débunkage ne peut que être une première pierre visant à donner du carburant aux actions qui auront, seules, l’impact espéré : judiciaires, politiques, financières etc.
*Pour convaincre les tenants : clairement, ça ne sera d’aucune utilité immédiate. Un tenant est sur le registre de la croyance, le débunkage est sur celui de la preuve, nous ne parlons pas la même langue. On ne fera pas changer un tenant d’avis et ce n’est pas le but. Toutefois, d’autres choses (parfois leur histoire personnelle) modifient la pensée des tenants. Il est toujours bon que des travaux de ce type alors existent, soient disponibles quelque part et leur servent, si jamais ils basculent chez les indécis. Mais les faire changer d’avis n’est pas le but de ce travail, et il peut même être contre-productif si on passe notre temps à leur agiter sous le nez, en les enfonçant dans ce sentiment « seul contre tous » et dans l’impression qu’on cherche à les manipuler. Comme tous les outils de la pensée critique, le débunkage est un art à manier avec précaution.


En espérant avoir pu apporter un peu de lumière dans le chaos ambiant, je rends l'antenne, et on y retourne la semaine prochaine, car l'épidémie ne semble pas vouloir nous lâcher. En attendant, prenez soin de vous et des chercheurs qui bossent dur, et, autant que possible, restez chez vous entre.

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nov. 2020 23 09:46

Re: Point COVID de la semaine

Message par leon macnoussi

#18

Voici des infos de Dendrobate Doctor et nous sommes ensemble pour faire l'état de la recherche sur l'épidémie de Covid-19.

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FAKE DE LA SEMAINE

Cette semaine, je veux vous présenter un fake fake. Un métafake. En vrai, il date un peu (2016, pour être précise), mais il ressort en ce moment dans le sillage de Hold-Up et sa visée pédagogique est excellente. Et comme il m’a été envoyé par de nombreuses personnes (y compris ma propre boss, c’est dire) j’ai donc décidé de vous le faire suivre.
Il montre comment les mécanismes derrière ce « documentaire », comme beaucoup d’autres contenus complotistes, sont faciles à repérer une fois qu’on les connait, comment ils influencent notre perception du contenu et comment réaliser ce type de matériel audiovisuel est à la portée d’une classe de seconde bien motivée. Je vous laisse découvrir tout cela ici :



Pour tous ceux qui recherchent le décorticage en règle du film qui a mis le feu aux poudres, le travail commence à être disponible ici : https://covid19federation.wordpress.com ... LPu8QNw2RQ
Soyez patients car le travail est immense, tout n’est donc pas encore disponible. Vous pouvez déjà trouver l’analyse détaillée des 30 premières minutes, avec sources contradictoires à l’appui (68 premières lignes du tableau…) au cas où vous voudriez vérifier quelque chose de précis. A terme l’intégralité du film décortiqué sera disponible, ainsi qu’une analyse des procédés cinématographiques à l’œuvre, un décorticage des éléments idéologiques qui soutiennent le film et des analyses thématiques des faits présentés.


DECOUVERTE DE LA SEMAINE

On l’a tous vue passer, donc petit point sur la question de « est-ce que la vitamine D protège contre le Covid ? » Entre ceux qui ne jurent que par l’alimentation pour la santé et ceux qui crient déjà à l’appel à la nature, posons les choses. Et maintenant que vous connaissez bien l’émission, on peut y aller, tous en chœur : « C’est plus compliqué que ça ! »
La nouvelle est partie du fait que l’Angleterre s’apprête à distribuer des doses de vitamine D à 2 millions de personnes pour lutter contre la maladie et que l’Ecosse vient de prendre la décision de lui emboiter le pas. Une piste qui n’a rien de farfelue, un essai sur le sujet est même en cours en France (là https://clinicaltrials.gov/ct2/show/NCT04344041).
SAUF QUE. Il n’est ici nullement question d’utiliser la vitamine D comme un traitement, mais de palier à des carences en vitamine D qui, elles affaiblissent l’organisme et le rendent plus sujets aux infections en tous genres, celle-là en particulier. Et l’Angleterre a de gros problèmes avec ça, puisque près de 40% de sa population souffre de carence de ce type en hiver (on peut trouver des études à ce sujet ici, par exemple, https://www.bjfm.co.uk/prevention-of-vi ... EZ0Eo9RDLk). D’autres pays pourraient également être concernés, du fait de leur faible ensoleillement, mais beaucoup ont déjà pris les devants il y a des années : ainsi la Finlande, le Canada ou encore l’Australie (oui, vous avez beau être au sud, quand vous êtes très au sud, vous avez le même problème qu’en étant très au nord) ont imposé depuis des années que le pain, le lait ou le jus d’orange soient enrichis en vitamine D pour éviter les carences générales.
DU COUP. Est-ce que ça vaut le coup d’en prendre ? Si vous êtes en France métropolitaine, vous pouvez effectivement être à risque de carence, puisque nous n’avons pas, nous, une alimentation artificiellement enrichie et de nombreuses régions n’ont pas assez d’ensoleillement pour permettre à une population semi-sédentaire d’être correctement approvisionnée. En ce cas, il est important d’en parler avec votre médecin : en effet, contrairement à d’autres vitamines (comme la C), la D fait partie des quelques vitamines (comme la A) dont il est possible de faire une « overdose » donnant fatigue, nausée, anorexie, hypertension, céphalées voire dans les cas les plus graves, hallucinations et troubles du rythme cardiaque. C’est donc un médicament à prendre avec les précautions classiques qui s’imposent.


PISTES DE LA SEMAINE

*Vaccin : la publication des résultats intermédiaires d’AstraZeneca et Oxford apporte une donnée encourageante qu’on peinait à voir jusqu’ici dans les autres candidats vaccins. Selon ces données (disponibles ici https://www.thelancet.com/journals/lanc ... qI26X9pWbU), le candidat britannique provoque un réponse immunitaire similaire chez les personnes âgées à celle provoquée chez les sujets les plus jeunes pour le même protocole (deux injections à 28 jours d’écart).
*Tocilizumab : nouveau rebondissement en ce qui concerne cette molécule. Des résultats de l’étude REMAP-CAP (ici : https://www.bmj.com/content/371/bmj.m45 ... 2-rBFNNk3s) tendent à montrer que le médicament aurait bien un effet protecteur pour les patients atteints de formes graves. Cet effet sur la mortalité ne serait toutefois visible que pour les patients les plus sévèrement touchés, il s’agirait donc dans tous les cas d’un traitement de niche (ce qui n’est pas plus mal quand on sait que ce traitement est particulièrement complexe à fabriquer de par sa nature « vivante » et de fait coûteux).


IMPASSE DE LA SEMAINE

*Suède : devant les résultats plus que catastrophiques de sa politique à rebours du reste du monde, le gouvernement suédois fait machine arrière. A partir du 24 novembre et pour au moins 4 semaines, pour reprendre les mots du premier ministre « N’allez pas à la gym ou à la bibliothèque, n’organisez pas de dîner, ni de fête à la maison. Annulez tout. Et ne cherchez pas à contourner les recommandations. » Si certains y voient, justement, des recommandations, plus que des mesures contraignantes, il faut rappeler que la constitution suédoise interdit ce type de mesures hors de l’état de guerre, ce qui n’est pas le cas. Avec 4 fois plus de morts par habitant que ses voisins scandinaves, une baisse de PIB plus importante qu’eux malgré la non-fermeture des commerces (8.6% contre entre 7.4% pour le Danemark et 3.2% pour la Finlande) et une immunité générale de sa population d’à peine 10% (7.3% à Stockholm), la Suède a bel et bien perdu son pari. Il lui a déjà coûté plus de 6.000 morts.


MAUVAISE NOUVELLE DE LA SEMAINE

*2e vague : l’épidémie décroit mais les chiffres restent dramatiques. On passe de 1 cas supplémentaire toutes les 4 secondes à 1 cas supplémentaire toutes les 5 secondes. Au lieu d’un hospitalisé toutes les 30 secondes, nous avons désormais un hospitalisé toutes les 45 secondes (et un toutes les 5 minutes entre en réanimation). Nous sommes enfin passés d’un mort toutes les 4 minutes à un mort toutes les 5 minutes 30.



BONNE NOUVELLE DE LA SEMAINE

*2e vague : les chiffres de Santé Publique France indiquent que le pic de contaminations est enfin passé. Il aurait eu lieu aux alentours du 10 novembre et la décrue continuerait progressivement. Reste désormais à atteindre le pic des hospitalisations et des réanimations (il serait également passé, mais tout juste, et il faut attendre quelques jours avant d’être bien sûrs qu’il ne s’agit pas d’un artefact statistique, mais il est dans tous les cas attendus pour ces jours-ci) et celui des décès (sans doute pour début décembre).
Source : Santé Publique France


« QU’EST-CE QUE PUTAIN DE QUOI ? »

Il est parfois dit que le ridicule ne tue pas. Et c’est heureux, sinon l’espérance de vie des animateurs de colonies de vacances, des clowns et de Sophie Marceau laisserait franchement à désirer, je sais de quoi je parle. Mais là, on touche vraiment le fond. Depuis des mois qu’il est admis, par des chercheurs du monde entier, du public comme du privé, de la virologie comme de la pharmacologie en passant par l’infectiologie, que, non l’hydroxychloroquine contre le Covid, ça ne marche pas, depuis des mois que l’IHU de Marseille martèle le contraire sans jamais avoir pu le prouver par ne serait-ce qu’une seule étude à la méthodologie acceptable, leur dernière trouvaille apparait comme une tentative osée de se tirer de ce mauvais pas sans perdre la face.
L’IHU a ainsi annoncé avoir découvert : le SARS-Cov-2 mutant qui résiste à l’hydroxychloroquine. Est-ce qu’il y a le moindre papier le prouvant sérieusement ? Non. Est-ce qu’une autre équipe en France a observé une telle mutation ? Du tout. Est-ce qu’on a des traces de mutations similaires ailleurs dans le monde ? Que dalle. A-t-on des éléments comparatifs sérieux sur l’efficacité de l’hydroxychloroquine et sa variation dans le temps ? Nada. A-t-on repéré des zones de mutation inquiétantes sur le virus qui pourraient causer un tel effet ? Que pouic.
Si vous voulez un avis sérieux sur ce phénomène, je vous recommande le post d’Axel Khan, c’est concis, net et précis :



POINT METHODE DE LA SEMAINE - débunkage mode d’emploi – Niveau vétéran

Fin de notre petit tour d’horizon du débunkage cette semaine avec une collection d’outils servant à vérifier des points précis dans les études que vous pourrez être amenés à lire, ainsi que sur des contenus d’information scientifique en général.
*Savoir si un essai clinique est solide :
**Nature : si c’est un essai rétrospectif (on regarde ce qui s’est passé après coup), il est moins fiable qu’un essai prospectif (on trie, on provoque et on observe). Si votre étude conclut à un effet qui n’a pu être prouvé QUE lors d’études rétrospectives et jamais lors des prospectives, elle est probablement biaisée SAUF dans les conditions suivantes :
***Ethique : il n’y a pas eu d’essai prospectif pour des raisons éthiques. Par exemple, si on veut savoir si l’exposition à un produit cause des cancers, on va éviter d’exposer des patients. On va plutôt observer si ceux exposés au cours de leur vie sont plus malades que les autres.
***Faisabilité : il n’y a pas eu d’essai prospectif parce que ce n’était pas possible. Sur les vaccins par exemple, on peut montrer l’efficacité individuelle, mais l’immunité de groupe implique une grande population. Et on ne peut pas vacciner, par exemple, juste le Pas-de-Calais, et interdire au Nord de le faire, puis les séparer hermétiquement et attendre 15 ans pour voir ce qui se passe.
***Rareté : il n’y a pas eu d’essai prospectif car le phénomène est très rare, et ne peut donc être observé qu’en rétrospectif dans la population globale, comme pour certaines mutations génétiques.
**Randomisation : elle permet de contrôler qu’on a bien les mêmes chances d’avoir de tout (hommes, femmes, vieux, cardiaques, fumeurs etc.) dans tous les groupes. Elle ne fonctionne toutefois qu’avec un nombre assez important de sujets, grâce à la loi des grands nombres. Si vous ne savez pas ce que c’est, vous pouvez découvrir ça ici :



**Placebo et groupe contrôle : il doit y avoir un groupe contrôle comparable au groupe test (même âge, même proportion des sexes, mêmes antécédents etc.). Si un des groupes et visiblement plus jeune, plus féminin ou autre, c’est un biais. L’absence de placebo similaire au traitement (même forme, même goût, même fréquence etc.) est également un biais pouvant induire un effet d’anxiété dans le groupe contrôle (il sait qu’il n’est pas traité) et minimiser l’effet placebo (pour mieux comprendre ce que c’est, voir ici



**Aveugle et double-aveugle : en aveugle, les patients ignorent ce qu’on leur donne mais le médecin le sait. En double-aveugle, le médecin ignore ce qu’il donne au patient, c’est un service de recherche séparé qui sait qui a reçu quoi et qui administre quoi. Le double aveugle est à préférer quand c’est possible.
*Savoir si un graphique est correct :
**Données : l’ensemble des données mentionnées dans le paragraphe et celles sur le graphique doivent correspondre. Dans le doute, faites-vous aider par un chercheur de votre connaissance.
**Lecture : les échelles doivent être mentionnées (on sait ce que représentent les abscisses et les ordonnées), cohérentes et honnêtes (une échelle trop large, choisie pour noyer une donnée dans un tableau, ou trop petite, faisant apparaitre gigantesque une variation minime, doit alerter)
**Plagiat et détournement : vous pouvez copier les images et vous en servir pour faire une recherche inversée dans Google Image. Le moteur de recherche vous permettra de retrouver la publication d’origine si vous avez de bonnes raisons de penser qu’une figure a été volée ou détournée.
*Savoir si les références sont solides :
**Existence : chaque article, chaque livre doit avoir un numéro d’identification (ISBN ou ISSN), il est possible d’interroger des bases de données, comme le SUDOC pour la France (ici http://www.sudoc.abes.fr/cbs/xslt/?fbcl ... 145.243,FN) ou WorldCat pour le reste du monde (ici https://www.worldcat.org/?fbclid=IwAR1n ... sg25k-0a28).
**Diplôme : s’il a été diplômé en France, vous pouvez trouver la thèse (spécialité, directeur, date de soutenance) d’un expert sur Theses.fr (https://www.theses.fr/?fbclid=IwAR2NuLj ... esKqCoXFLA)


En espérant avoir pu apporter un peu de lumière dans le chaos ambiant, je rends l'antenne, et on y retourne la semaine prochaine, car l'épidémie ne semble pas vouloir nous lâcher. En attendant, prenez soin de vous et des chercheurs qui bossent dur, et, autant que possible, restez chez vous entre.

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nov. 2020 29 17:43

Re: Point COVID de la semaine

Message par leon macnoussi

#19

Voici des infos de Dendrobate Doctor et nous sommes ensemble pour faire l'état de la recherche sur l'épidémie de Covid-19.

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FAKE DE LA SEMAINE

Maintenant que la question du vaccin est sur la table, et malgré l’annonce présidentielle comme quoi il ne sera pas obligatoire en France, les rumeurs vont bon train. La dernière en date c’est que l’Espagne rendrait, elle, le vaccin obligatoire, avec une amende de 3.000€ à la clé pour quiconque refuserait. L’info (ou plutôt l’intox) est arrivée chez nous via Planetes360, qui semble avec joué au jeu du téléphone arabe avec ses sources. Il tient en effet son information du « Courrier du soir », dont la version espagnole « El Correo de la Tarde » (qui n’a rien à voir avec le prestigieux « Il Corriere de la Serra » italien, mais qui joue visiblement sur le nom) renvoie elle vers « 20 minutos » qui parle en réalité d’une proposition faite par le gouverneur régional de la Galice (et ne concernant que cette région, donc). La proposition veut considérer le rejet de la vaccination comme une infraction dans le cas où ce refus aurait une répercussion, pouvant constituer une infraction grave si le dommage causé est important. Elle vise donc surtout les antivaccins, plus que les gens qui doutent, et viserait, si elle est acceptée (ce qu’elle n’est clairement pas encore) à surtout protéger les personnes fragiles contre les dommages causés par le refus de vaccination des autres.


DECOUVERTE DE LA SEMAINE

Connaissez-vous le principe de sérendipité ? C’est ce qui fait naître une découverte scientifique de la rencontre d’un heureux hasard et de l’œil attentif d’un chercheur qui sait voir le potentiel dudit hasard.
C’est ce qui est visiblement arrivé à AstraZeneca et Oxford avec leur candidat vaccin. Lors des essais de phase 3, impliquant des milliers de personnes, il est évident que tous les volontaires ne viennent pas au labo recevoir leur injection et que cette partie est gérée par des prestataires. C’est suite à une erreur de l’un d’entre eux qu’une partie du groupe-test s’est vu injecter par erreur une dose plus faible de vaccin lors de la première injection (le schéma vaccinal en comprend deux). Alerté de l’erreur, Oxford décide toutefois, au lieu de sortir les cas de la cohorte, de les étiqueter différemment (au lieu des placebo et des principes actifs, l’essai comporte désormais 3 groupes « placebo », « low dose » et « full dose ») et de leur injecter la seconde dose pleine normalement, afin de voir ce qui se passe.
A leur grande surprise, si les résultats sont meilleurs que le placebo dans les deux groupes (avec une moyenne de 70% d’efficacité), il y a un écart énorme d’efficacité et pas du tout dans le sens qui était envisagé. Le groupe Full Dose montre une efficacité de 60% là où le groupe Low Dose cartonne avec 90% d’efficacité.
Les chercheurs sont perplexes et ont décidé de relancer un essai pour être sûrs de leur coup et essayer de comprendre ce qui se passe. Les hypothèses vont bon train, mais rien de certain pour l’instant.
Pour plus de précisions, retrouvez l’interview du Pr. Sarah Gilbert, directrice de l’équipe de vaccinologie d’Oxford, ici : https://www.businessinsider.fr/us/oxfor ... h32vcyquUk


PISTES DE LA SEMAINE

*Vaccin : faut-il parler des effets secondaires pour lutter contre la défiance vaccinale ? Alors que plusieurs candidats sont dans les starting blocks, la question a été très sérieusement posée par des médecins supervisant les essais américains des candidats de Moderna et de Pfizer. Ces deux vaccins, comme d’autres en préparation, nécessitent en effet deux doses pour être efficaces. Or, lors des essais cliniques, des effets transitoires (ils disparaissent en 24/48h) et bénins (aucune aggravation de patients n’a été rapportée) mais impressionnants (fièvre élevée, courbatures, maux de tête et épuisement) ont pu apparaître. Les médecins sont donc inquiets, non pas à cause des effets, mais à cause de la réaction potentielle des patients qui, effrayés par les effets de la première dose, ne reviendraient pas pour la deuxième et ne seraient ainsi pas immunisés. Lors d’une rencontre avec le CDC (Center for Disease Control), ils ont donc insisté sur le fait que les autorités et les fabricants devaient parler sérieusement de ces effets, le risque de dissuader les patients de cette manière étant selon eux plus faible que le risque de rejet de la seconde dose en cas d’effet secondaire non attendu.
Retrouvez ici (https://www.cnbc.com/2020/11/23/covid-v ... lgC_aStQy4) les propos à ce sujet du Dr. Sandra Fryhofer de l’American Medical Association.
*Nicotine : suite à des données internationales qui montraient que les fumeurs tombaient moins malades que les autres (ici : https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articl ... 3Qh7uY8XSU), l’AP-HP va lancer un essai sur son personnel soignant, piloté par l’équipe des maladies infectieuses de la Pitié-Salpêtrière, sur un potentiel effet protecteur de patchs de nicotine. La molécule pourrait en effet être un inhibiteur du récepteur ACE2, une des principales portes d’entrée du virus. Les résultats sont attendus au printemps.


IMPASSE DE LA SEMAINE

*Tabac : en revanche, contrairement à la nicotine seule, fumer ne va pas vous aider dans cette histoire. Si les fumeurs semblent, selon les premiers chiffres, effectivement moins souvent malades, ils font beaucoup plus de formes graves quand ils le sont. Une méta-analyse (disponible ici : https://www.amhsr.org/articles/smoking- ... 46PXhFN_C8) réalisée sur 146793 personnes montre que les fumeurs ont 100% de risque en plus de faire des formes graves que les non-fumeurs, et les anciens fumeurs conservent un surrisque de 25%.


MAUVAISE NOUVELLE DE LA SEMAINE

*Vaccins : la défiance vaccinale s’aggrave en France. Un sondage Ipsos réalisé sur un échantillon de 18.526 personnes de 16 à 74 ans indique que l’intention de se faire vacciner contre le Covid quand un vaccin sera prêt est passée de 59% en août à 54% en octobre, classant la France loin en bas du tableau, la moyenne mondiale s’établissant à 73%. Un chiffre d’autant plus inquiétant que le conseil scientifique dit pouvoir espérer un vrai retour à la normal à l’automne 2021 « si on arrive à vacciner 80-90% de la population ».


BONNE NOUVELLE DE LA SEMAINE

*2e vague : le taux de contamination est enfin suffisamment bas pour lever quelques restrictions. A partir de ce week-end, il est de nouveau possible de se rendre dans les commerces dits « non-essentiels », les activités extra-scolaires d’extérieur peuvent reprendre, et la limite de sortie s’étend à 3h et 20km. Attention toutefois, la suite du déconfinement ne pourra avoir lieu que si ces réouvertures ne conduisent pas à un rebond des cas. Aussi, par soutien, respect, amour, ce que vous voulez, de ceux pour qui la réouverture est encore loin (on pense aux restaurants, prévus le 20 janvier, aux bars, qui devront sans doute attendre février, et aux clubs, qui auront peut-être à tenir plus longtemps encore), soyons prudents et essayons de créer un contexte dans lequel toutes les restrictions puissent être levées sans tuer 400 personnes par jour, comme cela a été le cas lors du pic de cette seconde vague.


« QU’EST-CE QUE PUTAIN DE QUOI ? »

Faut-il réellement laisser Papy et Mamie à la cuisine à Noël ? Oui, c’est une vraie question que les gens en viennent à se poser, suite aux propos du Pr. Salomon, conseillant, avec cette formule, de ne pas dîner dans la même pièce que les personnes âgées à Noël. Évidemment, ça a fait un tollé, et, pour être honnête, j’ignore si c’est parce que la formule est choc, ou si c’est parce que les gens supportent difficilement l’idée, pourtant véridique, qu’en faisant le réveillon avec les parents âgés en pleine pandémie ils risquent réellement de les tuer. Du coup, je vous propose de faire un petit point sur ce qu’il convient de faire à Noël.
Déjà, si vous n’avez plus de Papy ou de Mamie, la question elle est vite répondue.
Ensuite, si vous ne tenez absolument pas à les voir à Noël, ça règle le problème aussi, vous n’êtes pas obligés de tolérer ce que vous n’acceptez pas en temps normal juste parce qu’il y a un sapin dans le salon.
Si vous faites partie des gens pour qui la question se pose, alors il faut se la poser vraiment et ne pas juste faire l’autruche en disant que tout va bien se passer par le miracle de la magie de Noël : êtes-vous prêt à prendre le risque que votre parent âgé en meure ? La question est plus subtile qu’elle n’y parait.
Si Mamie est en phase terminale de son cancer, que c’est probablement son dernier Noël et que vous l’avez chérie toute votre enfance, elle a sans doute plus besoin de votre présence et de se sentir au milieu des siens que de sécurité sanitaire. Rester en vie n’est pas forcément une fin en soi.
Si Papy est relativement jeune, qu’il est en bonne santé et a encore de nombreuses années à partager avec vous, prenez-vous le risque de vous priver de tous les Noëls futurs avec lui en misant sur votre chance et sa résistance ?
Si pour vous Noël en famille est si important que vous êtes prêt à prendre le risque pour eux, êtes-vous prêts aussi à donner de votre personne, à ne pas sortir et ne voir personne pendant une semaine avant le réveillon afin de les protéger eux ?
Je ne serais pas aussi catégorie que Salomon à ce sujet, les familles et les situations sont par définition multiples et ne peuvent avoir une seule et unique réponse. Rappelez-vous simplement que personne n’est immortel, la vie humaine est terriblement fragile et que, vu ce que 2020 nous a mis dans la tronche, ça n’a pas l’air d’être un pari gagnant que de miser sur la chance.


POINT METHODE DE LA SEMAINE : faire de la bonne science bien vulgarisée

Cette semaine, comme annoncé, je ne travaille pas beaucoup car je suis en conférence. A la place je vais vous présenter le travail des autres, pour vous montrer un peu ce que c’est la recherche faite avec méthode et bien vulgarisée. Je vais vous parler du Biostatisticien et d’autres collègues dont j’admire le travail dans ce domaine.
C’est quelqu’un que je connais personnellement, on bossait ensemble sur le débunkage d’un article qui racontait que le Covid n’avait fait aucune victime et que tous les morts étaient dus au confinement, avant que Hold-Up sorte et nous oblige à tout lâcher pour traiter l’urgence (mais ne vous ne faites pas, ça sortira quand même et ce sera ici bien sûr).
Il est un des co-auteurs d’une méta-analyse revue par les pairs et considérée de grande qualité, publiée dans un journal sérieux et renommé. Elle est ici : https://www.clinicalmicrobiologyandinfe ... lgC_aStQy4
Cette étude a été réalisée sur leur temps libre, sans fonds, sans structure, juste parce qu’ils estimaient que c’était ce qui devait être fait. Le processus d’écriture, de soumission et de publication est raconté ici :




Comme les co-auteurs voulaient que leur étude soit compréhensible par le grand public, ils ont même fait un site entier pour expliquer et vulgariser leur étude, il est là : https://metahcq.wordpress.com/?fbclid=I ... gfZ1_VVKOQ
Ils n’ont pas cédé ni aux menaces, ni à l’intimidation, ni aux campagnes d’insultes qu’ils ont essuyées, et leur simple réponse face à la diffamation et aux attaques a été, pour l’un des co-auteurs et une autre petite équipe motivée, de démontrer que leurs contradicteurs n’étaient pas sérieux car leurs travaux étaient acceptés dans des journaux publiant n’importe quoi… un article montrant que l’hydroxychloroquine protège des accidents de trottinettes par exemple (l’article, bel et bien publié puis rétracté dès qu’ils ont signalé le canular, est ici : https://www.journalajmah.com/index.php/ ... qGidfqXexw).
Et pour parachever leur démonstration, ils ont raconté toute l’histoire de ce papier-canular, pourquoi ceux qui publiaient dans cette revue n’étaient pas crédibles et ce qu’il se passe à l’intérieur des parties de la recherche qui dysfonctionnent sur le blog d’un des co-auteurs (ici : http://www.mimiryudo.com/blog/2020/08/l ... Cc0j8MLBRo).
Donc ne restez pas que chez moi, allez voir aussi le travail des collègues, ça en vaut la peine.


En espérant avoir pu apporter un peu de lumière dans le chaos ambiant, je rends l'antenne, et on y retourne la semaine prochaine, car l'épidémie ne semble pas vouloir nous lâcher. En attendant, prenez soin de vous et des chercheurs qui bossent dur, et, autant que possible, restez chez vous.

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déc. 2020 06 22:57

Re: Point COVID de la semaine

Message par leon macnoussi

#20

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FAKE DE LA SEMAINE

On a vu passer cette semaine beaucoup de posts alarmistes (venant d’anonymes ou des habituels désinformateurs repérés), d’articles remplis d’approximations et contrevérités et de tweets virulents mais complètement creux sur l’action des vaccins ARNm sur nos cellules. Tellement que plutôt que d’un citer un en particulier, j’ai préféré vous mettre de la ressource documentaire sur le sujet en général.
Alors, attention, je vais ici beaucoup vulgariser, parce que c’est effectivement très compliqué à comprendre. Le principe de ce vaccin, c’est grosso modo d’utiliser nos cellules pour entrainer le système immunitaire. Le vaccin va apporter de l’ARN, non pas de la totalité du virus, mais de certaines de ses protéines de surface, les plus caractéristiques (pour éviter les confusions) et les plus stables (histoire que l’immunité soit pérenne même en cas de mutation du virus). Nos cellules vont lire cet ARN et fabriquer ces protéines. A noter que, bien entendu, non-liées au virus, celles-ci sont parfaitement inoffensives. Le système immunitaire va réagir et attaquer ces protéines qu’il découvre tout à coup en grand nombre sous son nez. Ce faisant, par la phagocytose (le fait que certains globules blancs mangent les pathogènes pour comprendre comment ils sont construits) et la présentation (certaines cellules spécialisées, dites dendritiques, intègrent des morceaux de pathogènes et les montrent aux Lymphocytes T pour qu’ils apprennent que ce sont des ennemis qu’il faut attaquer), le corps construit une immunité. La production de protéines s’arrête lorsque toutes les cellules auxquelles l’ARN a été donné meurent, soit de mort naturelle, soit par réaction immunitaire. Vous pouvez trouver sur le blog du collectif le billet du Dr Suchet qui explique tout ça bien mieux que moi (ici : https://covid19federation.wordpress.com ... e770t0bHkg)
Donc non, ça ne va pas changer votre ADN, ça ne va pas modifier la manière dont vos cellules fabriquent leurs protéines à long terme ou à grande échelle et non (et j’en reviens pas de devoir dire ça) ça ne va pas faire de vous l’équivalent humain d’une tomate OGM.
Si vraiment la présence d’ARN étranger au sein de vos cellules vous inquiète, je vous renvoie aux propos et schémas de Dan Freedman sur I Would Rather Talking Science




qui explique que si vous avez peur de l’introduction de 1.273 nucléotides dans vos cellules via le vaccin, vous devriez être bien plus préoccupés par les 29.811 nucléotides que le virus injecte quand vous l’attrapez.


DECOUVERTE DE LA SEMAINE

La recherche scientifique, c’est assez peu de « Eurêka » et beaucoup de « hé les mecs, je crois qu’on s’est plantés sur un truc en fait ». Et le dernier de ce genre concernerait les orages de cytokines, cette surréaction du système immunitaire conduisant à des formes graves. Ou pas. Ou plutôt (allez, tous en chœur !) c’est plus compliqué que ça.
Une récente étude (disponible ici : https://advances.sciencemag.org/content ... 0rg9vGA_LA) tend au contraire à montrer que ces orages ne sont pas à l’origine de la majorité des décès, lesquels seraient plutôt dus en fait à la destruction du système immunitaire par le virus (ce qui au passage, pourrait aussi expliquer pourquoi l’immunité a l’air aussi incertaine, mais on en est pas encore là).
SAUF QUE. Cette nouvelle étude rentre complètement en contradiction avec des précédentes, bien solides (et disponibles par exemple ici : https://jamanetwork.com/journals/jama/a ... w7XHkuewUg) qui montrent que l’administration d’anti-inflammatoire, en abaissant le système immunitaire, permet bel et bien de réduire la mortalité (de 34% en moyenne, donc c’est pas rien).
Comment est-ce possible ? Une des hypothèses qui émergent serait une différence liée à l’âge. Historiquement (un historiquement de genre il y a 9 mois, mais on a l’histoire qu’on peut), ces molécules ont commencé à être administrées face à l’afflux de patients jeunes présentant des formes graves. Or, la majorité des décès surviennent quant à eux chez les personnes âgées, qui ont déjà un système immunitaire affaibli. Il est donc possible que ces traitements diminuent bel et bien la mortalité, pour autant qu’il y ait des patients jeunes en nombre dans l’échantillon testé. A l’inverse, la majorité des décès resterait bel et bien imputable à un effondrement immunitaire, plus fréquent chez les personnes âgées.
Des études complémentaires vont être nécessaires, peut-être afin d’établir des traitements différents selon l’âge.


PISTES DE LA SEMAINE

*Oreillons : le vaccin contre les oreillons offrirait une protection, à la fois contre l’infection et contre les formes graves. L’étude qui s’est penchée sur le sujet (disponible ici : https://mbio.asm.org/content/11/6/e0262 ... BdH6ByNmNA) relève plusieurs choses intéressantes et intrigantes. Tout d’abord, cela pourrait expliquer le cas toujours pas élucidé des enfants, puisqu’ils sont proches de leur date d’injection (une première vers un an et une seconde entre 4 et 6 ans). Ensuite, cet effet n’est pas retrouvé ni avec la rougeole, ni avec la rubéole, vaccins pourtant généralement injectés en même temps, et on ignore pourquoi. De nombreux adultes n’étant pas immunisés contre les oreillons, cela pourrait être une piste intéressante, à faibles coût et risque (ce vaccin étant particulièrement bien connu), qui cumulerait plusieurs actions de prévention en une seule.
*Vaccin : en plus de sa bonne efficacité pour prévenir l’infection, le vaccin contre le Covid permettrait également le limiter les formes graves pour ceux qui l’attrapent malgré tout. Les nouvelles données annoncées sur les 196 cas de Covid dans la cohorte Moderna (185 dans le groupe placebo et 11 dans le groupe vacciné) montrent que toutes les formes graves de la maladie (30 cas) ont eu lieu dans le groupe placebo. La déclaration à ce sujet (les résultats consolidés ne sont disponibles pour l’instant que jusqu’au 95ème cas) est disponible en anglais (ici : https://www.businesstoday.in/current/wo ... a9bHvb6F-c)


IMPASSE DE LA SEMAINE

*Recherche française : soyons clairs, la science n’est pas un sport de combat, c’est un sport d’endurance. On peut être en concurrence avec des confrères pour découvrir un truc le premier, ou pour obtenir l’accès à des équipements, mais on n’a pas d’adversaires en science, ou alors c’est que quelque chose ne tourne pas rond. Si vous faites une vraie découverte, tout le monde y gagne, la recherche y gagne. Quand vous fraudez, abusez de la confiance de vos confrères ou trichez avec la méthode pour servir vos intérêts propres, tout le monde y perd. De fait, je suis triste de voir les sceptiques et vulgarisateurs britanniques décerner cette année leur Rusty Razor (une récompense pour le pire promoteur de pseudo-science de l’année) au directeur de l’IHU de Marseille (même si c’est parfaitement justifié ici : https://www.skeptic.org.uk/2020/11/fren ... NoeNGrq90Q). Je suis triste parce que je n’aime pas l’idée que la recherche de mon pays soit célèbre pour ses ratés, parce qu’on avait vraiment besoin de ça et parce que ça fait toujours moyennement plaisir que les spécialistes des autres pays du monde se foutent de votre gueule, mais surtout je suis triste parce qu’ils ont raison, que ces ratés existent et qu’on ait permis qu’une telle chose se produise est une faute collective : une faute de la manière dont on finance et organise la recherche, une faute des institutions de contrôle parce qu’il y avait déjà moult signaux d’alerte, une faute politique parce que, comme pour d’autres domaines en France, à force de jamais vouloir faire de vagues on se prend le tsunami dans la tronche. Cette info n’est pas nouvelle mais j’ai hésité un moment à savoir comment la traiter et je pense que le prisme le plus pertinent est celui-ci. Personne ne gagne jamais face au déni de science.


MAUVAISES NOUVELLES DE LA SEMAINE

*3eme vague : après la réouverture sous conditions de certains commerces, les courbes de contamination ont arrêté de descendre et stagnent. Avec les fêtes approchant, une reprise est crainte et le gouvernement se prépare déjà à une potentielle troisième vague en janvier.
Source : Santé Publique France
*Anniversaire : deux semaines après l’anniversaire du premier cas historique identifié de Covid (17 novembre 2019, même si les données montrent qu’il y a probablement eu d’autres cas plus tôt), le bilan est lourd. On approche les 65.5 millions de cas dans le monde pour plus de 1.5 millions de morts. A l’échelle mondiale, le nombre de cas continue de progresser chaque jour et on comptait encore plus de 678.000 nouveaux cas pour près de 12.500 morts pour la seule journée d’avant-hier.
Source : Center for Systems Science and Engineering (CSSE) at Johns Hopkins University (JHU)


BONNE NOUVELLE DE LA SEMAINE

*Vaccin : l’organisation concrète de la campagne commence à se dessiner. Si vous voulez savoir quand il pourrait être disponible et pour qui, voici ce qui est prévu à l’heure actuelle. La phase 1 concernera les résidents en Ehpad (ou autre type d’hébergement collectif pour personnes âgées), les personnels qui s’occupe d’eux ainsi que les soignants des secteurs à risque (réanimation principalement). La phase 2 se concentrera sur les plus de 75 ans, les personnes de 65 à 74 ans présentant des facteurs de risque ainsi que deux catégories de personnel soignants : les plus de 50 ans et les porteurs de comorbidités. La phase 3 étendra le vaccin à tous les plus de 50 ans et tous les personnels soignants, ainsi qu’aux personnes de moins de 50 ans étant à risque de par leur état de santé. La phase 4 se concentrera sur les personnes exposées par leur métier (on peut penser aux enseignants) et sur les personnes vulnérables (comme les SDF). La phase 5 verra la généralisation à toute la population majeure.
Source : HAS


« QU’EST-CE QUE PUTAIN DE QUOI ? »

Il y en a qui osent tout. Mais j’avoue que trafiquer des courbes Insee pour ensuite menacer de procès ceux qui disent que vous avez trafiqué des courbes Insee, on nous l’avait encore jamais faite. Cette magnifique démonstration qu’il ne faut jamais douter de l’imagination humaine est due au médecin Peter El Baze qui entend prouver qu’il n’y a aucune deuxième vague en… effaçant la courbe des morts sur Paint ? En tout cas c’est l’impression que ça donne. On en parle ici avec le collectif (https://www.facebook.com/groups/6970553 ... 4663960855), mais pour le coup c’était pas bien difficile puisque les courbes Insee sont publiques, et qu’il suffit de quelques clics pour aller vérifier.


POINT METHODE DE LA SEMAINE : interagir avec un vulgarisateur, mode d’emploi

Depuis quelques temps, on a constaté qu’il y avait des bonnes habitudes qui se perdaient. Les vulgarisateurs étant particulièrement sollicités en cette période d’incertitude (et c’est bien normal, c’est notre rôle), voici quelques éléments pour profiter au mieux de l’expertise et du temps qu’on met à votre service sans user ni moi ni mes collègues jusqu’à la corde.
*Soyez conscients du temps : le travail qu’on vous propose prend du temps. Beaucoup de temps. A titre informatif, entre la veille, l’écriture, la modération, la création de contenu et ma participation aux projets collectifs, la vulgarisation me prend entre 6h et 15h chaque semaine (et je suis déjà aux 35h par ailleurs), et je compte pas les autres membres de l'équipe. Donc privilégiez les commentaires plutôt que les MP pour poser vos questions (que le travail de réponse profite à un maximum de personnes), évitez les énormes pavés, sourcez les affirmations que vous voulez faire vérifier, donnez les time codes des vidéos et ne postez pas de lien sans introduire un peu de quoi il est question et ce qu’il faut y chercher ou trier comme info.
*Soyez réglo : on sait que ça vous énerve quand des gens débarquent, balancent des insanités sans réserve et sans preuve, insultent la personne qui bosse et celles qui la suivent. Mais vous n’aidez personne en vous mettant à leur niveau. Restez polis mais fermes, exigez des preuves et donnez les vôtres et si quelqu’un dépasse les bornes, signalez : la modération est là pour ça.
*Parlez-nous comme à des gens et non comme à un moteur de recherche : il arrive régulièrement qu’on reçoive des messages constitués simplement de liens dans les boites personnelles, ou avec un simple « Alors ?! » ou même « ?! » comme texte d’accompagnement. Cela parait donc évident, mais pensez à nous écrire comme à des vraies personnes (on ne vous demande pas un roman, hein, mais juste saluer et donner deux lignes de contexte avant de poser votre question, c’est cool).
*Rappelez-vous que nous sommes bénévoles : même pour ceux qui sont professionnels de la recherche ou de la médecine, la vulgarisation est faite sur notre temps libre, de repas ou de sommeil. Nous le faisons parce que nous avons les compétences pour et la conviction que c’est ce que nous devons faire. Nous vous devons rigueur et honnêteté dans nos contenus mais le SAV se fait dans la limite de nos moyens, nous ne vous devons pas une réponse complète à chaque demande (encore moins quand celle-ci n’est pas sourcée ou avec des éléments invérifiables genre des vidéos de 50min sans time code). Toutes les tournures du style « J’exige qu’on me donne les éléments » ou « Vous nous devez une explication complète » vont plus engendrer une grande lassitude qu’une réelle envie de vous répondre.
*Souvenez-vous que nos pages, c’est pas le Far West : nous sommes ravis de vous accueillir chez nous et de répondre aux questions que vous vous posez. Mais si vous posez des godasses boueuses sur la table, menacez les autres convives et insultez la cuisinière parce que le thé est pas à votre goût, vous allez prendre la porte. Nous sommes des gens de science, mais on ne rechigne pas à la pelle quand il faut. Et pour le respect de tous, parfois, il faut.


En espérant avoir pu apporter un peu de lumière dans le chaos ambiant, je rends l'antenne, et on y retourne la semaine prochaine, car l'épidémie ne semble pas vouloir nous lâcher. En attendant, prenez soin de vous et des chercheurs qui bossent dur, et, autant que possible, restez chez vous.

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